Miller, Pitfield, LeDrew: trois visions de Toronto

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Publié 07/11/2006 par Magdaline Boutros

Dans cette campagne à la mairie de Toronto qui s’annonçait depuis plusieurs mois comme un duel à finir entre le maire sortant David Miller et la conseillère municipale Jane Pitfield, l’arrivée de Stephen LeDrew le 25 septembre dans la course a ramené l’espoir d’une lutte plus coriace et pimentée. Mais force est de constater que la campagne de 2006 est bien morne par rapport à la chaude lutte que se sont livrée les cinq candidats vedettes en 2003.

David Miller semble creuser l’avance qu’il détenait en début de campagne sur Jane Pitfield, qui tarde encore à convaincre les Torontois de la crédibilité de sa candidature et de son programme. Alors que 58% des Torontois réclament un changement à la tête de la mairie, la conseillère de Leaside ne récolte que 6% des intentions de vote, selon le dernier sondage du Toronto Star. Malgré un bilan bien mince après trois années à la mairie, David Miller se maintient encore en tête des intentions de vote, faute d’un adversaire charismatique.

La campagne de Stephen LeDrew tarde également à décoller. Sans expérience en politique municipale et peu connu du public malgré son passage à la présidence du Parti libéral du Canada, la personnalité colorée de Stephen LeDrew réussit difficilement à faire sa place dans cette course. Mais c’est peut-être lui, à la veille des élections, qui réussira à influencer les électeurs en donnant son appui à David Miller ou à Jane Pitfield.

L’Express a rencontré les trois principaux candidats à la mairie. Les élections municipales auront lieu le 13 novembre.

David Miller: «Si nous voulons que Toronto se développe à son plein potentiel, nous avons besoin d’investissements provinciaux et fédéraux.»

L’Express : Vous êtes en tête dans les sondages, mais en même temps, 60% des Torontois demandent du changement à la tête de la mairie. Comment interprétez-vous ces résultats divergents?

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David Miller : Les Torontois me disent dans toute la ville qu’ils sont heureux de l’orientation qu’a pris l’hôtel de ville dans les dernières années et ils veulent voir la continuation de ce type de politique et de valeurs. Je n’ai pas entendu ces demandes de changement.

L’Express : On se rappelle tous du balai que vous avez brandi au-dessus de votre tête en 2003. Avez-vous vraiment fait le ménage à l’hôtel de ville en accroissant la transparence dans l’administration?

D.M. : Les gens ont oublié comment les choses se passaient à l’hôtel de ville avant que je devienne maire. C’est le jour et la nuit. Nous avons des nouvelles mesures d’imputabilité, nous avons un commissaire à l’éthique, nous avons rendu imputables les départements de la ville qui étaient trop autonomes dans leur gestion, et nous avons invité les citoyens à participer à l’élaboration de nos politiques par l’entremise de tables rondes sur l’environnement, la jeunesse, les personnes âgées, etc. Lorsque l’on est ouvert à travailler avec la communauté au jour le jour, il y a moins de chances que le type de corruption qui avait cours avant prenne le dessus.

L’Express : Pourtant, les négociations pour l’achat du dépotoir Green Lane et celles, sans appel d’offres, pour l’achat des wagons de métro à Bombardier se sont faites en catimini?

D.M. : Les deux négociations ont été effectuées selon les plus hauts standards professionnels. Le contrat pour le dépotoir a été débattu en public. C’était en réponse à un appel d’offres. C’est vrai que le prix demeure confidentiel, mais c’est pour une raison très importante: jusqu’à ce que le contrat soit final, l’information doit demeurer confidentielle. Ensuite, elle sera rendue publique.

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Pour les wagons de métro, on a également respecté le processus. Ironiquement, les opposants disent qu’on aurait dû faire un appel d’offres qui aurait permis à Bombardier d’avoir le contrat. C’est un subterfuge. Nous croyons aux entreprises canadiennes. C’était transparent de le faire de cette façon. C’est une controverse qui n’a pas lieu d’être. Je ne crois que leur opposition était sincère, c’était seulement de l’opportunisme politique.

L’Express : Après trois ans à la mairie, de quelle réalisation êtes-vous le plus fier?

