Musset: une vie d’écrits et de tourmente

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Publié 07/12/2010 par Gabriel Racle

«Il faut qu’une porte soit ouverte ou fermée». Ce proverbe, en forme de lapalissade, se trouve dans une comédie de 1691, Le Grondeur, de David Augustin de Brueys, un ecclésiastique, et Jean de Palaprat, avocat et sieur de Bigot. Alfred de Musset, qui en a fait le titre d’une de ses pièces de théâtre, en a assuré la célébrité.

Alfred de Musset

Et précisément, cette année 2010 marque le 200e anniversaire de naissance de cet auteur et poète français dont l’œuvre dramatique est regardée comme la réussite la plus originale du théâtre romantique de son époque.

C’est assez dire la place non négligeable qu’il tient dans la littérature française. Alfred de Musset est né le 11 décembre 1810 à Paris, dans une famille assez aisée et cultivée, très portée sur les lettres et les arts. Son père est en effet un homme de lettres, haut fonctionnaire au ministère de la Guerre du Premier Empire, auteur de plusieurs ouvrages concernant notamment Jean-Jacques Rousseau, dont il édite les œuvres.

Le jeune Musset fait de bonnes études et obtient même à 17 ans le deuxième prix de dissertation latine, dans ce qui s’appelle alors le Concours général, qui récompense les meilleurs élèves des classes terminales des lycées et collèges. Ayant obtenu son baccalauréat, Musset entreprend des études de droit, de médecine et de peinture qu’il abandonne dès 1828. La littérature l’intéresse bien davantage.

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De brillants débuts en poésie

Musset fréquente ainsi le Cénacle romantique, un terme employé par Sainte-Beuve pour désigner le groupe de poètes et d’artistes qui, autour de Victor Hugo, contribuèrent à l’éclosion de la nouvelle école romantique.

S’y rencontrent Balzac, Vigny, Dumas, le peintre Delacroix, Charles Nodier, Sainte-Beuve, atour de Hugo, déjà célèbre à 27 ans. Voilà donc Musset en bonne compagnie.
Très doué, Musset fait rapidement montre de ses talents. En 1829, il publie un premier recueil de poèmes, Contes d’Espagne et d’Italie, avec ces jolis vers qui ouvrent la Ballade à la lune:

C’était, dans la nuit brune,
Sur le clocher jauni,
La lune
Comme un point sur un i.

Et c’est un succès. Mais rien de tel avec ses essais au théâtre. Un drame fantastique, La Quittance du diable, ne peut être représenté, et la Nuit vénitienne est un échec total.

Son père meurt en 1832 et Musset n’écrit plus que pour la lecture. «Adieu à la ménagerie, et pour longtemps», écrit-il à un ami, en faisant allusion à la scène, un adieu de 17 ans. Mais il publie ses pièces sous un titre sana équivoque: Un spectacle dans un fauteuil.

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La première livraison, en décembre 1832, compte trois poèmes, un drame, La Coupe et les Lèvres, une comédie, À quoi rêvent les jeunes filles? et un conte oriental, Namouna.

Passion et productions

En juin 1833, Musset rencontre George Sand, au cours d’un dîner de collaborateurs de La Revue des Deux-Mondes, dont ils font tous les deux partie. Quelques semaines plus tard, le poète devient son amant. Ensemble, ils partent en décembre suivant pour un voyage romantique en Italie, qui les conduit à Venise. Musset tombe malade.

Le séjour idyllique et passionné, entrecoupé de ruptures violentes, s’achève par une séparation, George Sand ayant pris pour amant le médecin qui a soigné Musset, avant de s’établir avec Chopin (1838).

C’est entre 1833 et 1837, avec en toile de fond sa tumultueuse liaison avec George Sand (1833-1835), que Musset est le plus productif, traduisant les heurts de sa passion enflammée et douloureuse.

Il rédige alors des pièces, Les Caprices de Marianne, Fantasio, On ne badine pas avec l’amour, Lorenzaccio, Le Chandelier, Il ne faut jurer de rien, Un caprice, et les poésies des Nuits (la Nuit de mai, la Nuit de décembre, la Nuit d’août, la Nuit d’octobre), qualifiées de chef-d’œuvre lyrique, et la Confession d’un enfant du siècle.

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Lorenzaccio est un drame historique considéré comme un chef-d’œuvre du théâtre romantique. Mais la pièce n’a pas été jouée du vivant de Musset. Ses cinq actes n’ont jamais été présentés intégralement; leurs trente-six scènes exigeraient trois soirées, une soixantaine de décors, plus de quatre cents interprètes. Une version en trois actes sera enfin jouée en 1896.

Dernières années

Musset poursuit une vie sentimentale marquée par de nombreuses liaisons, de durée très variable. Dépressif et alcoolique, il écrit moins, des poèmes, Tristesse, Une soirée perdue (1840), Souvenir (1845), des nouvelles comme l’Histoire d’un merle blanc (1842) et d’autres pièces, Il faut qu’une porte soit ouverte ou fermée (1845), On ne saurait penser à tort (1849), un conte, La Mouche (1853).

Il reçoit la Légion d’honneur, il est élu à l’Académie. Il meurt à Paris le 2 mai 1857, quelque peu oublié.

Aime, et tu renaîtras;
fais-toi fleur pour éclore.
Après avoir souffert,
il faut souffrir encore;
Il faut aimer sans cesse,
après avoir aimé.
– La nuit d’août
(derniers vers)

Auteur

  • Gabriel Racle

    Trente années de collaboration avec L'Express. Spécialisé en communication, psychocommunication, suggestologie, suggestopédie, rythmes biologiques, littérature française et domaine artistique. Auteur de très nombreux articles et d'une vingtaine de livres dont le dernier, «Des héros et leurs épopées», date de décembre 2015.

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