Lutte contre la violence faite aux femmes: un pas en avant, combien en arrière?

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Publié 17/12/2013 par Odette Doumbé

14 femmes sont tombées le 6 décembre 1989. Que seraient-elles aujourd’hui? Mamans attendant avec fierté la graduation de leurs enfants sortant de l’université? Grand-mamans apprenant à leurs enfants à tracer leurs premiers pas sur le sol canadien? Professionnelles, fer de lance du pays portant haut le drapeau canadien? Que de rêves brisés par un acte de haine! Que de familles anéanties! Que de cœurs meurtris!

Pendant 24 ans, les feux des projecteurs se sont braqués sur un homme qui s’est comporté en bête. Le 6 décembre dernier, nous avons évité de souiller nos lèvres, et pris la décision de ne pas prononcer son nom. Un nom qui porte la marque de l’infamie.

Le 6 décembre dernier, nous nous sommes fait le pari d’avoir plutôt une pensée pour ceux et celles qui restent, les familles, les amis qui ont été blessés dans leur chair suite au massacre. Qui essayent avec courage de se remettre de ce jour traumatique. Ces amis et ces familles dont on ne parle que très peu, pour ainsi dire jamais.

Cette commémoration nous permet de nous recueillir, rendre hommage à la mémoire des 14 femmes qui sont tombées sous la main d’un forcené misogyne. Pour rien. Juste parce qu’elles étaient des femmes.

Saisissons cette occasion pour nous recueillir et sensibiliser hommes et femmes afin que plus jamais nous ne vivions de telles atrocités. Nous recueillir et continuer la lutte contre les violences faites aux femmes.

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Nous recueillir et mesurer le chemin parcouru, et celui qui reste à parcourir pour que les femmes soient davantage en sécurité. Que les actes de violences soient plus sévèrement punis, des voies de fait au meurtre, en passant par l’agression sexuelle.

Journées d’activisme après journées d’activisme, où en sommes-nous aujourd’hui?

De légères avancées commencent à voir le jour avec une proposition de loi sur la cyber intimidation. Des programmes d’assistance aux victimes d’actes criminels ont été instaurés.

Mais c’est aussi récemment que nous avons vu abolir les registres d’armes à feu. Une base de données créée pour répondre aux pressions publiques suite à la tuerie de Polytechnique et qui visait pourtant à réduire la violence armée faite aux femmes.

Où en sommes-nous? Les enquêtes de plus de 500 femmes autochtones disparues depuis les années 70 piétinent. Que sont-elles devenues? Les étapes de leurs destinations inconnues ne peuvent que susciter moult supputations: vols, viols, trafic humain, pour aboutir avec une quasi-certitude, à leur meurtre.

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De par le monde nous parviennent des nouvelles non moins alarmantes: femmes victimes de mutilations génitales, de viols d’épuration ethnique, lapidation et autres exactions se poursuivent. À travers le monde ce sont 30% des femmes qui sont touchées par cette pandémie.

Plus proche de nous, en Ontario, l’Association ontarienne des maisons de transition (OAITH) vient de publier la liste non exhaustive de 26 fémicides perpétrés dans la province, rien que pour l’année 2013.

Il s’agit là de la violence physique, celle que l’on voit. Car les autres formes de violences subies par les femmes, celles qui sont d’ordre psychologique, économique, verbale, demeurent silencieuses année après année, peu examinées ou considérées, peu dénoncées parce qu’invisibles.

Pourtant, les conséquences de la violence quelque forme qu’elle revête, affectent en plus des femmes, les familles, les communautés, et il y va donc de la santé de la société tout entière.

Les coûts économiques associés à la violence envers les femmes au Canada pour les soins médicaux, la justice pénale, les services sociaux ainsi que les pertes en salaires et en productivité ont été évalués à 4,8 milliards $ par année. (www.cfc-swc.gc.ca/rc-cr/pub/violence-canada-fra.pdf) un montant exorbitant.

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Déjà, en 1985, le United States Committee For Economic Development concluait que chaque dollar dépensé pour la prévention faisait économiser 4,75 $ en matière de mesures de redressement, d’éducation, d’aide sociale et de lutte contre le crime.

Les chiffres de la violence ne sont pas que des nombres. Derrière chaque statistique il y a une vie. Celle d’une mère, d’une épouse, d’une sœur, d’une fille ou d’une nièce. L’engagement de chacun dans la lutte contre la violence faite aux femmes devient dès lors une nécessité incontournable afin que demain, la statistique ne nous dévoile le nom d’une de nos proches.

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