Le vignoble ontarien

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Publié 07/12/2010 par Alain Laliberté

Concentré en deux sites principaux, le vignoble ontarien s’étend entre les Lacs Ontario et Érié pour le secteur de Niagara et près de Windsor pour le vignoble du Sud-Ouest qui subit l’influence directe du lac Érié. Quatre régions distinctes appelées DVA (Designated Viticultural Areas) produisent du raisin de cuve : la péninsule du Niagara (Niagara Peninsula), la Rive-Nord du lac Érié (Lake Erie North Shore), l’Île Pelée (Pelee Island) et le comté de Prince Édouard (Prince Edward County). Récemment reconnu par les instances officielles, le secteur de Prince Edward County, une vraie champignonnière à 180 km à l’est de Toronto, a vu et voit naître plusieurs vignobles équipés d’installations de vinification.

Le climat

L’Ontario est considérée à juste titre comme un vignoble au climat tempéré et frais comme la Bourgogne, l’Allemagne et l’Oregon. Le 43e parallèle traverse la péninsule du Niagara, Florence et le secteur nord de Sonoma en Californie alors que la Bourgogne se retrouve sur le 47e et Bordeaux au 45e. La température est plus chaude, mais la période de chaleur pour la vigne y est plus courte comparativement à Bordeaux. Le climat plus chaud que la Bourgogne favorise la maturité du chardonnay

En analysant le vignoble européen, le secteur septentrional (Val de Loire, Alsace, Bourgogne, Champagne, Allemagne, Autriche) voit la majorité de sa production en vins blancs comparativement aux vignobles du sud. De plus, ces vins résultent presque exclusivement de l’utilisation de cépages uniques contrairement aux régions méridionales. Nous pouvons d’ailleurs remarquer que les vins produits sous climats froids présentent une acidité plus marquée. La péninsule du Niagara répond donc aux exigences du chardonnay, du pinot noir et du riesling.

Concentrées surtout en septembre et en octobre, les précipitations annuelles varient entre 700 et 800 millimètres. Ainsi, comme à Bordeaux, un bel été ne garantit pas la qualité de la vendange.

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Lors de rencontres avec des producteurs d’ici ou d’ailleurs, tous parlent du terroir. Celui-ci n’est pas l’aspect géologique, mais plutôt la relation de quatre éléments sans lesquels un bon vin n’existe pas: le sol, l’encépagement, le climat et le travail de l’homme.

La région connaît des températures hivernales et estivales très contrastées. Les vignobles voient la proximité de deux masses d’eau importantes, les lacs Ontario et Érié, intervenir favorablement en diminuant la température moyenne de l’été, en élevant la température moyenne de l’hiver et par son rôle de tampon thermique, en diminuant les écarts excessifs de température.

Cet effet mésoclimatique est accentué par la présence d’une formation géologique, l’Escarpement, formée à l’ère glaciaire sous l’effet des eaux du lac Iroquois. Cette chaîne de crêtes longue de 725 km s’étend du lac Ontario jusqu’à la Baie Georgienne et sert de barrière climatique aux vents soufflant du lac. En frappant la falaise abrupte, ce mouvement d’air continuel retourne vers le lac en ventilant la vigne, en chassant l’humidité qui cause des maladies, en dispersant les brumes et en réduisant les dommages causés par le gel du printemps.

La genèse

Les premiers pas de la viticulture canadienne ont débuté en 1811. Un sous-officier allemand à la retraite, le Caporal Johann Schiller trouve quelques pieds d’une vigne de l’espèce américaine Vitis Labrusca près de la rivière Credit à Cooksville (maintenant Mississauga). Il en plantera huit hectares.

En 1866, le premier vignoble commercial important, Vin Villa, est fondé sur l’Île Pelée. Près d’une quarantaine de vignobles possédant des installations de vinification sont recensés à la fin du 19e siècle en Ontario.

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En 1874, deux jeunes entrepreneurs, Thomas G. Bright et Francis A. Shirriff, créent la Niagara Falls Wine Company. Seize ans plus tard, ils déménageront leurs bureaux de Toronto à Niagara Falls, là où croît le raisin. En 1911, la compagnie change de nom pour T.G.Bright & Co qui allait devenir le plus important producteur de vin au Canada. Trois autres entités juridiques joindront le groupe : Les Vins Brights en 1933, Bright’s Wines Limited (Ontario) en 1939 et Les Vins La Salle en 1972.

Au début du 20e siècle, le raisin Concord se retrouve dans 73 % des vins produits.

La prohibition, ce phylloxéra politique, durera de 1916 à 1927 au Canada alors qu’elle touchera les États-Unis entre 1919 et 1934. Fait intéressant, un lobby influent de producteurs de raisins ontariens trouve une oreille attentive puisque la prohibition canadienne n’empêche pas la production et la vente de vin, ce qui fait le bonheur des contrebandiers.

La vigne plantée à cette époque est uniquement du Vitis Labrusca. Jusqu’au début des années 1970, la production de vin en Ontario est l’affaire de sept gros joueurs : T.G. Bright, Château Cartier, Château Gai, Barnes, London Winery, Andrés et Jordan.

