Nortel ou la chute d’un géant

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Publié 20/01/2009 par Claude Fugère

Nortel, jadis un des plus beau fleurons de la technologie de notre vaste pays, est en train de passer l’arme à gauche et s’est mis sous la protection de ses créanciers aux États-Unis. De plus, la Bourse de Toronto est en train de vérifier si le titre de Nortel répond encore aux critères afin de rester listé en bourse. Regardons ensemble les hauts, mais surtout les bas de Nortel au cours des dernières années…

En septembre 2000, Nortel employait près de 90 000 employés, et avait une capitalisation boursière de près de 400 milliards de dollars, soit environ le tiers de la valeur totale de l’indice de la Bourse de Toronto! Le titre atteint même un sommet de 124,50$ lors de cette période faste et plusieurs pensaient alors que ce n’était qu’un début… La demande pour l’équipement de fibre optique sur laquelle était basée la valeur boursière de l’entreprise, était saturée. Nortel allait alors subir une spectaculaire chute dont elle n’allait jamais se relever.

En effet, l’équipement fabriqué par Nortel comptait pour environ 75 % du traffic Internet en Amérique du Nord à la fin des années 90, et la compagnie, voulant encore augmenter son emprise sur ce marché, acheta plusieurs compagnies avec des technologies prometteuses. En 2000 uniquement, elle acheta 11 compagnies pour un total de 19,7 milliards de dollars américains.

Une erreur notable de Nortel fut d’investir et de produire massivement dans une technologie qui, bien qu’excellente, ne fut pas adaptée massivement. C’est ainsi que le GSM (Global System for Mobile Communications) pris le dessus sur le CDMA (Code division multiple access) en ce qui concerne la technologie sans fil, un peu comme VHS a supplanté Beta pour les magnétoscopes. Donc, la compagnie montrait une stratégie axée sur la technologie plutôt que sur l’analyse du marché.

Aussi, les principaux clients de l’entreprise, des entreprises de télécommunications, ont été trop optimistes lors de leurs prévisions de l’augmentation de leur clientèle. Ainsi, les commandes ont diminué pour éventuellement baisser de moitié. De plus, en moins d’un an, les entreprises que Nortel avait payé plusieurs milliards de dollars ne valaient plus que quelques centaines de millions de dollars.

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Après avoir affirmé trois fois durant l’année 2001 que la compagnie atteindrait ses objectifs financiers, le Président de l’entreprise, John Roth changea drastiquement les prévisions pour l’année, ce qui sema l’ire de plusieurs investisseurs qui lancèrent un recours collectif pour la compagnie. Résultat de tout ceci: 45 000 emplois en moins, perte de 27,3 milliards de dollars US et John Roth qui quitte son poste pour être remplacé par Frank Dunn.

L’année 2002 ne fut guère mieux: les obligations de la compagnie ont été classées dans la catégorie «de pacotille», la direction ne donne aucune bonne nouvelle et le titre chute à 0,69$. Les liquidités de Nortel la sauveront de la faillite à ce moment. De plus, 10 000 autres emplois seront supprimés. Ces remèdes drastiques, combinés à la signature de contrats avec Verizon et Orange, ramèneront Nortel sur le chemin de la rentabilité pour l’exercice 2003.

Or, les chiffres étaient truqués. Après plus d’un an d’audition de ses résultats financiers, la compagnie annonce que son profit pour 2003 est de 434 millions de dollars US au lieu de 732. Et en mai 2005, il est annoncé que l’entreprise a perdu 51 millions de dollars US en 2004. Durant cette période, 3 250 autres emplois ont été supprimés. Frank Dunn et plusieurs autres hauts dirigeants se sont fait montrer la porte. Bill Owens le remplaça jusqu’en octobre 2005, alors que Nortel appointera Mike Zafirovski pour le remplacer.

Zafirovski fait de son mieux pour redresser l’entreprise. Il supprime 4 000 autres postes pour diminuer le total à 31 000, règlera le litige avec les actionnaires pour fraude comptable en versant 2,2 milliards de dollars américains pour dédommager les actionnaires floués.

Nortel continuait de faire manchette: transfert de certains postes vers l’Inde et la Chine, Frank Dunn et d’autres anciens dirigeants condamnés au criminel pour fraude.

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Mais en janvier 2009, Nortel décida d’outrepasser un paiement d’intérêt de 107 millions de dollars, soit environ 5 % des 2.6 milliards de dollars qu’il lui reste en caisse, afin de demander de se protéger contre ses créanciers. La valeur nette de l’entreprise se chiffre alors à 200 millions de dollars.

Le contexte économique actuel, qui rend la demande morose, mais aussi les coûts inhérents à la réparation des préjudices commis aux actionnaires, qui ont été utilisés à des fins autres que de développer de meilleurs produits à meilleur prix, ont contribué à la débandade de Nortel, ainsi que la concurrence très vive, notamment des chinois.

Alors, à qui le tour?

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