Leçon d’histoire créole

Conférence mensuelle de la Société d'Histoire de Toronto

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Publié 03/03/2009 par Vincent Muller

Mois de l’histoire des Noirs oblige, la dernière conférence de la Société d’Histoire de Toronto (SHT) à l’Alliance française portait sur un thème de circonstance: Le monde créole – de ses origines à nos jours. Paul Comarmond, fondateur de la branche canadienne de l’Organisation Internationale des Peuples Créoles (OIPC), a retracé l’origine des créoles dispersés de par le monde.

Le terme «créole», du portugais «criolo», a d’abord désigné les personnes d’origine européenne nées dans les colonies. Aujourd’hui ce terme désigne une population aux origines diverses, souvent métissée entre descendants d’esclaves africains, populations locales, européennes et autres venues d’Inde ou d’Asie. Le conférencier est revenu sur les événements historiques qui ont donné lieu à l’apparition de ces peuples et de ces cultures créoles.

L’esclavage

On ne peut aborder le sujet sans parler de l’esclavage et de la traite négrière entreprise à partir du XVe siècle par des armateurs européens. Si l’esclavage a existé, (et existe encore) dans de nombreuses sociétés, le commerce d’esclaves africains, qui a duré près de 400 ans et qui s’est poursuivi clandestinement après l’abolition de l’esclavage, constitue le plus important déplacement de population de l’histoire de l’humanité.

Le public présent à l’Alliance française a pu découvrir dessins, peintures, gravures, photographies et copies de documents officiels d’époque, rassemblés par le conférencier, donnant une idée plus précise sur les conditions de transport des esclaves dans les cales des bateaux négriers, ainsi que sur leur vie dans les colonies.

Révoltes

Beaucoup plus que l’on ne l’imagine, sur de nombreux négriers les marins ont eu à faire à des mutineries qu’ils n’ont parfois pas pu maîtriser. Des révoltes ont également éclaté dans les colonies, notamment au Surinam, en Jamaïque où à Haïti. Dans cette dernière, la révolte a débouché sur la création de la première République Noire indépendante.

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Une autre forme de rébellion courante dans toutes ces colonies fut le marronnage. Il s’agit de la fuite d’esclaves qui se réfugiaient en général dans des lieux difficiles d’accès, comme des montagnes ou de denses forêts.

Ces fugitifs, appelés Nègres Marrons, se regroupaient en communautés clandestines dont certaines existent encore aujourd’hui. On retrouve d’ailleurs dans ces villages une influence africaine beaucoup plus forte qu’ailleurs.

Les maîtres ne sont bien entendu pas restés les bras croisés face au marronnage qui représentait pour eux une perte considérable. Ils ont entre autres engagé des chasseurs de marrons et infligeaient de nombreux sévices à ceux qui étaient rattrapés.

Influences

Le mot Bossal désignait les esclaves nés en Afrique. Paul Comarmond explique qu’ayant connu la liberté, ils étaient les plus enclins à partir en marronnage. Ce sont eux également qui ont assuré, bien contre leur gré, un apport continuel de différentes pratiques africaines ainsi qu’un vocabulaire issu de diverses langues. Mélangé aux langues et coutumes européennes et amérindiennes (pour les colonies d’Amérique), ceci a donné naissance petit à petit aux langues et cultures créoles.

Les travailleurs immigrés arrivés dans les colonies après l’abolition de l’esclavage ont également influencé ces cultures, l’exemple le plus criant étant celui de l’île Maurice où une importante partie de la population est d’origine chinoise où indienne.

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Aujourd’hui il existe de nombreux parler créoles que l’on peut regrouper selon leur base lexicale. Les bases lexicales française, portugaise et anglaise constituent les trois plus fréquentes. Si des différences existent entre les créoles d’une même base lexicale, l’intercompréhension est possible. Cependant le statut de ces langues n’est pas le même.

Créoles francos

Les créoles à base lexicale française qui sont parlés entre autre à l’île Maurice, d’où est originaire Paul Comarmond, en Guyane, à la Guadeloupe, à la Martinique, aux Seychelles où à la Réunion, sont reconnus comme des langues, contrairement aux créoles à base lexicale anglaise comme le «patois» jamaïcain. Le créole haïtien, également à base lexicale française, est langue officielle d’Haïti. Cette reconnaissance en tant que langue permet de valoriser ces cultures créoles et de les transmettre dans les langues qui leur correspondent.

L’OIPC vise aujourd’hui à rassembler les peuples créoles et à valoriser leurs cultures, ce qui n’est pas chose facile vu les contraintes géographiques et certaines différences culturelles qui persistent malgré une histoire similaire.

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