Au fil des siècles, la pratique de la transcription a fourni l’occasion à des musiciens – tantôt compositeurs eux-mêmes, tantôt chefs d’orchestre ou solistes – d’adapter des œuvres de référence à un autre cadre, en condensant tout le matériau mélodique et harmonique d’une symphonie aux 88 touches du piano (comme Liszt l’a fait pour Beethoven) ou, à l’autre extrême, en rendant explicites les couleurs orchestrales suggérées par une pièce écrite pour le piano, comme en témoigne Children’s Corner (ATMA), qui jette un regard neuf sur le répertoire de Claude Debussy.
Si, dans la première moitié du XXe siècle, une foule de musiciens et pas des moindres – Ravel, Stokowski, Ansermet, Caplet – s’en sont donné à cœur joie avec l’oeuvre pour piano de Debussy, c’est qu’elle portait déjà en elle toute une palette de couleurs châtoyantes, un univers de sonorités et de références thématiques qui invitent aux voyages dans le temps (Six épigrammes antiques) ou vers de contrées inspirant un exotisme qui était de rigueur à l’époque des premières expositions universelles (Tarentelle styrienne, La soirée dans Grenade).
À la tête de l’Ochestre symphonique de Québec, le chef Yoav Talmi a de toute évidence pris grand plaisir à déployer ladite palette, tandis que la flûte, le hautbois et la harpe deviennent des protagonistes à part entière dans le flot d’images qui nous est donné à entendre.
Quant au sublime onirisme de Clair de Lune, restitué ici par deux fois (Stokowski et Caplet), il impose sa délicate transparence avec un tel naturel que l’on serait porté à croire qu’il s’agit de la version d’origine, dont l’incarnation pianistique serait en fait la transcription.
Justice à Rameau
En-dehors du cercle des amoureux de l’opéra baroque, Jean-Philippe Rameau (1683-1764) demeure un de ces musiciens dont le nom nous est familier, mais dont l’œuvre reste méconnue.