Québec: quatre enjeux et deux inconnus

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Publié 01/08/2012 par Jocelyne Richer (La Presse Canadienne)

à 12h33 HAE, 1er août 2012.

QUÉBEC – Les campagnes électorales réservent toujours leur lot de surprises quant aux enjeux soulevés et aux thèmes retenus. Mais certains sujets seront incontournables durant la campagne qui débute, et chaque parti tentera d’en tirer avantage, dans l’espoir de récolter des votes. Voici quatre enjeux et deux grandes inconnues qui risquent fort d’influencer le résultat final le soir du 4 septembre:

Quatre enjeux:

L’intégrité: Au cours des dernières années, l’intégrité du gouvernement de Jean Charest a été maintes fois mise en doute. Les nombreuses allégations de corruption et de collusion dans l’industrie de la construction, souvent reliées au financement du Parti libéral, ont contribué à miner la confiance d’une partie de la population envers le gouvernement, qui a dû se résoudre, sous la pression, à créer la Commission Charbonneau chargée de faire toute la lumière sur ce secteur d’activités. La chef du Parti québécois, Pauline Marois, se fera sûrement un plaisir de répéter qu’à ses yeux la preuve est faite que le premier ministre n’est pas digne d’être réélu.

L’identité: Le chef libéral Jean Charest misera sur le besoin de stabilité de la population, en rappelant qu’un vote pour le Parti québécois ouvre la porte à la tenue d’un référendum sur la souveraineté, qui risque de diviser une fois de plus la population. Quant à elle, Mme Marois fera vibrer la corde nationaliste des Québécois, cherchant leur appui en s’engageant à renforcer la loi 101.

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Le Plan Nord: Le Parti libéral continuera de miser sur l’économie et l’énergie pour séduire l’électorat. Dans un contexte où l’économie mondiale est fragile, Jean Charest brandira sa carte maîtresse, le Plan Nord, faisant miroiter des milliers d’emplois bien rémunérés et des redevances dans les coffres de l’État. Mais son modèle d’exploitation des ressources naturelles risque de donner lieu à des passes d’armes intéressantes avec les péquistes, qui jugent notamment les redevances imposées aux minières beaucoup trop timides.

La crise étudiante: À la mi-août, les cours doivent reprendre dans les cégeps. Est-ce que la rentrée se passera en douceur ou bien assisterons-nous à une nouvelle crise étudiante aux proportions insoupçonnées? En ce cas, les libéraux vont se poser en champions de la loi et l’ordre, en maintenant la ligne dure, tandis que les péquistes vont les accuser de se couper de la jeunesse, les exhortant à s’asseoir et à négocier une entente.

Deux inconnues:

La carte électorale: Depuis le scrutin précédent, la carte du Québec a été complètement redessinée, pour tenir compte des mouvements de population. Trois circonscriptions ont disparu, trois autres se sont ajoutées. Au total, 86 des 125 circonscriptions présentent de nouveaux contours. Il est difficile de déterminer quel sera l’impact de ce changement (dans certains cas majeur) sur les gains et pertes de chaque parti, mais impact il y aura sûrement.

Le taux de participation: Résultat du cynisme ambiant ou expression d’une certaine lassitude de la population, le taux de participation aux élections générales, celui des jeunes en particulier, a tendance à chuter. En 2008, seulement 57 pour cent des électeurs se sont prévalu de leur droit de vote. Si cette fois les électeurs, nommément les plus jeunes d’entre eux, décident en masse de faire entendre leur voix, le résultat s’en ressentira.

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Des circonscriptions à surveiller

La campagne électorale qui s’amorce donnera sans doute lieu à des luttes serrées dans plusieurs circonscriptions, notamment celles où les candidats vedettes des partis s’affrontent. Certaines mériteront une attention particulière le soir du 4 septembre:

Sherbrooke : Même s’il se présente couronné du prestige associé à son rôle de premier ministre, Jean Charest pourrait ne pas avoir la partie facile dans sa ville natale, où il cherche à obtenir un cinquième mandat de député à Québec. Il nous a habitués à de faibles majorités (1332 voix seulement en 2007) dans cette circonscription plutôt nationaliste et doit composer avec un fort taux d’insatisfaction de la population. De plus, il affrontera un candidat péquiste bien connu, l’ancien député bloquiste Serge Cardin.

Charlevoix-Côte-de-Beaupré : La chef du Parti québécois, Pauline Marois, ne devrait pas avoir trop de difficulté à se faire réélire dans Charlevoix-Côte-de-Beaupré, une vaste circonscription aux portes de Québec, qui englobe l’Île d’Orléans. Sa majorité en 2008: 4269 voix. Mais si son parti ne prend pas le pouvoir, combien de temps pourra-t-elle demeurer députée?

L’Assomption : L’ex-député de Rousseau et chef de la Coalition avenir Québec (CAQ), François Legault, tente sa chance dans L’Assomption (qui recoupe une partie de son ancienne circonscription des Laurentides) pour revenir siéger à l’Assemblée nationale.

