Les 50 ans de l’OIF: un anniversaire en berne

Désillusion

Le drapeau de l'Organisation internatiomnale de la Francophonie.
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Publié 16/03/2020 par Agathe Beaudouin

Près de 400 événements en tout genre organisés jusqu’au 31 décembre prochain sur chaque continent. Tout un panel d’événements culturels, sportifs, économiques s’ancre sur le calendrier 2020 autour du cinquantenaire de l’Organisation internationale de la Francophonie (OIF)

Mais la fête sera quelque peu perturbée…

C’est ce qu’on appelle un anniversaire en berne: en raison de la pandémie du coronavirus qui s’étend à travers le monde, le coup d’envoi des manifestations visant à célébrer les 50 ans de l’OIF est annulé.

Les festivités devaient se dérouler à Niamey, dans la capitale du Niger, là même où fut signée une convention qui deviendrait l’acte de naissance de cette organisation dédiée à la langue française et plus largement à la francophonie. C’était en 1960.

Louise Mushikiwabo controversée

Le Covid-19 n’est visiblement pas la seule raison à semer au sein de cette organisation. Il semble que la prise de fonction le 3 janvier 2019 de sa secrétaire générale, la Rwandaise Louise Mushikiwabo, fasse aussi grincer des dents.

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Louise Mushikiwabo (Photo: Cyrille Bailleul, OIF)

Élue contre la Canadienne d’origine haïtienne Michaëlle Jean, celle qui a pris la tête d’une structure visant à promouvoir la langue française n’en serait pas la meilleure ambassadrice selon de nombreux experts. Louise Mushikiwabo est largement identifiée au gouvernement rwandais, dont le régime défie des droits fondamentaux.

C’est aussi un pays qui a remplacé le français par l’anglais comme langue obligatoire à l’école, qui en a fait sa langue officielle, et qui a par ailleurs adhéré au Commonwealth.

De son côté, Louise Mushikiwabo n’y voit aucune contradiction: «L’anglais, c’est aujourd’hui la langue de la Silicon Valley, de la technologie, de la recherche, des réseaux sociaux. C’est une réalité et, par ailleurs, l’essentiel de l’activité économique du Rwanda se fait avec l’Afrique de l’Est», expliquait-elle au journal français Le Monde, peu après sa nomination.

Coopération culturelle et technique

Pourtant, depuis toujours, l’OIF (qui fut d’abord l’ACCT, l’Association de la coopération culturelle et technique) s’assigne une mission claire: promouvoir le français et surtout, développer des liens et intérêts communs entre les pays qui ont la langue de Molière en partage.

C’est toute la philosophie prônée au début des années 60 au Niger, où l’homme politique nigérien Hamani Diori, premier président de la République du Niger (1960-1974) avec le Sénégalais Léopold Sedar Senghor, le Tunisien Habib Bourguiba et le Cambodgien Norodom Sianouk défendent une Francophonie politique et institutionnelle.

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Car si au lendemain de la Seconde Guerre mondiale, dans un monde chaotique, cette conscience francophone existe, elle est avant tout l’apanage des intellectuels.

Senghor, lui, va plus loin: pilier de cette idée contemporaine de la francophonie, il entrevoyait le français comme un «point commun entre une multitude de peuples différents». Cette idée trouve de l’écho auprès des locuteurs français qui sentent l’ombre du géant américain, et de l’anglais, gagner du terrain.

Premier sommet en 1986

Ainsi, le 20 mars 1960, les représentants de 21 États et gouvernements signent une Convention portant création de l’ACCT. À l’origine, la coopération entre les différents pays est avant tout éducative et culturelle.

Mais l’organisation prend une nouvelle dimension politique en 1984 sous l’impulsion du président français François Mitterrand: il organise le premier Sommet de la Francophonie en 1986 à Versailles (France), auquel 42 États et gouvernements y participent.

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On y détermine quatre domaines de coopération multilatérale: le développement, les industries de la culture et de la communication, les industries de la langue ainsi que le développement technologique couplé à la recherche et à l’information scientifique.

OIF depuis 2005

En 2005, l’ACCT devient l’OIF et représente maintenant 300 millions de personnes dans le monde. Elle regroupe 88 États et gouvernements ayant la langue française en commun (5e langue mondiale actuellement).

Le Canada compte quatre sièges au sein de l’OIF: en plus de la représentation fédérale, la province du Nouveau-Brunswick et la province de Québec en sont membres à part entière, et la province de l’Ontario y a un statut d’observateur.

Chaque année, il contribue à hauteur de 40 millions $ au fonctionnement de cette institution.

L’enseignement

Les pays membres doivent affronter un même défi: maintenir la langue française à flot, et cibler leurs efforts sur l’enseignement français. Pas si facile dans un monde en perpétuelle évolution, une structure qui semble de plus en plus géopolitisée, et des budgets en baisse.

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En effet, la France, le premier contributeur de l’OIF, a sensiblement baissé les subventions des Alliances françaises et réduit la voilure budgétaire des établissements d’enseignement du français à l’étranger.

Même Louise Mushikiwabo en convient: «La seule façon de maintenir le français, c’est de l’enseigner de façon substantielle sur le continent africain.»

Coronavirus ou pas, ce sont des bougies de désillusion qui risquent de marquer les 50 ans de l’Organisation internationale de la Francophonie.

Auteur

  • Agathe Beaudouin

    Journaliste à Francopresse, le média d’information numérique au service de la francophonie canadienne, qui gère son propre réseau de journalistes et travaille de concert avec Réseau.Presse et ses journaux membres.

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