D.M. : Je suis fier de nombreuses réalisations. Mais ce qui était le plus important pour moi lorsque j’ai été élu était de m’assurer que les gouvernements provincial et fédéral respecteraient la ville de Toronto et travailleraient avec nous en partenariat pour soutenir la ville. Nous avons fait de grands progrès à ce niveau. Nous sommes la seule administration municipale à avoir une entente directe avec le gouvernement sur le financement du transport en commun, du logement et tout dernièrement de l’immigration. Si nous voulons que Toronto se développe à son plein potentiel, nous avons besoin d’investissements provinciaux et fédéraux.

L’Express : Stephen LeDrew affirme qu’il est fort probable qu’il donnera son appui à vous ou à Mme Pitfield au dernier jour de campagne. Êtes-vous en négociation avec son équipe?

D.M. : Non, et pour tout vous dire, je serai très content si je ne recevais pas le support de M. LeDrew. On ne l’a pas approché et je trouve ça assez étrange de dire: «je vais me lancer dans la course à la mairie, mais si je n’obtiens pas les résultats escomptés, je donnerai mon appui à un autre candidat.» Je suis un candidat beaucoup plus sérieux.

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L’Express : Concernant la question de la gestion des déchets à Toronto, pourquoi fermez-vous complètement la porte à l’incinération des déchets?

D.M. : Ce n’est pas vrai que je ferme complètement la porte. Je ne suis pas d’accord avec l’incinération. Premièrement, si on bâtit un incinérateur dans la région de Peel au lieu d’un dépotoir, ce sera une solution deux fois plus coûteuse. Deuxièmement, l’incinération est un substitut au recyclage et c’est en ce sens que ce n’est pas une solution favorable pour l’environnement, puisqu’il faut brûler du carbone et du papier. Enfin tous les incinérateurs produisent des dioxines qui sont dangereuses peu importe la quantité émise.

Mais la ville de Toronto est obligée par une loi provinciale d’examiner cette option. On examine toutes les alternatives, pour voir quelle option est la moins coûteuse et la plus favorable à l’environnement.

L’Express : Pourquoi est-ce que le projet du Waterfront prend tant de temps à se mettre en marche?

D.M. : Nous avons fait beaucoup de progrès en trois ans. Je partage la frustration des Torontois. Trois paliers de gouvernement sont impliqués. Nous devons faire plus de 300 études d’impact écologique. Ce sont des obstacles pratiques. Mon engagement au cours des quatre prochaines années est que les espaces publics soient construits.

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L’Express : Le projet de l’avenue St. Clair est extrêmement contesté. Croyez-vous toujours que le développement du tramway est la voie de l’avenir pour Toronto?

D.M. : Beaucoup de résidents appuient le projet de voie rapide sur St. Clair. Le tram sur cette rue va devenir un métro sur terre. Le service sera régulier et respectera les horaires puisqu’il ne sera pas soumis au trafic. C’est pour ça que le projet sur St. Clair est si important. On pourra élargir le projet à toute la ville et avoir aussi des voies prioritaires pour les autobus. C’est la voie du futur, puisqu’on aura un transport en commun rapide et fiable.

L’Express : Toronto a perdu beaucoup d’emplois dans les dernières années. On attribue cette perte d’emplois en partie à l’augmentation des taxes aux entreprises à Toronto comparativement à la région 905. Pourquoi n’avez-vous pas réussi à freiner cet écart?

D.M. : On a perdu beaucoup d’emplois au cours des 20 dernières années. Le gouvernement provincial taxe davantage les entreprises de Toronto que celles du 905. La province devrait faire le contraire, ce serait mieux pour l’environnement et pour la productivité de concentrer les entreprises dans des centres urbains.

La ville n’est pas bien financée. Avec la croissance économique que nous avons eu à Toronto, les coûts augmentent mais nos revenus restent stables. Nous avons dû augmenter les taxes foncières pour pouvoir équilibrer le budget. C’est pourquoi je demande durant cette campagne électorale que le gouvernement municipal puisse percevoir 1% de la TPS ou de la taxe provinciale. Comme ça, lorsque l’économie croît, nos revenus croîtront du même coup.

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L’Express : On sait que la communauté francophone à Toronto est moins importante que bien d’autres communautés ethniques. En contrepartie, le français est l’une des deux langues officielles du Canada. Que comptez-vous faire, si vous êtes élu à la mairie, pour promouvoir le développement de services en français à la ville de Toronto?

