Un Discours du Trône décevant pour la francophonie canadienne

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Publié 11/04/2006 par Magdaline Boutros

Le Discours du Trône était certes prévisible, le gouvernement Harper ayant clairement indiqué ses intentions de le résumer aux cinq priorités énoncées en campagne électorale. Mais ce dont on ne se doutait pas, c’est que la dualité linguistique serait évincée de l’énoncé politique du nouveau gouvernement conservateur.

Si cela n’avait été du préambule de la Gouverneure générale Michaëlle Jean, le fait français aurait été totalement ignoré dans le Discours du Trône. «Notre dualité linguistique est un atout pour le pays», a-t-elle soutenu.

Mais dans l’énoncé des valeurs fondamentales canadiennes, aucune mention de la dualité linguistique ou encore du multiculturalisme. Les valeurs fondamentales canadiennes sont la liberté, la démocratie, la primauté du droit et les droits de la personne, nous dit Stephen Harper par la voix de Mme Jean.

«On est inquiet, signale Jean-Guy Rioux, président de la Fédération des communautés francophones et acadienne du Canada (FCFA). On ne retrouve plus dans les valeurs fondamentales la dualité linguistique et la diversité culturelle. Or, ces deux valeurs fondamentales nous permettent de nous retrouver dans les actions du gouvernement et nous distingue des autres pays», soutient-il.

Même son de cloche du côté de la Fédération culturelle canadienne-française. René Cormier, président de la Fédération, s’est dit profondément déçu du Discours du Trône où tant la francophonie canadienne que les arts et la culture ont été passés sous silence. «Le message qui nous est envoyé avec le Discours du Trône est pour le moins explicite. Les arts et la culture de la francophonie canadienne sont éradiqués de la vision de la société canadienne telle que le Parti conservateur la conçoit.»

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Le fort et ses remparts

On l’a dit et redit, le Québec a volé la vedette dans le Discours du Trône. Le point de mire du gouvernement Harper est on ne peut plus clair. Le président de la FCFA voit d’un oeil positif la reconnaissance du caractère unique et spécifique du Québec au sein de la fédération canadienne.

«Le Québec dans la francophonie canadienne c’est le fort, et nous, on est les remparts», fait valoir Jean-Guy Rioux qui appelle maintenant à une collaboration accrue entre le Québec et les communautés francophones dispersées à la grandeur du pays.

«Fort de la reconnaissance de son caractère spécifique, le Québec peut et doit assumer le rôle de leadership qui lui revient au sein de la francophonie canadienne et travailler auprès du gouvernement fédéral pour garantir le rayonnement du français à travers le pays et l’appui au développement des communautés francophones et acadienne.»

Garderies: instrument de lutte contre l’assimilation

Parmi les priorités du gouvernement Harper se trouve l’abrogation du programme national de garderies. Celui-ci sera remplacé par des allocations de 1200$ par année distribuées directement aux familles. Un projet qui ne détient pas l’appui des parents francophones du pays, rappelle Ghislaine Pilon, présidente de la Commission nationale des parents francophones.

«Les parents s’entendent pour affirmer que nous avons besoin de centres de la petite enfance et de la famille rattachés autant que possible à toutes nos écoles primaires francophones hors-Québec», affirme-t-elle en se basant sur une tournée de consultation nationale effectuée pour sonder les parents.

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C’est même plus que des garderies dont les communautés francophones hors-Québec ont besoin, soutient-elle. Alors que l’assimilation des francophones à la majorité anglophone menace la survie du fait français à l’extérieur des frontières du Québec, des centres de la petite enfance et de la famille offrent une possibilité de socialiser les enfants à la vie française très tôt dans leur vie. Ces centres regroupent une panoplie de services francophones offerts aux parents et à leurs enfants, que ce soit des services de santé, des bibliothèques, des échanges de jouets, etc.

«Si on implique un enfant dès son plus jeune âge dans ces centres francophones, il aura ensuite de fortes chances de continuer son chemin en français», explique-t-elle. «Nos besoins sont criants. On perd énormément de francophones partout au pays», lance-t-elle visiblement inquiète par le nouveau système que propose le Parti conservateur et qui menace le financement des centres de la petite enfance et de la famille.

Une lueur d’espoir: le gouvernement a consenti à ajouter au discours du Trône qu’il «encouragera l’établissement de nouvelles places en garderie». Les prochaines semaines nous diront comment cette déclaration se traduira en pratique.

Loin d’apaiser les inquiétudes du milieu francophone, le Discours du Trône a accentué les incertitudes quant à l’avenir que le Parti conservateur réserve aux communautés francophones. Jean-Guy Rioux de la FCFA tient à rappeler que le premier ministre Harper a signé, durant la campagne électorale, un engagement reconnaissant la contribution des communautés francophones et acadienne à l’enrichissement du tissu social du pays. Tous promettent maintenant de retrousser leurs manches pour faire en sorte que le gouvernement respecte ses engagements auprès des francophones.

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