Nudité et tolérance de la communauté

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Publié 06/09/2011 par Gérard Lévesque

Le 28 août dernier, une manifestation en faveur du droit des femmes de se promener seins nus s’est déroulée à Toronto. Une vingtaine de femmes ont manifesté la poitrine à l’air, certaines arborant les ailes d’un ange. Selon Raël, le leader du mouvement nouvelâgeux qui porte son nom, «puisque les hommes peuvent déambuler torse nu en public, les femmes devraient avoir le même droit».

La manifestation devait initialement être tenue dans le parc Ashbridges Bay par GoTopless.org, un groupe fondé en 2007 par Raël, mais la ville de Toronto s’y est opposée, demandant aux organisateurs de défiler plutôt sur une plage nudiste de Hanlan’s Point, sur les Îles de Toronto. Les organisateurs ont refusé, préférant utiliser des rues du quartier Beaches.

La position de la ville est fondée sur le chapitre 608 du Code municipal de Toronto qui exige que, dans tous les parcs, il faut être convenablement vêtu, sauf sur une partie de la page Hanlan’s Point, là où le port de vêtement est facultatif.

Selon Diane Brisebois, porte-parole de GoTopless, il s’agit là d’une discrimination sur le sexe puisque les hommes sont traités différemment des femmes. L’organisme entend militer pour obtenir une modification au règlement municipal.

La position de GoTopless est basée sur une décision de la Cour d’appel de l’Ontario : R. c. Jacob, 1996 CanLII 1119 (ON CA). Gwen Jacob, une jeune femme de 20 ans, avait été accusée d’avoir commis une action indécente, en contravention de l’article 171 (1) a) du Code criminel, alors qu’elle avait déambulait seins nus sur des rues de la ville de Guelph, le 19 juillet 1991.

Lors de son procès, le juge a estimé que les femmes de Guelph auraient considéré comme inapproprié le comportement de Jacob et, en conséquence, il a déclaré l’accusée coupable.

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La Cour d’appel a renversé cette décision et a prononcé un acquittement en indiquant que le fait pour une femme de se promener la poitrine dénudée en pleine ville par une journée chaude d’été ne constitue pas une action indécente. Le geste de l’accusée n’était pas fait à des fins commerciales et était très limité dans sa portée. Il n’avait rien de dégradant ou de déshumanisant. L’accusée n’a pas enfreint les normes de tolérance de la communauté.

Le plus haut tribunal de la province a précisé que, pour déterminer si une action est indécente, le critère de la tolérance de la communauté est le critère déterminant à considérer. Rien dans le libellé de l’article 173 du Code criminel n’exige qu’une action indécente soit nécessairement de nature sexuelle, une action peut être indécente en raison d’autres comportements inappropriés.

Le critère n’en est pas de comparaison avec le comportement de la majorité des femmes, mais celui d’une norme de tolérance contemporaine. Il faut également prendre en considération la question du tort: plus grand est le potentiel de causer du tort, plus la norme de tolérance de la communauté sera interprétée de façon restrictive.

Pour plus de renseignements:
Texte de la décision de la Cour d’appel de l’Ontario dans R. c. Jacob: www.canlii.org/en/on/onca/doc/1996/1996canlii1119/1996canlii1119.html

Auteur

  • Gérard Lévesque

    Avocat et notaire depuis 1988, ex-directeur général de l'Association des juristes d'expression française de l'Ontario. Souvent impliqué dans des causes portant sur les droits linguistiques. Correspondant de l-express.ca, votre destination pour profiter au maximum de Toronto.

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