D.M. : On travaille avec le comité français de la ville. Le Canada est un pays composé de deux langues officielles et il est important que la ville de Toronto fasse des pas symboliques et pratiques en ce sens. Il y a deux ans, j’ai donné un discours bilingue à Québec. Je croyais qu’il était important que le maire de Toronto démontre que Toronto n’est pas une ville unilingue. Nous sommes en train de déterminer avec le comité français de la ville de Toronto si il est possible que la ville de Toronto donne des services en français dans quelques domaines. Ce sont des pas modestes, mais il est important que l’on reconnaisse la dualité linguistique canadienne dans la plus grande ville canadienne.

Jane Pitfield : «Je veux m’assurer que la ville continuera à se développer plutôt qu’à sombrer dans le déclin.»

L’Express :Vous avez annoncé depuis plusieurs mois votre intention de vous opposer à David Miller. En quelques mots, que lui reprochez-vous?

Jane Pitfield : Il n’a pas rempli ses promesses en trois ans à la mairie de Toronto. Pour être reconduit à la mairie, il faut qu’il mérite un deuxième mandat, il doit prouver qu’il est capable de livrer des résultats aux Torontois ou sinon il doit être remplacé.

Je m’oppose à lui principalement parce qu’il n’a pas été ouvert et transparent et je veux m’assurer que la ville continuera à se développer plutôt qu’à sombrer dans le déclin. J’ai l’impression que les enjeux de cette campagne sont les mêmes que lors de la campagne de 2003. On ne peut plus continuer à perdre du temps.

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L’Express : Le dernier sondage du Toronto Star vous donne 6% des intentions de vote. Est-ce décevant de voir que le public ne vous accorde pas son support à quelques jours des élections?

J.P. : Non, je n’ai pas interprété ce sondage de cette façon. Je me fie au sondage d’Ipsos-Reid dévoilé le 29 septembre et qui annonçait que je me situais à 46% et David Miller à 51%. Je crois que ce sondage est plus fidèle à la réalité. Pour le sondage du Toronto Star, si on ajoute les répondants qui considèrent sérieusement voter pour moi, j’arrive à 62% et Miller à 68%. Je le talonne encore de près.

L’Express: Vous avez fait référence la semaine dernière à une possible collusion entre David Miller et Stephen LeDrew. Est-ce une théorie que vous tenez toujours?

J.P. : Oui. Ce n’est peut-être pas une collusion entre eux deux. Mais je crois que M. LeDrew a été encouragé à entrer dans la course. Une troisième personne crée une division des votes. Et je crois que c’est parce que M. Miller ne voulait pas uniquement m’affronter, puisqu’il a réalisé lors du premier débat que je serais difficile à battre en duel. Avoir une 3e personne, ça change les dynamiques.

L’Express : Vous avez changé d’idée dans les derniers mois sur des enjeux cruciaux pour la ville de Toronto, notamment les travaux sur St. Clair. Qu’est-ce qui vous a fait changé d’opinion à ce sujet?

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J.P. : Pour les travaux sur St. Clair, j’ai changé d’idée, mais c’était sur une période de deux ans. On a voté en 2004. Quand j’ai vu que les résidents étaient très fâchés et qu’ils ont adressé un recours en Cour, j’ai réalisé qu’une erreur avait été faite. Après ça, chaque fois qu’il y avait un vote sur le projet, j’ai voté contre. Ce qui a été construit n’était pas nécessaire. Et je crois qu’au bout du compte, ce sont uniquement les usagers qui utilisent le tram qui en bénéficieront au détriment des résidents et des commerçants.

Je crois qu’il faut plutôt privilégier le développement du métro. Il faut désengorger les rues. Je vais arrêter le projet de voie prioritaire sur St. Clair à Bathurst. Et si la population décide que c’est mieux d’enlever la portion déjà construite, je crois que ça en vaudrait le coût.

L’Express : Vous proposez de prolonger le métro sur 50 km en 25 ans, soit 2 km par année, et de construire une nouvelle station de métro chaque année. Quand on voit les coûts gigantesques qui sont attribués au prolongement du métro vers York, où allez-vous trouver l’argent pour mener à bien un tel projet?

J.P. : Très facilement. J’ai seulement besoin de 200 000$ par année, selon une estimation des coûts à environ 100 000$ par km. Le gouvernement fédéral pense verser à Toronto une grande somme pour ses infrastructures. On peut donc mieux gérer l’argent que nous avons dans notre propre budget.

On peut aussi avoir de l’argent en provenance du gouvernement fédéral. Et on peut aussi aller chercher le manque à gagner auprès du secteur privé. On leur emprunterait de l’argent pour ensuite les rembourser.

