Québec: qui veut discuter de Constitution avec Philippe Couillard?

Le premier ministre Philippe Couillard.
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Publié 19/03/2013 par Stéphanie Marin et Alexandre Robillard (La Presse Canadienne)

à 18h34 HAE, le 20 mars 2013.

OTTAWA – Le nouveau chef du Parti libéral du Québec, Philippe Couillard, pourrait avoir de la difficulté à trouver un interlocuteur à Ottawa pour discuter de son projet de voir le Québec ratifier la Constitution canadienne.

Mercredi, deux ministres conservateurs québécois semblaient vouloir éviter à tout prix de discuter de cet enjeu controversé ou d’en entrevoir la possibilité.

Le gouvernement conservateur s’occupe de l’économie, a tranché mercredi le ministre Christian Paradis, au sujet de ce désir de M. Couillard, répétant la formule utilisée lorsque la moindre allusion à la reprise des débats constitutionnels fait surface.

«C’est là où sont les Québécois. Nous, on parle d’économie», a ajouté M. Paradis.

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Denis Lebel, le ministre des Transports qui a récemment hérité des Affaires intergouvernementales et qui serait pourtant l’interlocuteur de Québec dans ce dossier, n’a guère été plus bavard.

«Pour l’instant, on va continuer à faire ce que l’on fait», a-t-il répliqué, lorsque questionné sur cette possibilité. Selon lui, il est trop tôt pour spéculer sur quoi que ce soit, le nouveau chef libéral venant à peine d’être élu.

Quant au chef intérimaire du Parti libéral du Canada, Bob Rae, il est plus ouvert à la question. Laissant la porte ouverte, il croit que des discussions sont bienvenues, même si elles sont difficiles.

Illusion

Pour Daniel Paillé, le chef du Bloc québécois, Philippe Couillard vit une «grande illusion». Et qu’Ottawa ferme la porte à ces discussions ne le surprend pas.

«Pour nous ça ne fait que confirmer notre volonté de dire: le Québec c’est la souveraineté. Vous savez, parce que l’accord de 82, il n’est pas signable. Il n’y a aucun des premiers ministres du Québec, qu’ils soient fédéralistes ou qu’ils soient souverainistes, qui a même songé à y penser de le signer», a dit M. Paillé.

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M. Couillard a tenu ces propos sur la Constitution canadienne lors de son premier discours après son élection comme chef. Il a soulevé l’ire du Parti québécois en suggérant notamment que la signature de Québec pourrait être apposée au bas de la Constitution sans consulter la population.

Le successeur de Jean Charest aimerait que le Québec se prépare pour ratifier la Constitution canadienne en 2017, 35 ans après son rapatriement.

«Ce n’est pas une priorité quotidienne, avait-il dit le jour de son élection, dimanche. C’est un objectif important pour tous les Québécois alors qu’on sait fort bien que la priorité quotidienne des Québécois demeure l’économie et l’emploi et la création de la richesse.»

La Constitution a été rapatriée en 1982, mais Québec, contrairement aux autres provinces, n’a jamais signé le document.

Improvisation?

Mardi, ce sont les péquistes qui ont croisé le tir pour dénoncer le projet d’adhésion à la Constitution canadienne, parce que le nouveau chef libéral a évoqué la possibilité de ne pas le soumettre à la population par référendum.

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Rappelant que M. Couillard rompt avec la statu quo constitutionnel mis de l’avant jusqu’ici par son parti, la première ministre Pauline Marois a exprimé son étonnement, lors d’une conférence de presse qui devait porter sur l’économie sociale.

«Il a l’air de vouloir régler ça en un coup de cuiller à pot alors que dans son parti on dit depuis des mois, des années, que le fruit n’est pas mûr, a-t-elle dit. Honnêtement, je ne pense pas qu’on puisse régler cette question sans qu’il y ait une consultation de la population.»

Plus tôt, deux de ses ministres ont accusé M. Couillard de faire preuve d’improvisation et de mépris avec sa proposition.

Le ministre des Affaires intergouvernementales canadiennes, Alexandre Cloutier, a déclaré que M. Couillard doit préciser quelles sont les conditions qu’il fixerait à l’adhésion du Québec.

«Est-ce qu’il va partir des revendications traditionnelles du Québec? Est-ce qu’il va plutôt s’inspirer de Meech ou de Charlottetown? On ne le sait pas. Alors, on sera témoin de cette improvisation du nouveau leader du Parti libéral», a-t-il dit.

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Le ministre des Institutions démocratiques, Bernard Drainville, a quant à lui estimé que le projet de ratification de M. Couillard devrait obligatoirement être soumis aux Québécois par référendum.

«En affirmant qu’il n’est pas nécessaire de consulter les Québécois avant de signer la Constitution canadienne, nous, on pense que Philippe Couillard fait preuve de mépris envers la démocratie», a-t-il dit.

Lundi, M. Couillard a évoqué la possibilité de se contenter de l’approbation de l’Assemblée nationale, avant de ratifier la Constitution.

