L’université revisitée (troisième partie)

Une question de motivation

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Publié 25/05/2010 par Nathalie Prézeau

Jeff Rybak, qui termine présentement son droit à l’Université de Toronto, est l’auteur d’un livre écrit pour les universitaires, mais dont tous les étudiants de la 10e à la 12e devraient discuter dans leurs séances d’orientation au secondaire. Malgré son titre plutôt négatif, What’s Wrong With University (and how to make it work for you anyway) offre en fait un angle très rafraîchissant sur le sujet de la motivation des jeunes.

C’est le genre d’ouvrage que les parents gagneraient à lire afin de se convaincre d’ouvrir leurs horizons pour aider leurs ados à se poser les bonnes questions. Celles qui leur permettront de trouver la motivation pour franchir toutes les étapes de leur apprentissage et se tailler une place dans un domaine qui les intéressera sur le marché du travail.

Toute préoccupée que j’étais de trouver des façons de motiver mon jeune à considérer l’université et à travailler plus pour accroître sa moyenne scolaire, voilà que je tombe sur le livre de Jeff Rybak qui m’apprend que le problème de la motivation perdure à l’université.

Un gars sur le terrain

Jeff Rybak est entré à l’université à l’âge de 27 ans. Entre le secondaire et l’université, il a voyagé, touché à divers emplois au salaire minimum, et eu le temps de cogiter sur ce qu’il voulait faire. Il s’est inscrit en littérature anglaise au campus Scarborough de l’Université de Toronto (parce qu’il avait déterminé qu’il voulait écrire et aussi parce qu’il était curieux de connaître l’expérience universitaire). Il a obtenu son bac en 2006 et termine présentement son droit à l’Université de Toronto.

Très impliqué dans le conseil étudiant, Rybak aidait entre autres les étudiants ayant des difficultés académiques. Les problèmes cités par ces étudiants revenaient si souvent qu’il s’est mis à diffuser ses conseils dans les publications sur le campus. De fil en aiguille, un livre est né, se donnant pour mission de convaincre les étudiants de prendre leur vie en main pour trouver la réponse à la question vitale de ce qu’ils veulent vraiment faire de leur vie.

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«Now what?»

Rybak s’est dit profondément étonné de voir tous ces jeunes se retrouvant à la fin de leur bac, étourdis sur le perron, à se dire que «c’est bien beau tout ça mais qu’est-ce que je veux faire maintenant?». Pour lui, il s’agit forcément de jeunes qui ont foncé bille en tête vers l’université, poussés par la famille, les amis ou la société, en ne focussant que sur les notes, sans prendre le temps de réfléchir.

Je connais personnellement deux ingénieurs, un architecte et un médecin de formation qui, par choix, n’ont jamais pratiqué leur profession. Ils ont passé leur diplôme pour faire plaisir à leurs parents puis, une fois cette formalité accomplie, sont passés aux choses sérieuses.

Même dans le dernier guide de Maclean’s sur les universités canadiennes (une publication qui incarne pourtant la place privilégiée qu’on accorde à l’université dans notre société) on trouve un article intitulé Why am I here?

Jamais trop tard

Le propos de Jeff Rybak est de relever qu’il n’est jamais trop tard pour se poser les bonnes questions. Il rassure d’abord les étudiants universitaires en leur démontrant qu’ils ne sont pas seuls dans leur cas (à ne pas savoir exactement ce qu’ils veulent faire). Il leur explique que différents étudiants ont différentes attentes de leur expérience universitaire. Puis, il se lance dans une série de suggestions d’actions à entreprendre sur le campus pour aider les étudiants selon leurs attentes.

La raison pour laquelle je voudrais que mon fils de 11e année et ses copains discutent du livre de cet auteur en classe et assistent même à une présentation de Jeff Rybak dans leur école (il semblerait que ses frais d’orateur sont très abordables) est qu’il a une façon bien à lui de leur démontrer leur part de responsabilité dans leur formation. Le genre de propos qui serait mal reçu, provenant d’un parent.

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Son message? Attendre que le système scolaire te trouve une carrière te mènera dans un cul-de-sac. Attendre qu’un diplôme génère la passion en toi ne peut que mener vers la déception. C’est à toi de remarquer ce que tu aimes, de faire des recherches, pas juste auprès des programmes universitaires, puis de convaincre tes parents de te laisser explorer l’avenue de ton choix. (Fais-leur lire mon livre! leur dit-il.)

Définir ses passions

Il relève l’importance de chaque nouvelle expérience pour avoir une vision de plus en plus précise de ce qui les intéresse. Celle de parler à ceux qui font ce qu’on pourrait peut-être aimer, histoire d’avoir une idée plus claire de ce que ça implique. Toute une démarche qu’on peut initier dès le secondaire.

