Pas de politiques sociales pour sortir de la prostitution

Personne ne rêve d'être prostituée. (Photo: Michel G., 2009 Montréal)
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Publié 28/03/2017 par Lila Mouch

Il y a un manque évident de politiques sociales pour aider les femmes à sortir de la prostitution.

C’est ce qui ressort du film l’Imposture, la prostitution mise à nu, d’Ève Lamont, et du débat qui a suivi sa projection au Collège Boréal par Oasis Centre des femmes, le 24 mars, dans le cadre de la Semaine de la Francophonie,

Réalisé en 2010, ce long métrage met en scène les témoignages de prostituées ayant quitté depuis peu le métier. Le processus de guérison par lequel ces femmes passent met en lumière les problèmes auxquels elles sont confrontées.

Rose Dufour
Rose Dufour

«On ne rêve pas d’être prostituée», déclare Rose Dufour, anthropologue spécialisée en santé publique et fondatrice de la Maison de Marthe à Québec, qui s’exprime à plusieurs reprises dans le reportage. «Les phénomènes d’accession à la prostitution sont généralement la pauvreté, l’inceste et toutes autres formes de violences.»

La position d’Oasis centre des femmes sur la question est abolitionniste, rien de moins.

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Ce phénomène touche toutes les catégories de femmes, jeunes et moins jeunes, et pour plusieurs raisons: le temps d’un été pour faire de l’argent, des dettes à payer, la drogue, l’influence ou l’oppression d’un pimp. «Ces femmes sont quasi conditionnées à faire ce job, comme si en fait, elles ne savaient rien faire d’autre», soutient Oasis. «On leur a laissé croire qu’elles n’avaient pas le choix.»

Comme le disait Albert Einstein: «tout le monde est un génie. Mais si on juge un poisson à sa capacité de grimper à un arbre, il passera sa vie à croire qu’il est stupide…»

Pourtant, la grande majorité de ces femmes veulent s’en sortir. «Nous avons deux corps, le nôtre et celui pour la prostitution, ce n’est pas moi», disait une des jeunes filles dans ce documentaire. Toutes ces femmes expriment la perte de l’estime de soi, le sentiment de culpabilité, la difficulté à entretenir des relations affectives, et une impression de mépris de son corps. La dépression, le stress et le sentiment d’échec dans un contexte aussi troublant sont presque inévitables.

Être en faveur de la décriminalisation de la prostitution ne veut pas dire «être en faveur de l’exploitation sexuelle des femmes et la violence à leur égard», selon Oasis. «Associer la prostitution à une pratique déviante stigmatise fortement ces femmes et contribue à les marginaliser.»

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Le discours dominant s’attarde à criminaliser les prostituées. Le Code pénal les punit, mais, la plupart du temps, les clients ne sont pas inquiétés. Au Canada, la prostitution comme telle n’est pas illégale, ce qui est interdit, ce sont les maisons de débauche, le proxénétisme et la sollicitation en public.

Rendre illégales les maisons de débauche n’empêche pas les prostituées d’exercer leur métier. Pourtant, elles seraient plus sécuritaires que la voiture ou le logement d’un client, voire une ruelle déserte, où les femmes ne sont protégées d’aucun danger.

À Toronto, on trouve surtout Oasis pour prendre a cœur la protection de ces femmes, ainsi que Maggie’s (The Toronto Sex Workers Action Project), une organisation anglophone qui a pour mission d’assister et de protéger les travailleuses du sexe dans la dignité.

De manière générale, il n’existe pas de réelle politique sociale mise en œuvre au Canada pour la protection et la réinsertion de ces filles. Cependant, les actes criminels relèvent de la compétence fédérale.

Le 2 décembre 1949, l’Assemblée générale des Nations Unies a voté la Convention pour la répression de la traite des êtres humains et de l’exploitation de la prostitution d’autrui. Ce texte, plutôt abolitionniste, n’a pourtant pas de réelle portée, n’incriminant personne.

Capture d'écran du film l'imposture d'Eve Lamont
Capture d’écran du film L’imposture d’Eve Lamont

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