Toronto 2015: «l’opportunité manquée»

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Publié 07/11/2006 par Aurélie Lebelle

Le rêve d’accueillir l’Exposition universelle 2015 à Toronto s’est brusquement envolé jeudi dernier. Après plusieurs semaines de querelles entre les gouvernements fédéral et provincial sur le financement de l’événement, David Miller a souligné qu’aucun accord n’avait pu aboutir.

Les quelque 700 millions de dollars de déficit évalués pour éponger les dépenses ont pesé lourd dans la balance et découragé les autorités à financer une éventuelle candidature.

Alors que Dalton McGuinty affirmait dernièrement que Queen’s Park ne débourserait pas un sou et que la charge revenait au fédéral, le ministre des Finances ontarien, Greg Sorbara, se disait prêt à une collaboration pour financer l’Exposition universelle.

Sur la colline parlementaire, le surplus budgétaire de 13 milliards de dollars du gouvernement fédéral avancé comme argument choc par l’Ontario, n’avait pas fait sourciller. Le gouvernement Harper avait expliqué que, selon une loi fédérale de 1995, il n’avait pas à financer des événements d’une telle ampleur.

Les multiples discussions, qui se sont intensifiées ces derniers jours, n’ont eu d’écho que le silence. David Miller, dans une conférence de presse le 2 novembre, affirmait qu’aucun accord n’avait pu être trouvé et que les garanties n’étaient pas suffisantes pour engager Toronto dans la course à l’Exposition universelle de 2015.

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Michel Frappier, directeur du projet de l’Exposition universelle, a précisé que le «gouvernement fédéral ne cautionne jamais les frais potentiels excédentaires d’un événement de cette taille» et que «la tâche revient à la province». «La province a pris la décision assez tardive qu’elle n’était pas prête à garantir l’excès budgétaire éventuel», a-t-il indiqué. Une prise de conscience tardive qui risque d’avoir des répercussions sur les élections municipales du 13 novembre prochain puisque 75% des Torontois étaient favorables à la candidature de la Ville-Reine.

«La mairie a bien mené ce débat, souligne Michel Frappier. La mésentente était entre le provincial et le fédéral. Toronto atout fait pour bien représenter les besoins de citoyens et pour mettre sa part du budget tant dans les infrastructures que dans l’excédent éventuel.»

Pourtant, l’échec repose pour certains sur les épaules de David Miller qui, encore une fois, aurait prouvé son manque de leadership. Les candidats à la mairie de Toronto s’en frottent les mains. Jane Pitfield, qui talonne Miller dans les sondages, a souligné l’échec de David Miller en expliquant qu’il n’avait pas réussi à mettre d’accord la province et le fédéral. Stephen LeDrew a joué la carte de l’ironie en proposant d’ériger une plaque commémorative en l’honneur de la défaite torontoise et particulièrement celle de Miller, qu’il a qualifié «d’historique».

Il est évident que le retrait de Toronto va laisser un goût amer de déjà-vu dans l’esprit des habitants de la Ville-Reine.

Le projet laissait entrevoir un eldorado économique pour la plus grande ville du Canada: création de 143 000 emplois, 8,1 milliards de dollars de retombées et plus de 20 millions de visiteurs attendus. L’événement aurait aussi permis de dynamiser la zone portuaire encore peu exploitée.

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Cette manne avait attiré dès l’annonce de l’éventuelle candidature, plusieurs commanditaires de poids comme Bell Globemedia, Via Rail Canada ou Carpenters Union. En effet, l’Exposition Universelle de 1967 à Montréal restait dans toutes les mémoires comme l’élément déclencheur du dynamisme de la ville et Toronto en rêvait.

«Cela a marqué l’arrivée du Canada dans la modernité et a introduit Montréal au monde», explique Pierre Bourque, un ancien maire de Montréal qui travaillait à la mairie à l’époque de l’Exposition Universelle.

L’Expo 67 a propulsé Montréal et sa population dans une ère nouvelle d’effervescence sociale, culturelle et architecturale. Aujourd’hui encore, les six mois de l’Exposition Terre des Hommes ont laissé des traces dans le visage Montréalais. Des 90 pavillons érigés pour l’occasion, certains ont subsisté. Tant de transformations et de dynamisme ont nargué les Torontois qui n’espèrent pourtant plus guère recevoir un événement capital dans leur ville.

La perte de l’Expo 2000, face à Hanovre, a été mal digérée. La candidature spectaculaire de Toronto n’avait pas réussi à arracher un vote favorable du Bureau International des Expositions et les tentatives vaines d’accueillir les Jeux Olympiques d’été ne firent qu’attiser l’image d’une ville malchanceuse.

Cette fois-ci, Toronto a été incapable de franchir la première étape du processus de sélection. Par découragement ou défaitisme, les gouvernements n’ont pas réussi ou voulu collaborer en vue d’une candidature perdue d’avance. En dehors de la course pour l’Expo 2015, Toronto laisse désormais le champ libre à d’autres villes. Izmir, en Turquie, et Milan, ont annoncé leur candidature et restent dans la course.

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