Le stress améliore la résistance des arbres

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Publié 10/11/2015 par Isabelle Burgun (Agence Science-Presse)

Ce qui ne tue pas renforce. Ce dicton a pris feuilles et racines lorsque des chercheurs se sont penchés sur les saules pourpres plantés sur un site autrefois utilisé comme raffinerie de pétrole à Varennes. Ces petits arbustes ont en effet démontré une vitalité supérieure à ceux qui prennent racines dans des écosystèmes en santé. Avec une résistance étonnante aux ravageurs, en plus d’effacer les traces de contamination des sols.

«Les saules qui grandissent au sein d’environnements difficiles perfectionnent leurs mécanismes de défense, ce qui les protégera des maladies et des attaques de parasites», explique Nicholas J. B. Brereton, associé de recherche à l’Institut de recherche en biologie végétale (IRBV) de l’Université de Montréal.

Cette variété de saules (Salix purpurea, Fish Creek), à la croissance rapide et résistante à la pollution, absorbe et immobilise la contamination dans leurs branchages. Les chercheurs ont découvert que ses rameaux produisent des éléments biochimiques naturels pour métaboliser et tolérer la contamination qui les arment contre des herbivores.

L’analyse de l’expression des gènes présents dans les tissus de ce petit arbuste très prolifique a mis à jour différentes variations que les chercheurs attribuent à la variabilité du sol où pousse l’arbre, mais également à celle des organismes qui composent son écosystème.

Plus de 45% de cette variabilité provient d’autres organismes, majoritairement des parasites. «L’analyse de l’expression des gènes de l’arbre nous informe sur le plant et sur ce qui l’entoure: les parasites, les champignons, les insectes. Tout est relié, ce qui nous donne des indices sur la complexité de la vie et sur les capacités de résistance des arbres survivant dans des sites contaminés», soutient le chercheur.

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S’il était mieux compris, ce mécanisme naturel du «tout dans tout», difficile à accepter et à appréhender, pourrait aider les généticiens à améliorer la résilience des plants dans des environnements hostiles, en plus de mieux saisir ce qui lie ensemble tous les organismes vivants.

Les saules à la rescousse

Au Canada, il y aurait environ 30 000 sites contaminés par des hydrocarbures pétroliers ou des métaux lourds (zinc, plomb, arsenic, etc.), soit 5593 terrains contaminés au Québec où les cultures ne peuvent plus croître.

Face au coût et aux défis de la décontamination chimique, la phytoremédiation – le rajeunissement des sols contaminés ou pollués par l’usage de plantes — serait un bon remède à la pollution industrielle.

L’investissement dans les technologies environnementales de décontamination reste toutefois problématique, c’est pourquoi les chercheurs désirent combiner la capacité de décontamination de certaines variétés de saules avec le potentiel énergétique d’autres pour tirer le meilleur des deux.

«Nous éliminerons ainsi la pollution en taillant les arbustes et nous pourrons utiliser le bois pour produire de l’énergie, ce qui donne un biocarburant doublement écologique», annonce le chercheur. Ce «deux-en-un» pourrait convaincre les industriels de procéder à la décontamination des sites délaissés et redonner une chance à la nature de reprendre le dessus sur la pollution humaine.

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«Tout est dans tout»

À l’instar du microbiote intestinal, immense réservoir de microorganismes habitant le tube digestif humain, les chercheurs de l’IRBV commencent à s’intéresser aux méta-organismes des plantes – une branche un peu révolutionnaire de la génétique qui soutient que chaque organisme comprend les gènes des organismes de son milieu, connue aussi sous «métagénome».

«C’est un nouveau concept, un peu compliqué à saisir, mais très utile pour comprendre la haute complexité et diversité de la vie dans tous les organismes. Chaque feuille, tige ou racine du plant inclut des centaines d’“autres” organismes qui l’aident ou le blessent. Nous étudions donc les gènes de l’arbre, mais aussi de toutes les autres vies présentes (bactérie, champignons et insectes) à la surface et à l’intérieur de l’arbre», explique Nicholas J. B. Brereton.

Il s’agit d’une nouvelle frontière qui amène à reconsidérer les liens entre les organismes.

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