Mercier: Le co-chef et seul député de Québec solidaire, Amir Khadir, devra défendre son siège convoité par l’ancien porte-parole des travailleurs de l’entreprise d’aéronautique Aveos, Jean Poirier, candidat du PQ. En 2008, M. Khadir l’avait emporté par seulement 810 voix, dans cette circonscription traditionnellement péquiste du plateau Mont-Royal à Montréal.

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Argenteuil: L’ancienne circonscription de David Whissell et autrefois de Claude Ryan était considérée comme une forteresse libérale avant l’élection complémentaire du printemps dernier qui a donné gagnant le péquiste Roland Richer. Accident de parcours ou véritable changement?

Borduas : Forteresse péquiste, la circonscription était représentée par Pierre Curzi, devenu indépendant en 2011. Un des candidats-vedettes du PQ, l’ex-journaliste de Radio-Canada Pierre Duchesne ne devrait pas rencontrer trop d’obstacles à gagner un siège à l’Assemblée nationale. Mais il sera sûrement une des cibles privilégiées des libéraux, qui ont déjà commencé à tenter de mettre en doute son intégrité.

Crémazie : La députée indépendante et auparavant péquiste Lisette Lapointe a tiré sa révérence. Deux grosses pointures s’affrontent dans cette circonscription au cœur de Montréal : la présidente de la Commission scolaire de Montréal, Diane de Courcy, pour le PQ, et l’ex-députée libérale fédérale d’Ahuntsic, Eleni Bakopanos, pour le PLQ.

Fabre : La présidente de la CAQ, Dominique Anglade, tente de ravir le comté aux libéraux, qui devraient présenter l’ex-bâtonnier du Québec Me Gilles Ouimet pour succéder à la ministre Michelle Courchesne.

Laval-des-Rapides : Un des candidats-vedettes du PQ, le leader étudiant Léo Bureau-Blouin, âgé de 20 ans, a rangé son carré rouge pour faire la lutte au ministre Alain Paquet, dans cette circonscription au passé péquiste. En 2008, sa majorité était de 1365 voix.

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Gouin : Québec solidaire mettra le paquet pour rafler Gouin, où tentera pour la troisième fois de se faire élire la porte-étendard du parti de gauche Françoise David. Elle avait recueilli 32 pour cent du vote en 2008. Mais le député péquiste Nicolas Girard, un des plus redoutables de l’opposition officielle en Chambre, n’entend pas céder sa place.

Sanguinet : Quel sort les électeurs de cette nouvelle circonscription de la rive-sud de Montréal réserveront-ils au transfuge du Parti québécois de La Prairie François Rebello passé à la CAQ? La même question vaut pour les électeurs de Deux-Montagnes (Benoît Charette) et Blainville (Daniel Ratthé) où le PQ présente une de ses têtes d’affiche, le président de la Fédération des municipalités du Québec, Bernard Généreux.

Taschereau : À la surprise générale, le ministre Clément Gignac a choisi de laisser le confort de la forteresse libérale de Marguerite-Bourgeoys, à Montréal, pour tenter de se faire élire dans une circonscription péquiste de Québec, Taschereau, détenue par Agnès Maltais depuis 1998. Pari risqué.

Nicolet-Bécancour : En 2008, les électeurs ont choisi pour député le candidat péquiste Jean-Martin Aussant, mais ce dernier était pressé de faire la souveraineté et a fondé depuis son propre parti, Option Nationale. Les électeurs le suivront-ils?

Richmond : Karine Vallières, la fille du ministre Yvon Vallières, véritable institution dans la région qui tire sa révérence après neuf mandats, tentera de conserver le comté dans le giron libéral. Mais le redécoupage de la carte électorale pourrait avantager l’actuel député péquiste de Johnson, Étienne-Alexis Boucher qui se présente cette fois dans Richmond.

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Rosemont : La circonscription péquiste représentée par Louise Beaudoin, qui a choisi de quitter la politique, pourrait devenir le tremplin de Jean-François Lisée, l’ancien conseiller des Jacques Parizeau et Lucien Bouchard, et surtout une des têtes d’affiche du parti qui doit rendre la nouvelle officielle jeudi.

Saint-François : Le départ de la ministre Monique Gagnon-Tremblay pourrait ouvrir la voie au péquiste Réjean Hébert, un médecin spécialisé dans les questions de vieillissement et ancien doyen de la faculté de médecine de l’Université de Sherbrooke qui récidive après avoir failli l’emporter en 2008 avec 42 pour cent du vote. Dans un éventuel cabinet Marois, il pourrait bien devenir le prochain ministre de la Santé.

Trois-Rivières : Le PQ va tenter de reprendre cette circonscription libérale en présentant Djemila Benhabib, une militante anti-islamiste, apôtre de la laïcité totale de l’État, d’origine algérienne et auteure de quelques livres dont «Ma vie à contre-Coran».

Terrebonne: Le président de la Fédération des médecins spécialistes, le docteur Gaétan Barrette, fougueux pourfendeur de la gestion du système de santé par le gouvernement Charest, porte les couleurs de la CAQ dans cette circonscription péquiste, même si, en 2008, la majorité du PQ était de plus de 6000 voix.

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