Rybak m’a également fait comprendre comment un jeune pas trop sûr, une fois sur le campus, peut utiliser l’expérience universitaire pour mieux définir ses passions. On y trouve une foule d’occasions de s’impliquer afin de connaitre des gens qui ont les mêmes intérêts que nous (reliés ou non au domaine dans lequel on étudie). Il soutient que les universités facilitent les initiatives de toutes sortes. S’il n’existe pas déjà une association ou un groupe répondant à tes intérêts sur le campus, tu peux en créer un! Il est certain que tu n’es pas seul à avoir ces intérêts.

Il insiste également sur l’importance d’utiliser les services des conseillers pédagogiques dès le début de l’université afin de se créer un programme taillé sur mesure qui rendra nos études encore plus intéressantes. Les programmes universitaires seraient beaucoup plus fluides entre eux qu’on ne le pense.

Besoin de concret

Rybak nous permet de voir l’université de l’intérieur, sur le terrain, et c’est ce dont ont besoin nos jeunes. Les commentaires de l’auteur sont beaucoup plus concrets que la simple lecture des programmes offerts sur les sites des universités.

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Dans mon cercle d’amies, nous avons constaté dans les deux derniers mois, alors que nous étions un peu à court d’idées pour motiver nos ados à se pencher sur leur avenir, que certaines actions ont eu un effet très positif sur eux.

Dans un cas, ayant remarqué que le cours préféré de son fils était les maths (grâce à un prof exceptionnel) une de mes amies a pensé l’emmener visiter l’Université Waterloo. Elle a réservé en ligne à partir de leur site web une visite guidée du département de mathématiques menée par un étudiant finissant. Fiston a adoré l’ambiance, il est revenu avec une volonté décuplée de se distinguer en maths, s’est inscrit à une foule de concours de maths et «compte les dodos» avant l’université. (Il ne reste plus qu’à être accepté…)

Une autre copine travaillant dans une compagnie pharmaceutique a profité du contexte du programme «Invitons nos jeunes au travail» créé pour les étudiants de 9e année pour organiser une séance dans le labo avec les chimistes. Fiston s’est découvert une passion pour la chimie. Cette année, le même fiston s’est mis à feuilleter le guide des universités de Maclean qui trainait «par hasard» chez lui. Bingo. Il est maintenant tout stimulé à poursuivre ses études.

Programme «cool»

Pour ma part, une visite au campus de l’Université de Toronto pour assister au spectacle de maîtrise du prof de guitare de mon fils lui a arraché la constatation que ce serait en fait «cool» d’étudier à cette université.

Je suis maintenant persuadée que toute visite dans quelqu’établissement d’études post-secondaires que ce soit a de bonnes chances d’avoir cet effet sur nos jeunes. Il faut qu’ils voient par eux-mêmes sur place pour comprendre que l’expérience promet d’être différente et plus intéressante que celle qu’ils ont vécu au secondaire (s’ils font parties de ceux qui n’ont pas été captivés par cette période de leur vie).

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Il faut se rappeler que les collèges et autres écoles non universitaires ont moins bonne couverture de presse que les universités. Pourtant, rien qu’en Ontario, selon l’Association des collèges communautaires du Canada (ACCC), il y a non moins de 27 collèges (versus 21 universités). Au Québec, on compte 44 collèges et 11 universités. Autant d’options à explorer!

La main à la pâte

Il ne faut pas oublier l’option de prendre du temps après le secondaire (ou même durant les études collégiales ou universitaires) pour explorer le marché du travail. Selon une étude sur l’impact de la double cohorte de 2003 en Ontario, plus de la moitié des inscriptions dans les collèges provenaient d’étudiants qui ont quitté le secondaire depuis un an ou plus. De 12 à 14% des étudiants de 1re année à l’université avaient quitté le secondaire depuis un an ou plus.

Le Globe and Mail publiait récemment un article qui illustrait cette situation. On y parlait de Sean Aiken, un jeune homme qui malgré d’excellentes notes à l’université (qui devrait démontrer un intérêt supérieur dans le sujet de ses études) se trouvait dans ce cas, qui a décidé à la fin de son bac en administration des affaires de se lancer dans l’aventure d’essayer 52 emplois en 52 semaines afin de se trouver une passion.

Ça a donné le blogue oneweekjob.com, un livre, de la visibilité, etc. Je parie qu’on attend le film sous peu! (En fait, je viens de vérifier et ils annoncent effectivement la sortie prochaine d’un documentaire et la possibilité d’en organiser le visionnement. Pourquoi pas dans les écoles secondaires?)

Il y a de plus en plus d’outils de ce genre à la disposition des jeunes. Le fameux conseil «Trouve ta passion», qui semblait plus souvent qu’autrement relever de la langue de bois, prend soudainement un tournant pratico-pratique rafraîchissant. Enfin!

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Pour en savoir plus sur le guide de Nathalie Prézeau, Toronto Fun Places, 4th édition, cliquez ici.

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