En 1974, un permis alloué à Inniskillin, fondée par Donald Ziraldo et Karl Kaiser, permet la production de 10 000 gallons de vin. L’année suivante, ce nouveau venu obtiendra le premier permis permanent d’exploitation en Ontario depuis la fin de la prohibition en 1927. Un précédent est créé! Suivra alors Paul Bosc, un Français débarqué au début des années 1960, qui bâtit Château des Charmes en privilégiant le vinifera. Plus tard, vers la fin des années 1970 et début 1980, Hillebrand, Cave Spring, Henry of Pelham, Pelee Island Winery et Colio ajouteront une dimension qualitative en plantant eux aussi du vinifera. Une nouvelle époque est née.

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L’histoire se précipite avec l’année 1988 alors que les ⅔ du vignoble planté en cépages indigènes nord-américains sont arrachés au profit de variétés nobles européennes et d’hybrides français. Les accords du GATT signés en 1988 n’y sont pas étrangers puisque le traitement préférentiel fiscal du marché national accordé aux vins canadiens a fondu comme neige au soleil. À partir de 1990, les vins de l’Ontario et de la Colombie-Britannique doivent rivaliser avec les vins européens, californiens et particulièrement australiens. Ce mouvement vers la qualité sera accueilli par l’instauration de normes de production, le VQA (Vintners Quality Alliance). Ce label de qualité incitera plusieurs producteurs à en demander la reconnaissance.

Goutte à goutte

Pelee Island Winery Lighthouse Riesling Ontario VQA 2009 (LCBO 145417 11,95 $) Ce riesling est original du fait que 14 % de gewurztraminer entre dans l’assemblage. Des odeurs nettes et fraîches d’agrumes, de pêche, et de miel suivent dans une bouche légère, efficace, croquante, longue et légèrement doucereuse. Le rapport qualité/prix est indéniable pour un riesling simple efficace pour lui-même en apéro. Il s’avère excellent en accompagnement de la cuisine de l’Asie du Sud-est et d’un ceviche de pétoncle. *** $ (Nov. 2010)

Domaine des Charmilles Sancerre 2008 (Vintages 182915 21,95 $) Odeurs légèrement herbacées, de groseille moyennement intense avec une délicate minéralité. La bouche suit, droite, pure et élancé avec un brin de tension qui nettoie la bouche. Ensemble très sec, long et délicat. Amenez les huîtres, la salade niçoise, le ceviche de Saint-Jacques. ***(*)

Les vins rouges

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Pelee Island Winery Lighthouse Cabernet Franc Ontario VQA 2009 (LCBO 145441 11,75 $) Outre du cabernet franc, du zweigelt (10%) et du cabernet sauvignon complètent l’assemblage. Robe rubis clair et brillant. Nez délicat et typique de poivron vert et de fruits rouges à défaut de framboise. Attaque souple et moyennement corsée. Les tanins s’expriment un peu pointus alors que l’acidité tend l’ensemble. Attendre l’été 2011 pour que le tout se calme un peu. Longue persistance. *** $ (Nov. 2010)

Paitin Sori’ Barbaresco 2006 (Vintages 106591 34,95 $) Grenat soutenu au disque orangé brunissant. Une caresse au palais, des tanins gourmands bien en chair dessinés adroitement avec passion. Harmonie d’ensemble, des arômes de cuir, pot-pourri, tabac, de feuilles automnales au sol. Parce que c’est quand même du nebbiolo, le vin a du nerf, de la force, et une délicieuse structure. Long et droit, il coule admirablement bien maintenant et sera tel quel pour huit à dix ans. **** $$$ (Nov. 2010)

Nuova Cappelletta Barbera del Monferrato 2008 (Vintages 719518 15,95 $) Grenat soutenu en couleur, nez de bonne intensité avec cerises noires, cuir, tabac. Moyen corsé, souple, coulant, voici une barbera à l’acidité plus faible que plusieurs autres sans toutefois tomber dans la facilité. Agréable et simplement délicieux pour lui-même. ***(*) $($) (Nov. 2010)

Château Roquetaillade La Grange Vieilles Vignes Graves 2006 (Vintages 125666 21,95 $) Voici un Bordeaux à prix doux, plutôt fumé et torréfié avec des notes de fruits noirs en retrait. Bouche tendre et balancée, assise sur des tanins souples et toutefois un peu sentis. Moyennement corsé, droit, mûr, soutenu, long et glissant en fin de bouche, il a un goût de revenez-y avec sa délicieuse élégance. ***(*) $$ (Nov. 2010)

L’évaluation
* : Banal
** : Honnête
*** : Très bien
**** : Excellent
***** : Le 7e ciel
(*) : Équivaut à une demi-étoile
♥♥♥ : Coup de coeur

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Les prix
($) : jusqu’à 9$
$ : jusqu’à 13$
$($) : jusqu’à 17$
$$ : jusqu’à 24$
$$($) : jusqu’à 30$
$$$ : jusqu’à 40$
$$$($) : jusqu’à 50$
$$$$ : jusqu’à 70$
$$$$($) : jusqu’à 110$
$$$$$ : plus de 110$

Plus de * que de $, le vin vaut largement son prix.
Autant de * que de $, il vaut son prix.
Moins de * que de $, il est cher, voire très cher.

Vous pouvez écrire à Alain Laliberté à [email protected]

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