L’Orient fantasmé

Nadia Seboussi à la galerie Whippersnapper

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Publié 08/09/2015 par Laura Mendez

Nadia Seboussi, artiste montréalaise d’origine algérienne invitée à Toronto par Le Labo, présente sa juxtaposition d’images stéréotypées d’un Orient fantasmé par l’Occident à la galerie Whippersnapper (Dundas ouest, angle Augusta) jusqu’au 26 septembre.

Penchée sur ce projet depuis 2012, elle découpe son oeuvre en couleur ou noir et blanc, avec ou sans voix, montrant des humains et des animaux, en une installation vidéo qui offre un spectacle généreux et tout à fait spécial.

«J’ai toujours été saisie par l’image que peut donner la télévision des femmes d’Orient, toujours très séductrices, voire érotiques», explique-t-elle en entrevue à L’Express lors du vernissage jeudi soir dernier.
«Les femmes en Égypte à l’époque n’étaient pas toutes danseuses du ventre!»

Nadia Seboussi offre un retour au cinéma égyptien de l’âge d’or et un essai sur la place qu’occupait la femme dans le cinéma.

Rêveuse et enthousiaste, elle se rappelle d’une époque où tout a commencé: «Après la guerre d’Algérie, le seuls films au cinéma que l’on pouvait voir étaient des productions égyptiennes. Les femmes étaient toujours très belles, elles faisaient rêver. J’adorais ça, moi!»

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«Mais après, on s’interroge aussi sur la véritable identité des femmes face à la représentation que l’Occident leur attribue», explique-t-elle, le regard perçant. Nadia insiste: son oeuvre n’envoie pas de message. Elle refuse d’imposer sa vision au spectateur, alors elle offre simplement plusieurs possibilités d’interprétation, à travers une séléction d’images diverses.

«Je déteste que l’on m’impose quoi que ce soit, alors je n’ai aucune envie de m’imposer aux autres. Je ne fais que suggérer une idée par des images, et le spectateur est tout simplement libre de percevoir et ressentir les choses comme il le souhaite», explique-t-elle.

Lauréate de plusieurs bourses et prix d’excellence, l’ancienne journaliste semble exceller dans sa nouvelle voie.

Bien qu’artiste avérée, il lui reste encore un peu de son âme de journaliste: «Je suis plus à l’aise avec les questions qu’avec les réponses», lance-t-elle, hilare, face aux intervenants après la diffusion de son oeuvre.

C’est d’ailleurs à travers une enquête de longue haleine que l’artiste a pu achever son travail. «J’ai interrogé des femmes à Montréal originaires d’Algérie et de Syrie pour connaître l’image qu’elles se faisaient de ces actrices à l’époque. J’ai passé trois années à m’investir, faire des recherches, me fournir des archives, des pièces de monnaie d’époque… Tout cela afin de créer une oeuvre exhaustive dans sa continuité», raconte-t-elle avec ses mains.

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Il y a des objets, des images filmées, des morceaux de films, pour toujours suggérer cette liberté d’interprétation, explique Nadia. «Le spectateur peut donc s’arrêter sur une image ou bien en regarder une autre puis s’interroger sur une autre encore… c’est ce que je cherche», ajoute-t-elle.

Malgré tout, l’artiste semble quelque peu désappointée quant à la situation dans laquelle est présentée son oeuvre: «C’est vrai que c’est frustrant pour un artiste de pas pouvoir donner à voir l’intégralité de son oeuvre achevée et dans les meilleures des conditions après y avoir travaillé avec passion», avoue-t-elle.

Difficile, en effet, d’exposer l’oeuvre filmique de Nadia dans cette galerie étroite et fermée et où la luminosité empêche un bon visionnement des images projetées. «J’aurais voulu plus de profondeur dans la salle pour préserver une distance et un recul face à mon oeuvre. Le public ne peut pas être aussi libre quand il y a si peu d’espace.»

Quoi qu’il en soit, Nadia Seboussi ne s’arrêtera pas là. Elle se prépare déjà à exposer une autre de ses oeuvres en novembre, cette fois sur ces femmes qui ont porté les armes.

Dans cette nouvelle installation vidéo, elle s’intéresse au courage et au refus de soumission face au système des femmes d’Orient.

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