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L’Express : Vous proposez également de geler les taxes municipales, mais en même temps, la ville de Toronto est aux prises avec des difficultés budgétaires. Comment entrevoyez-vous combler le manque à gagner?

J.P. : Les Torontois ont été convaincus par David Miller que nous n’avons pas assez d’argent pour geler les taxes. Mais c’est faux. On a l’argent, il faut juste savoir le dépenser consciencieusement. J’y arriverai en faisant de ce gel de taxes une priorité. Plutôt que d’inscrire une augmentation des taxes dans le budget dès le début du processus, on ne parlera pas d’augmentation de taxes avant la toute fin du processus, si vraiment on ne peut pas trouver l’argent ailleurs.

L’Express : Mais dans quel domaine couperez-vous pour pouvoir réaliser ce gel de taxes?

J.P. : Je n’ai besoin de couper nulle part. En neuf ans, le budget de base n’a pas été remis en question. On ajoute tout simplement 5%, puis 3% année après année. En 3 ans, il a augmenté de 1,3 milliard $. Il faut maintenir les taxes foncières à un niveau acceptable. Puis, quand on sera vraiment ouvert et transparent dans notre gestion, on pourra demander une hausse des transferts au gouvernement provincial.

L’Express : La question de la sécurité est fort importante aux yeux des Torontois. Les vagues de violence armée ont diminué cette année, mais font encore régulièrement la manchette. Vous avez un plan en 15 points pour réduire la violence à Toronto. Quelle est votre priorité dans ce domaine?

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J.P. : Premièrement, il faut sécuriser la ville avant de lancer des programmes de prévention. La police a besoin de notre support. Les causes profondes viennent du fait qu’on a des milliers de personnes qui sortent de prisons chaque année, sans que la ville n’ait aucun plan pour les réintégrer à la société.

Beaucoup de jeunes qui habitent dans les logements sociaux ont besoin d’avoir plus à faire et ils ont besoin d’avoir d’avantages de modèles, grâce notamment à des programmes tels que les grands frères et les grandes soeurs.

L’Express : La gestion des déchets à Toronto pose énormément de problèmes. Vous vous êtes déclarée à mots couverts en faveur de l’incinération des déchets par un procédé permettant d’en produire de l’énergie. Est-ce une solution viable pour l’environnement?

J.P. : Je propose de produire une énergie verte en provenance des -déchets, qui serait créée par la chaleur mais sans produire de dioxines.

L’Express : C’est tout de même une solution contestée pour ses éventuelles conséquences néfastes sur l’environnement et la santé publique?

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J.P. : Pourquoi choisirions-nous une solution qui est dangereuse pour l’environnement? C’est ça, la vraie question.

L’Express : En l’espace de 5 ans, Toronto a perdu 1000 entreprises totalisant environ 23 600 emplois. Que comptez-vous faire pour stimuler la croissance économique à Toronto?

J.P. : On ne peut se permettre de perdre d’autres emplois comme ça. Je vais diminuer les taxes commerciales en 5 ans pour qu’elles deviennent égales à celles de la région 905. C’est comme ça qu’on va réussir à attirer de nouveaux emplois vers Toronto et qu’on va garder nos entreprises ici. On doit aussi régler les problèmes de congestion automobile.

Je veux aussi qu’on ait une mission économique qui parte en Inde et en Chine pour tisser des liens et des partenariats avec ces deux pays. Et pour les jeunes et les nouveaux immigrants, on doit donner des incitatifs financiers aux entreprises pour engager des gens avec moins d’expérience.

L’Express : On sait que la communauté francophone à Toronto est moins importante que bien d’autres communautés ethniques. En contrepartie, le français est l’une des deux langues officielles du Canada. Les services en français à la mairie de Toronto sont quasi-inexistants. Que comptez-vous faire pour promouvoir le développement de services en français à la ville de Toronto?

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J.P. : Pour ceux qui ne parlent pas l’anglais ou encore qui préfèrent recevoir des services en français, je crois que l’on devrait leur donner la possibilité de communiquer en français.

L’Express: Avez-vous un plan pour y parvenir?

J.P. : Je crois que l’on doit utiliser les services de traduction et s’assurer que la documentation qui est sur internet soit disponible en français.

Stephen LeDrew: «Notre ville est en train de se détériorer sous la direction du maire du NPD.»

L’Express : Vous vous êtes lancé dans la course à la mairie de Toronto le 29 septembre, environ 5 mois après que David Miller et Jane Pitfield aient annoncé leurs intentions à concourir pour le poste. Pourquoi avoir attendu si longtemps?

