Qui s’intéresse au Caucase?

Les armées et le pétrole doivent pouvoir traverser ses montagnes

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Publié 02/11/2010 par Gabriel Racle

En juillet dernier, la secrétaire d’État Hillary Clinton faisait une tournée dans cette région tourmentée du globe. L’Union européenne a concrétisé son important engagement en incluant les trois États de la région dans sa politique européenne de voisinage (PEV) le 11 juin 2004. Et le président Dmitri Medvedev qualifiait dernièrement le Caucase de «zone d’intérêts privilégiés» de la Russie. À priori, beaucoup d’intérêts divergents.

Que représente cette région pour que ces grandes puissances y portent une telle attention?

Il faut situer géographiquement le Caucase. C’est une zone montagneuse comprise entre la mer Noire à l’Ouest et la mer Caspienne à l’Est, formant un pont entre l’Europe au Nord, du côté de la Fédération de Russie, et l’Asie au Sud, avec la Turquie et l’Iran. Le point culminant de cette chaîne montagneuse est le mont Elbrouz qui atteint 5633 m.

Zone de passage depuis des millénaires, cette région est une mosaïque de petits peuples qui vivent côte à côte depuis toujours ou presque. On y avait même situé le Paradis terrestre!

La Montagne des langues

Une multitude de frontières délimitent des territoires autonomes ou des républiques fédérées, et le nombre de langues parlées lui a valu le surnom de Montagne des langues.

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La chaîne du Grand Caucase sépare le Caucase du Nord, qui relève de la Fédération de Russie, du Caucase du Sud, divisé en trois États, la Géorgie, l’Arménie et l’Azerbaïdjan. La région est extrêmement variée sur le plan linguistique.

On y trouve des langues indo-européennes (russe, arménien, kurde…), des langues turques, une langue mongole, une langue sémitique et des langues spécifiquement caucasiennes (géorgien, tchétchène, abkhaze…). Il ne s’agit pas de dialectes, mais pour la plupart de langues indépendantes, incompréhensibles pour la population voisine.

Une poudrière

Depuis la disparition de l’URSS, en 1991, qui avait annexé le Caucase – Staline était géorgien – la région connaît des tensions et des conflits, sous des poussées nationalistes et ethniques.

Celles-ci résultent pour une bonne part du découpage soviétique des pays, rattachant par exemple la région du Haut-Karabagh, peuplée en majorité d’Arméniens, à l’Azerbaïdjan. L’Abkhazie, qui jouissait depuis 1921 du statut de république fédérée, rattachée à la Géorgie; l’Ossétie, coupée en deux en 1922, rattachée à la Géorgie pour sa partie sud, alors que le Nord l’est à la Fédération de Russie.

Violents conflits

Tous ces noms sont évocateurs de conflits. La situation n’est guère meilleure dans le Nord. Malgré les discours de Moscou sur la «normalisation», les violences sont presque quotidiennes dans les petites républiques du Caucase russe.

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En Tchétchénie, une première guerre russo-tchétchène a duré de 1994 à 1996, soldée par un accord de paix. En 1999-2000, une deuxième guerre a repris. Après dix ans de conflit, la Tchétchénie paraît paradoxalement la plus calme, ce qui ne veut pas dire sans violence.

En Ingouchie, mais aussi au Daguestan, les kidnappings et assauts contre les convois de policiers se multiplient.

C’est partout la même escalade: la répression pousse les jeunes à rejoindre la rébellion. Pour essayer de briser ce cercle vicieux, le Kremlin a nommé un «super-gouverneur» pour le Caucase du Nord. La guerre que le Kremlin croyait avoir gagné en Tchétchénie a fait tache d’huile dans toute la région.

Ressources et transports

Ce qui suscite l’intérêt des grandes puissances, c’est un enjeu géostratégique et géoéconomique. De par sa situation, le Caucase joue un rôle clé pour différents acteurs. La Russie tient à conserver son influence sur cette partie de son flanc sud et ne voit pas d’un bon œil les pays riverains se tourner vers l’Europe et l’OTAN.

Or celle-ci est de plus en plus présente. Les trois pays sont en effet depuis 1994 partie prenante du Partenariat pour la paix. En 2002, la Géorgie et l’Azerbaïdjan devenaient candidats à l’adhésion.

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L’Arménie a fait un pas en direction de l’Alliance, en soumettant en juin 2005 un Plan d’action individuel pour le partenariat (IPAP).

Hillary Clinton a apporté un soutien modéré à la Géorgie, qui réclame son intégrité territoriale, amputée par la sécession de l’Abkhasie et de l’Ossétie du Sud à la suite de la guerre russo-géorgienne d’août 2008. Elle s’intéressait surtout à l’Azerbaïdjan.

En tenant compte de tous les problèmes pakistanais, c’est l’Azerbaïdjan qui devient l’une des zones de transit les plus importantes pour l’approvisionnement des forces armées en Afghanistan.

Pour ce qui est de l’Union européenne, le besoin de trouver des approvisionnements énergétiques est une question majeure, étant donné les problèmes encourus ou potentiels avec les approvisionnements en gaz et en pétrole prévenant de la Russie.

La région offre d’importantes ressources énergétiques directes comme en Azerbaïdjan et indirectes en provenance d’Asie centrale – Kazakhstan et Turkménistan – par la Caspienne. D’importants oléoducs et gazoducs relient l’Est à l’Ouest en contournant la Russie.

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Pour les pays occidentaux, le calme doit régner dans la région. À tout prix?

Auteur

  • Gabriel Racle

    Trente années de collaboration avec L'Express. Spécialisé en communication, psychocommunication, suggestologie, suggestopédie, rythmes biologiques, littérature française et domaine artistique. Auteur de très nombreux articles et d'une vingtaine de livres dont le dernier, «Des héros et leurs épopées», date de décembre 2015.

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