Les territoires inconnus de l’implant cérébral

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Ouvrir le crâne et implanter dans le cerveau une puce électronique permettant de communiquer à distance n'est plus de la science-fiction. Photos: captures d'écran d'une vidéo de Wired
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Publié 09/02/2024 par Agence Science-Presse

La récente et enthousiaste annonce de l’implantation d’une puce électronique dans le crâne d’un humain a fait oublier qu’au moins une douzaine de singes, soumis par la même compagnie à cette même expérience, sont morts ces dernières années après avoir reçu ce même implant.

Le milliardaire Elon Musk, dont la compagnie Neuralink est derrière cette expérience, s’était défendu en septembre dernier que l’on puisse faire cette association. Il réagissait alors à la publication d’un premier reportage du magazine Wired.

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L’implant de Neuralink.

Un singe sur cinq

Aucune donnée ne permet d’affirmer que c’est à cause de leur implant que ces animaux sont morts.

Il n’en demeure pas moins que des documents du partenaire de Neuralink, l’Université de Californie à Davis, ont confirmé qu’au moins 12 singes qui avaient été soumis à cette expérience depuis 2018 — soit un sur cinq — avaient dû être euthanasiés.

On parlait dans ces documents d’enflure du cerveau (ou œdème cérébral), de paralysie partielle, de perte de coordination et de comportements d’automutilation. Un rapport d’autopsie fait état de saignements au cerveau chez un animal, un autre décrit un implant qui s’est partiellement «détaché».

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Il y a aussi le cas d’un singe qui avait, en se grattant, endommagé l’implant, ce qui avait provoqué une infection.

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L’implant de Neuralink. Photo: neuralink.com

Autorisation de la FDA

En mai 2023, quatre mois avant la publication du reportage de Wired, l’agence américaine chargée d’approuver les nouveaux médicaments ou les nouveaux traitements, la FDA, avait autorisé Neuralink à tester son implant sur des humains.

Les incidents entourant les singes ne semblent pas avoir été rendus publics, au point où, en novembre 2023, des élus de la Chambre des représentants des États-Unis ont demandé une enquête, alléguant que Neuralink pourrait être accusée d’avoir trompé ses investisseurs.

Un an plus tôt, avait révélé l’agence de presse Reuters, le ministère américain de l’Agriculture avait pour sa part ouvert une enquête sur la possibilité que la compagnie ait contrevenu à la loi sur le bien-être animal. L’enquête a pris fin en juillet 2023 sans avoir trouvé de preuves d’inconduite.

Le «cobaye» humain dont il a été question dans l’annonce faite par Elon Musk sur X le 29 janvier serait le premier.

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L’investisseur de Neurallink, Elon Musk.

Quel implant? Quel patient?

L’implant en question, de la taille d’une pièce de monnaie, avait permis à certains des macaques de jouer au jeu électronique Pong, sans manette ni clavier.

En date du 31 janvier, aucune autre information n’avait été publiée sur l’implant ou sur le patient, en dépit des nombreuses demandes des médias formulées auprès de Neuralink. La revue Nature note que le test, s’il y a, n’a pas été enregistré dans la base de données ClinicalTrials.org, une condition imposée par plusieurs revues scientifiques pour publier d’éventuels résultats de recherche.

L’objectif derrière tout cela est de créer une interface cerveau-machine, soit la possibilité pour le cerveau de communiquer directement avec un ordinateur. D’autres compagnies y travaillent depuis plusieurs années, au point où l’on ne peut pas parler de l’annonce de cette semaine, comme certains l’ont fait, comme du «premier» implant cérébral chez un humain.

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Un singe manipulant une balle du jeu Pong à distance grâce à un implant cértébral de Neuralink.

Des essais cliniques depuis 20 ans

En réalité, le premier essai clinique d’un tel implant, BrainGate, remonte à 2004. Il avait été fait sur un patient tétraplégique.

Des chercheurs suisses testent pour leur part depuis 2017 deux implants — de part et d’autre du crâne — et un neurostimulateur — relié à la moelle épinière — qui sont censés permettre à un patient tétraplégique d’animer un exosquelette, et d’ainsi se déplacer. La percée a fait l’objet d’une publication en mai 2023 dans la revue Nature.

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Dans une autre expérience d’implant, menée en 2021 à l’Université Stanford en Californie, des chercheurs ont pu décoder les signaux cérébraux d’un homme lorsqu’ils lui demandaient de penser à des mots écrits avec un crayon, permettant à un ordinateur de traduire certains de ces mots à l’écran.

Mais tout cela reste encore expérimental: dans une compilation du Government Accountability Office des États-Unis publiée à la fin de 2022, moins de 40 personnes dans le monde étaient munies d’un implant cérébral.

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