Trente petites chroniques de notre histoire


Une quarantaine d’écoles secondaires de l’Ontario ont participé à l’édition 2010-2011 du concours Mordus des mots, sous le thème «récits historiques». Quelque cent textes ont été soumis, trente ont été retenus et publiés dans un collectif intitulé Petites chroniques de notre histoire. Les jeunes ont bénéficié d’un atelier sur la création d’un récit historique, animé par l’écrivain Daniel Marchildon.


Les trente textes proviennent de douze écoles catholiques et neuf écoles publiques, dont le Collège français et l’école secondaire Étienne-Brûlé, de Toronto. Cinq récits ont été écrits par des garçons, vingt-cinq par des filles. Ces dernières ont souvent accordé une place de choix au sentiment amoureux. 


Parmi les sujets abordés, il y a la dure réalité des Filles du Roy au XVIIe siècle, la Déportation des Acadiens, la légende de Jos Montferrand, la rébellion métisse de Batoche en 1885, l’opposition des Franco-Ontariens au Règlement 17 dans les années 1910, la crise de la conscription en 1917 et la Grande dépression des années 1930. 


Plus près de nous, il est aussi question de l’émeute du Forum en 1955, suite à la suspension de Maurice Richard, la Crise d’octobre 1970 et la mobilisation contre la fermeture de l’Hôpital Montfort.


Cassandra McLelland, de Welland, signe un récit intitulé Incendie. Elle nous transporte dans le Nord de la province, à l’époque des conflagrations de 1911 et 1916. Ces terribles incendies ne constituent qu’une toile de fond assez discrète. Le drame raconté est plutôt sentimental et le point de chute demeure assez inattendu.


Le récit sur la bataille pour l’Hôpital Montfort s’intitule Une fierté contagieuse et est signé par Jessica Michaud, de Dubreuilville. On y trouve des gens très militants comme Gisèle Lalonde, Félix Saint-Denis et Lise Paiement.


Kariane St-Denis, de l’école secondaire Étienne-Brûlé, signe Une grippe mortelle, récit qui porte sur la grippe espagnole à Montréal, en 1918. L’auteure en herbe fait preuve d’une étonnante originalité dans la structure de son récit. Son flashback de 1908 est une belle trouvaille.


Jeremy Jodouin, de Cornwall, signe C’est le temps que ça change. Il s’agit du seul texte écrit à la première personne; ce je est Jean Lesage qui devient premier ministre du Québec en 1960 et qui entame «une des révolutions les plus tranquilles de l’histoire mondiale».


Lee Folkersen signe Les mots de la folie, un récit inspiré de la vie du poète québécois Émile Nelligan. Comme je venais tout juste de lire Ces beaux gars à l’œil brun dont rêvait Nelligan, de Bernard Courteau, je n’ai pas pu m’empêcher de noter que cette élève de Sarnia faisait abstraction de la véritable nature du célèbre poète interné pour déviation sexuelle.


À n’en point douter, ces Petites chroniques de notre histoire témoignent de la curiosité et de l’intérêt des jeunes pour le fascinant passé de leur pays. Elles font tantôt renaître le héros Jos Montferrand ou la légende de la Corriveau, tantôt revivre un petit ou un grand combats du passé canadien-français. 


Il est à espérer que certains jeunes auteurs récidiveront. Je pense, entre autres, à Isabelle St-Hilaire, de l’école secondaire publique De La Salle (Ottawa), dont le style est déjà raffiné. À vous d’en juger par ce court extrait de son récit intitulé Le courage à la dérive: 


«Le vent nous giflait sans remords, catapultant, dans sa rage fougueuse, des gouttelettes d’eau saline glaciale, mais sa fraîcheur lui valait notre pardon. Soudain, l’ex-capitaine, garrotté dans un recoin du navire, hurla des paroles empoisonnées…» 


Collectif d’élèves, Petites chroniques de notre histoire, récits historiques, Ottawa, Éditions David, coll. Mordus des mots, 2011, 208 pages, 10 $.