L’incorporation citoyenne des membres des minorités ethniques francophones

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Publié 27/03/2007 par Mohammed Brihmi

Voici le dernier article d’une série de trois sur l’intégration des minorités ethniques dans la communauté franco-ontarienne.

Comme le phénomène d’immigration des francophones des minorités ethniques est relativement récent en Ontario et qu’il n’existe aucune politique ou stratégie d’immigration bien définie pour favoriser leur intégration et leur épanouissement, il n’est pas surprenant que plusieurs problèmes existent.

D’ailleurs, «il est difficile de parler de l’intégration des francophones ethnoculturels au sein de la minorité francophone dans son ensemble quand les deux communautés sont chacune à sa manière en processus de redéfinition» (Jedwab, 2001) ou quand on reconnaît ouvertement que «les institutions franco-ontariennes n’ont toujours pas accueilli les immigrants francophones à bras ouverts» (Choquette, 2000).

Malgré les avantages et les caractéristiques spécifiques aux minorités ethniques en termes d’aptitudes et des compétences professionnelles, de scolarité, d’âge et de dynamisme, ses membres vivent souvent des situations d’établissement difficile. Il est aussi légitime de se demander si on peut parler de l’intégration d’une minorité ethnique au sein d’une minorité linguistique qui s’est battue pendants des décennies et qui continue à se battre pour préserver ses droits et maintenir ses acquis?

Les membres des minorités ethniques francophones ne sont pas dans une position de pouvoir dans le contexte de la francophonie ontarienne. En effet, ils ne possèdent pas d’entreprises pour recruter et ils ne dirigent pas d’institutions ou d’organismes pour favoriser l’embauche des membres de leur communauté. Dans une grande partie, ils se tournent souvent vers les organismes communautaires pour essayer de subvenir à leurs besoins. Malgré tout, quelques membres des minorités ethniques ont réussi, ici et là, à occuper quelques postes importants dans les institutions et les organismes franco-ontariens.

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Il existe aussi ceux et celles qui, après une certaine période de temps, préfèrent s’associer avec la communauté anglophone.

«Il y a des problèmes pour faire face aux difficultés de percer, de faire partie de la francophonie, à cause de la fragmentation de la communauté et à cause de l’idéologie légitimante des institutions qui les excluent, résultat de la mise sur pied des institutions devenues la chasse gardée des francophones d’origine canadienne-française» (Chambonet coll., 2001).

Il va sans dire que les membres des minorités ethniques doivent être considérés et doivent se sentir comme des citoyens à part entière. Il ne faut pas qu’on essaie de les intégrer, de les accepter ou de les inclure dans le paysage de notre francophonie. Ceci donne l’impression que cette intégration ou «acceptation» est un geste de charité ou une faveur envers une communauté démunie qui a besoin d’être secourue.

À notre avis, c’est l’incorporation citoyenne sans aucune réserve qui fait que les membres des minorités ethniques feront partie intégrante de la minorité linguistique franco-ontarienne. Cette intégration permettra une meilleure identification aux attentes et aux aspirations de la communauté franco-ontarienne. Si les membres des minorités ethniques ne se sentent pas comme étant une partie intégrante de la francophonie ontarienne, ils ne seront pas en mesure de contribuer pleinement à son épanouissement et à sa vitalité.

Comme les membres des minorités ethniques constituent un élément essentiel de la francophonie ontarienne, ils doivent être acceptés tels qu’ils sont pour vraiment refléter la nouvelle réalité et la diversité de la francophonie ontarienne.

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Nous avons préféré utiliser le concept «d’incorporation citoyenne» pour cette réflexion car nous constatons les lacunes fondamentales d’autres concepts couramment évoqués, plus particulièrement celui «d’intégration». En effet, ce dernier présuppose une relation de pouvoir où il y a un dominant et un dominé. L’intégration sous-entend aussi une assimilation et un certain effacement de la culture des minorités ethniques, ce qui n’apparaît pas souhaitable.

Les défis auxquels sont confrontés les membres des minorités ethniques en milieu minoritaire sont énormes, toutefois il est à reconnaître que les membres de la minorité linguistique franco-ontarienne réussissent à relever certains de leurs défis souvent avec succès.

Faut-il signaler, que la francophonie dans l’état actuel souffre de l’absence de leaders et de visionnaires qui peuvent transcender, planifier et regarder plus loin, au-delà de leur propre paroisse, de leur petite communauté locale, de leurs organismes et institutions, pour placer en premier lieu les intérêts collectifs et le bien de la francophonie ontarienne dans toute sa diversité.

À l’heure où la langue anglaise tend à devenir une langue universellement imposée, ne devrions-nous pas, francophones d’ici et d’ailleurs, œuvrer davantage pour établir des liens, des partenariats et des relations qui nous avantagent les uns comme les autres?

Il est clair qu’une certaine quantité de membres des minorités ethniques ont estimé que leur avenir et celui de leurs enfants dans la francophonie ontarienne passait par une participation accrue à la vie dans les organismes et les institutions francophones. Ils espéraient et espèrent toujours prendre la place qui leur revenait. En réalité, il nous arrive encore de constater, hélas et combien de fois, que les défis sont majeurs et systémiques.

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