Stephen LeDrew : J’ai déjà une vie bien remplie et je ne pensais pas devenir maire. Mais j’aime énormément notre ville et elle est en train de se détériorer sous la direction du maire du NPD. On était plusieurs à chercher un candidat pour s’opposer au maire du NPD. Et finalement je me suis dit, d’accord, c’est moi qui le ferai.

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On mène en ce moment une campagne de six semaines, qui est amplement suffisante pour convaincre les Torontois. Je vais faire une annonce importante par jour jusqu’au jour du vote. Et c’est avec succès qu’on franchira le fil d’arrivée.

L’Express : Le dernier sondage effectué auprès des électeurs a conclu qu’aucun répondant ne prévoyait vous donner leur appui. Regrettez-vous de vous être lancé dans la course et d’y consacrer tant d’énergie?

S.L. : Pas du tout. Le seul aspect de ce sondage avec lequel je m’accorde est que 58% des répondants ont affirmé qu’on avait besoin d’un nouveau maire. Et la plupart des gens ne prennent leur décision que dans les derniers jours.

L’Express : Vous avez affirmé, dès le début de votre campagne, que vous vous rallierez à Jane Pitfield en fin de campagne si elle avait besoin de vos appuis pour battre David Miller. Est-ce toujours la voie que vous privilégiez?

S.L. : J’ai dit ça parce que je ne veux pas diviser le vote. Si au dernier jour de campagne il semble qu’un candidat pourrait vaincre l’autre grâce à mon appui, alors je devrai prendre une décision à ce moment-là. Je vous assure que je ne diviserai pas le vote.

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L’Express : Vous me dites donc que vous choisirez un camp ou l’autre à la toute fin de la campagne?

S.L. : Non, il y a aussi une autre alternative où je serai le premier. Tout dépendra des chiffres. Il a plusieurs scénarios que j’étudie, mais je me mettrai à penser sérieusement à cela qu’au dernier jour de campagne.

L’Express : Les médias ont beaucoup parlé dans les dernières semaines de vos déboires financiers personnels (faillite personnelle, impôts impayés). Comment un électeur peut-il maintenant faire confiance en vos talents de gestionnaire?

S.L. : Ce n’étaient pas des difficultés personnelles, mais des difficultés politiques à Ottawa. Par coïncidence c’est arrivé juste après que j’aie eu une très sérieuse divergence d’opinion avec le premier ministre Chrétien. Je lui ai dit qu’il devait partir et il ne voulait rien entendre.

C’est peut-être juste une coïncidence, mais je vous dis que je suis la seule personne dans tout le Canada à avoir payer tous ses impôts pour ensuite être appelée par Revenu Canada et mise en banqueroute. Il n’est donc pas question de difficultés financières ou d’erreurs de parcours, c’était une question politique.

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L’Express : Vous me dites donc que cet épisode, peu importe sa cause, n’indique rien quant à vos compétences de gestionnaire?

S.L. : Oui, cet incident a un impact, mais positif. Ça démontre que je suis prêt à défendre toute personne pour les bonnes raisons. Les membres du Parti libéral m’ont donné la tâche de parler au premier ministre Chrétien de son retrait et je l’ai fait malgré la difficulté de la tâche. Je ferai la même chose que j’ai faite pour les membres du Parti libéral au service des Torontois.

L’Express :Votre programme électoral semble encore assez flou. Pouvez-vous indiquer vos trois principales priorités?

S.L. : Je donne environ trois discours par jour pour faire connaître mon programme. Je veux avoir un gouvernement efficace où l’on se fixe des objectifs et on les atteint. Ce maire est un idéologue du NPD, il parle, il parle, mais il ne fait rien pour les Torontois.

On a besoin de rues propres et sécuritaires, d’avoir un meilleur système de transport public, d’avoir une communauté plus impliquée pour lutter contre la criminalité, d’avoir un gel des taxes pour la première année et d’éliminer les contrats secrets à l’hôtel de ville, comme celui du dépotoir et du métro avec Bombardier. Je vais donner des résultats aux citoyens plutôt que de me limiter à la parole comme le fait David Miller.

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L’Express : L’un de vos principaux chevaux de bataille est la transparence et l’intégrité à l’hôtel de ville. Qu’allez-vous faire concrètement pour changer les choses?