Priorité à l’économie

En se rendant à sa première réunion avec ses députés, M. Couillard a refusé de s’avancer sur son projet constitutionnel, répétant qu’il est encore trop tôt pour donner les précisions réclamées par les péquistes.

«Le seul échéancier sur lequel on travaille actuellement, c’est de dire qu’on veut avoir la discussion au PLQ, a-t-il dit. Pourquoi? Parce que les questions d’identité, bien sûr, arrivent en priorité après les questions économiques.»

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Les deux ex-adversaires de M. Couillard, Pierre Moreau et Raymond Bachand, sont apparus à ses côtés pour rencontrer la presse.

Précédemment, M. Bachand avait répondu aux questions des journalistes en assurant qu’il siégera jusqu’à la fin de son mandat et qu’il conservera ses fonctions de porte-parole en matière de finances.

M. Bachand s’est aussi rangé derrière le projet d’adhésion à la Constitution de son chef, bien qu’avant l’élection de M. Couillard, dimanche, il jugeait inutile de s’attaquer à ce dossier.

«Il y a aura des discussions à faire mais bien sûr je suis membre du parti», a-t-il dit.

Fraude au CUSM

Alors qu’il avait attaqué durement M. Couillard sur ses liens avec le controversé Arthur Porter, recherché pour fraude et abus de confiance, M. Bachand s’est montré satisfait par les explications de son nouveau chef, qui nie toute implication dans des malversations.

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«Tout ce qui avait à être dit sur ça a été dit, il a fourni de larges explications et je suis satisfait, a-t-il dit. Je pense que la page est tournée et on regarde l’avenir, tout le monde.»

Mardi, la première ministre Pauline Marois avait déclaré que M. Couillard était affaibli à cause de sa relation amicale et professionnelle avec Arthur Porter, l’ex-directeur général du Centre universitaire de santé McGill (CUSM). «Le dossier est lourd et c’est à mon avis une pierre au soulier de M. Couillard, cette relation avec M. Porter», a-t-elle dit.

M. Couillard a répété qu’il n’avait rien à voir avec les faits qui sont reprochés à M. Porter, relativement à l’octroi d’un contrat du CUSM à la firme de génie SNC-Lavalin.

Le chef libéral a aussi déclaré qu’il ignorait si M. Porter, qui présidait le Comité de surveillance des activités de renseignement de sécurité (CSARS), a joué en rôle dans sa nomination à cette instance.

«Ça me paraît impossible de juger de ça, a-t-il dit. J’ai été contacté par le Conseil privé.» M. Couillard a ajouté qu’avant sa nomination, il n’avait jamais discuté avec M. Porter de ses activités au CSARS.

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Jean-Marc Fournier

Philippe Couillard, maintiendra Jean-Marc Fournier à son poste de chef de l’aile parlementaire et assure que ses rivaux défaits joueront un rôle important dans son équipe.

Au lendemain de son élection, M. Couillard avait ouvert une conférence de presse, lundi matin, en s’adressant à ses anciens adversaires, Raymond Bachand et Pierre Moreau.

«Mes premiers mots seront pour féliciter mes deux collègues, M. Bachand et M. Moreau, pour la qualité de leur campagne, leurs allocutions d’hier et pour les messages positifs qui ont été envoyés en termes de ralliement après l’annonce des résultats», a-t-il dit.

M. Couillard participera mardi à l’Assemblée nationale à son premier caucus des députés libéraux, à titre de nouveau chef du PLQ. Il maintiendra ensuite une présence hebdomadaire aux rencontres de l’aile parlementaire.

Le nouveau chef a répété qu’il préfère consacrer les prochains mois à des tournées régionales qui précéderont l’organisation de colloques de militants et qu’il n’est pas pressé de se faire élire à l’Assemblée nationale.

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M. Couillard souhaite qu’entre-temps le PLQ lui verse un salaire, dont il n’a pas précisé le montant. L’information sera rendue publique le moment venu, a-t-il dit indiqué.

Le chef libéral a annoncé que M. Fournier, qui a occupé la fonction de chef intérimaire jusqu’à son élection, dimanche, conservera ses fonctions à la tête du caucus.

«Vous avez pu comme moi constater la qualité de son travail de chef de l’opposition, nous serons bien sûr en liaison très étroite dans nos rôles respectifs», a-t-il dit.

Alors que l’aile parlementaire libérale a rejeté les fondements même du projet de loi 14, qui vise à modifier la Charte de la langue française, M. Couillard a précisé que ses députés étudieront tout amendement qui pourrait être proposé.

«Plutôt que d’imposer plus de coercition, nous voulons valoriser le français et aider les gens et leur donner des incitatifs pour franciser leurs entreprises, sans toutefois alourdir le fardeau administratif des entreprises», a-t-il répondu à une question en anglais.

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«Mais si des amendements sont présentés, nous avons une équipe parlementaire responsable, qui vont regarder les amendements et les étudier.»

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