Rendez-vous avec les «oubliés» de Toronto à la Nécropole

Visites originales avec la Société d'Histoire

Gilles Huot, guide bénévole de la Société d'Histoire, emmenait les visiteurs à la découverte des oubliés de la nécropole.
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Publié 08/07/2019 par Léa Giandomenico

La Nécropole de Toronto recèle bien des secrets. Situé dans Cabbagetown, le cimetière non confessionnel et ouvert au public abrite de nombreux «oubliés», selon le guide Gilles Huot, de la Société d’Histoire de Toronto, qui dirigeait un de ses Historitours le 29 juin dernier.

La nécropole de Toronto dans Cabbagetown.

Cimetière historique

Cette année, la Société d’Histoire de Toronto fête ses 35 ans. De nombreux événements sont prévus au cours de l’été et de l’automne. La visite de la Nécropole a attiré une vingtaine de francophones et d’anglophones.

«Le premier cimetière public de Toronto, qui s’appelle York à cette époque, est construit en 1826 et se situe entre Yonge et Bloor St», explique Gilles Huot. La municipalité de Toronto ferme ce cimetière en 1850: les sépultures sont alors amenées dans un autre cimetière, la Nécropole actuelle, qui ouvre donc en 1850.

À l’entrée du cimetière se trouve aussi une chapelle.

Cimetière d’un nouveau genre

La Nécropole de Toronto est ce qu’on appelle communément un «cimetière picturesque». Très agréable, il est organisé de façon à ce que toute personne puisse s’y promener.

Alors qu’au 18e siècle les cimetières sont plutôt organisés comme des fausses communes, l’apparition des grandes villes change la donne au 19e siècle. Les gens ont besoin de grands espaces, de parcs dans lesquels se promener.

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L’expansion démographique fait apparaître un autre problème: le besoin de plus d’espaces pour enterrer les gens. Dès lors apparaissent les cimetières du même genre que la Nécropole.

«On fait d’une pierre deux coups: des cimetières-parcs, dans lesquels on peut aussi se promener. L’un des premiers de ce genre est le cimetière du Père-Lachaise, à Paris», explique Gilles Huot.

Rendre hommage aux oubliés

Le guide explique que, d’ordinaire, les visites de la Nécropole visaient à mettre en valeur des personnalités célèbres. «Cette année, nous avons souhaité mettre à l’honneur les personnes dont on n’entend pas parler, des minorités notamment: femmes, personnes de couleur, etc.»

Lors de la visite, il présentera une dizaine de personnes dont les histoires particulières méritent d’être entendues.

Gilles Huot se documente lui-même sur chacune des personnes enterrées à la Nécropole

Carol Anne Letheren: entraîneuse olympique

La sportive noire Carol Anne Letheren, qui s’est illustrée aux Jeux olympiques de Séoul, est enterrée à la Nécropole.

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«Adoptée, cette femme a réussi à se faire connaître dans le monde du sport comme entraîneuse tout d’abord, puis comme administratrice en 1988 aux JO de Séoul.»,

Elle a également été présidente du Comité olympique canadien et membre du Comité international olympique.

En tant que chef de mission pour l’équipe Canada, c’est également elle qui va voir Ben Johnson, médaillé de bronze aux JO de 1984 pour le 100 mètres mais accusé de dopage, afin qu’il rende sa médaille.

Thorton Blackburn: le premier chauffeur de taxi

En 1831, Thorton Blackburn et sa femme Lucie, deux esclaves originaires du Kentucky, fuient les États-Unis pour se réfugier au Canada, en tentant de passer la frontière à Detroit. Or, à cette époque, les chasseurs d’esclaves se font nombreux et le couple se fait attraper.

Grâce à l’aide d’habitants de Detroit, ils réussissent à s’échapper et arrivent à Toronto. «À cette époque, le lieutenant gouverneur ne voulait pas d’esclavage au Canada. Thorton et Lucie étaient donc en sécurité ici», explique Gilles Huot.

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À son arrivée à Toronto, Thorton travaille comme serveur dans un café. À cette époque, la TTC n’existe pas, et notre homme voit une véritable opportunité de palier au problème de transport en devenant le premier chauffeur de taxi de la ville.

Thorton a beaucoup œuvré pour aider les esclaves américains réfugiés au Canada. Sa maison devient pour eux un lieu de transition.

Une vingtaine de personnes, francophones et anglophones, participaient à la visite

Janet Neilson: infirmière

Cette femme officie en tant qu’infirmière de santé publique à la fin du 19e siècle. Elle rend des visites à domicile pour des patients atteints de tuberculose. Très appréciée, elle est pionnière dans ce domaine.

Albert Jackson: facteur

Né de parents esclaves, Albert Jackson est le premier facteur noir de Toronto. Alors qu’il travaille au début comme employé de ménage dans un bureau de poste torontois, il devient facteur en 1882.

Il est victime de discrimination. John A. Macdonald, le 1er Premier ministre du Canada, lui vient en aide. Albert peut continuer son travail sans souci. En janvier, un timbre à son effigie est sorti à Toronto.

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Un cimetière encore utilisé

Pour conclure la visite, Gilles Huot explique qu’il se documente sur les personnes dont il raconte les histoires à partir de la liste officielle des noms de toutes les personnes enterrées à la Nécropole. Ensuite, il fait ses propres recherches.

«Des personnes se font encore enterrer ici aujourd’hui», confirme-t-il.

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