S.L. : Premièrement, il n’y aura plus de contrats secrets octroyés par l’hôtel de ville. Deuxièmement, mon directeur de campagne n’aura pas de contrats de l’hôtel de ville – comme c’est le cas avec M. Miller. La mairie devrait avoir honte de la manière dont elle agit en ce moment, et ça, c’est à cause du maire actuel. Son fameux balai n’a jamais été utilisé.

L’Express : Vous critiquez abondamment David Miller pour sa gestion du projet de revitalisation du Waterfront. Que feriez-vous de différent dans la gestion du secteur riverain, si vous étiez à la mairie de Toronto?

S.L. : Le problème avec le secteur riverain est que rien n’a été fait. Et rien n’a été fait parce qu’il y a trois niveaux de gouvernement et trois agences impliqués. Personne ne prend le leadership et dit: «voilà ce qu’on va faire et voici les délais à l’intérieur desquels on doit le réaliser».

Il y a 7 ans, MM. Chrétien, Lastman et Harris ont alloué 1,5 milliard $ pour le projet et les travaux n’ont toujours pas commencé. Il y a un manque de leadership et c’est à la mairie de prendre ce leadership.

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L’Express : Le transport en commun est un sujet souvent abordé durant cette campagne. Miller veut développer les autobus et les trams, Pitfield veut plutôt se concentrer sur le métro. Où est-ce que vous vous situez dans ce débat?

S.L. : C’est très complexe. Je ne crois pas le maire quand il affirme ça. Il a investi 100 millions $ pour faire une voie prioritaire de tram sur St. Clair alors que tout allait bien sur cette rue. La communauté n’en veut pas et ça divise la communauté. Il reste 6 ans de travaux. Cet argent aurait dû être utilisé pour desservir les régions des banlieues par autobus. Et il devrait y avoir des travaux permanents pour prolonger le métro.

L’Express : Vous et Mme Pitfield vous êtes déclarés en faveur de l’incinération des déchets par un procédé permettant d’en produire de l’énergie, contrairement à David Miller qui y est opposé. Est-ce la solution du futur et une avenue souhaitable pour l’environnement?

S.L. : C’est une des solutions du futur. Le maire change de ton maintenant. Il ne voulait même pas parler de l’incinération au début de la campagne à cause des émissions de dioxine. Mais ce n’est pas le cas du tout avec les nouvelles technologies.

Mais premièrement, nous devons recycler davantage dans tous les édifices à logements multiples. Ça augmenterait notre niveau de recyclage à 80%. L’enfouissement, ce n’est pas juste une solution coûteuse, c’est aussi dommageable pour l’environnement. L’incinération est l’une des solutions que l’on devrait considérer.

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L’Express : La question de la sécurité est fort importante aux yeux des Torontois. Faut-il renforcer les peines criminelles ou la solution réside-t-elle ailleurs pour vous?

S.L. : Il faut une solution à facettes multiples. Je supporte totalement la position de Stephen Harper qui a modifié le code criminel il y a quelques semaines pour renverser le fardeau de la preuve. C’est un pas positif pour la ville de Toronto.

Nous avons aussi besoin d’avoir davantage d’activités économiques. Si les jeunes ne peuvent avoir des emplois, ils se tournent vers les gangs et la criminalité. Nous perdons beaucoup d’emplois à Toronto vers les banlieues. Nous devons impliquer des leaders communautaires mais aussi des leaders entrepreneuriaux et il nous faut plus de police de quartier.

L’Express : Vous parlez du nombre important d’emplois que Toronto a perdu au profit de ses banlieues. Quelle solution proposez-vous pour renverser la tendance?

S.L. : Le problème réside dans la taxe aux entreprises qui est imposée par la province. À Toronto, nous payons le plus de taxes municipales en Ontario. Le maire dit qu’il a essayé de négocier avec la province mais que le gouvernement ne la réduira pas. La province doit les réduire pour que Toronto retrouve sa compétitivité. Il n’y pas de raisons qui justifient que les taxes aux entreprises soient plus élevées à Toronto qu’à Mississauga ou Pickering par exemple.

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L’Express : On sait que la communauté francophone à Toronto est moins importante que bien d’autres communautés ethniques. En contrepartie, le français est l’une des deux langues officielles du Canada. Que comptez-vous faire, si vous êtes élu à la mairie, pour promouvoir le développement de services en français à la ville de Toronto?

S.L. : Nous devrons dans l’avenir avoir plus de discussions sur le français à Toronto. Le bilinguisme est un aspect important qu’il faut développer dans la population. Il nous faudrait plus de jours de promotion de la culture française pour sensibiliser les Torontois.

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