La francophonie torontoise s’est mise à l’heure du blues cette fin de semaine avec un premier concert à l’Alliance française, suivi le lendemain par une soirée de Rencontres en chansons organisée au Tranzac et dédiée à cette musique centenaire. À grands renforts de riffs vibrato tremblant et de solos sans fin, Philippe Flahaut tout d’abord et Serge Monette ensuite ont démontré que le blues n’avait pas dit son dernier mot et que toute la musique qu’on aime, elle vient de là, elle vient du blues.
Accompagné par Bernard Dionne – directeur artistique de Rencontre en chansons -, à la basse, de Rob à la batterie, le français de Toronto Philippe Flahaut a livré une performance haute en couleur où il a joué des morceaux de ses trois albums. La quarantaine de personnes présentes ont pu apprécier un bon moment de blues francophone entrecoupé d’un titre de Charlie Parker beaucoup plus jazzy. Le blues, la recette est ancienne; des paroles sur la vie de tous les jours, de bons gros solos accompagnés par un léger bruissement de cymbales et une basse puissante et le tour est joué. Il s’agit ensuite de manier la plume et l’art de la métaphore avec doigté, ce qui peut sembler facile pour un guitariste soliste. Philippe Flahaut a terminé son set par une chanson dédiée à la 401, autoroute bien connue pour ceux qui font régulièrement le trajet Toronto – Montréal, ou l’inverse! Une bonne chanson de blues sur le caractère répétitif d’une route interminable qui offre un spectacle cocasse à ceux qui sauront porter attention aux détails. Toujours entrecoupé de solos enroulés et teintés de reverb, ce dernier titre a ravi le public du Tranzac.
Après quelques minutes de pause, le franco-ontarien Serge Monette a pris la relève et présenté des chansons de son album Bad Luck, lancé au printemps dernier. Dans un registre beaucoup plus folk que blues, Serge Monette a déballé son amour pour le Nord de l’Ontario, sa région d’enfance, ses valeurs et ses traditions. Très attaché à sa terre, il la chante en puisant son inspiration à même l’histoire franco-ontarienne et lui rend hommage, bien qu’il vive désormais à Ottawa. Serge Monette est accompagné sur scène d’un guitariste à la technique remarquable, qui vient mêler ses riffs électriques aux sons électro-acoustiques du natif de Sudbury. L’album Bad Luck est nominé deux fois au prochain Gala Trilles d’Or, dans la catégorie meilleure réalisation et coup de cœur des médias.
Plus qu’un bon moment de blues folk francophone, cette soirée du samedi 7 février peut aussi être considérée comme un hommage aux guitaristes. Quelques huit guitares et plusieurs basses trônaient sur leurs pieds, bien rangées, prête à offrir aux spectateurs leurs entrailles vibrantes sous les accords des musiciens. Une bien belle soirée qui a mis à l’honneur des artistes doués d’une belle technique et prêts à faire pleurer leurs guitares devant le public conquis.