Le musée de la Tolérance au coeur d’un conflit

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Publié 26/09/2006 par Matti Friedman (The Associated Press)

Tout avait commencé par de bonnes intentions. Avec plus de 100 millions de dollars US de dons et un projet dessiné par l’architecte Franck Gehry, le musée de la Tolérance à Jérusalem avait pour ambition d’encourager la coexistence pacifique entre les religions. Mais avant même sa construction, il est l’objet d’un conflit entre juifs et musulmans.

La pomme de discorde? Des tombes musulmanes découvertes sur le terrain qui devait accueillir le musée.

Depuis plusieurs mois, le chantier est au point mort. Et c’est désormais à la Cour suprême israélienne de trancher. Mais même si celle-ci donnait son feu vert, le musée devrait en pâtir.

L’établissement a été conçu par le Centre Simon Wiesenthal. Il devait encourager la coexistence dans une Ville Sainte à la fois pour les musulmans, les juifs et les chrétiens, revendiquée comme capitale par les Israéliens et les Palestiniens.

Le projet comprend un centre de conférences, un théâtre, des musées pour adultes et enfants avec des expositions consacrées à l’histoire de la religion juive et aux relations entre l’État hébreu et ses voisins arabes.

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La municipalité avait attribué au Centre Wiesenthal un parking dans le centre-ville. Avant d’être transformé en parc de stationnement souterrain dans les années 1970, ce terrain accueillait une partie d’un cimetière musulman.

Il n’avait plus été utilisé depuis la création de l’État hébreu en 1948, mais de nombreuses tombes sont encore visibles, s’écroulant au milieu des arbres dans ce qui est devenu le coeur de la partie juive de la ville.

Une partie du cimetière a été transformée en parc, le parc de l’Indépendance. Un autre secteur abrite le Palace Hotel. Les auteurs du projet de musée affirment qu’ils ignoraient que le terrain contenait des tombes lorsqu’ils l’ont récupéré.

Ils rappellent le précédent de l’hôtel et la décision en 1964 d’un religieux musulman qui avait permis la construction. Mais pour les opposants au projet, rien ne justifie la profanation de tombes.

Après la découverte de restes humains en début d’année, deux organisations arabes israéliennes ont obtenu la suspension des travaux de construction.

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L’une d’elles, la société Al-Aqsa, est liée au Mouvement islamique en Israël. «La loi islamique est très claire: on ne peut pas construire sur une terre qui était autrefois un cimetière», affirme Muhammad Suleiman, avocat du parti. Selon lui, le religieux qui avait autorisé la construction était corrompu.

Le Centre Wiesenthal a donc proposé un compromis: déplacer les tombes, construire un mémorial et financer la réhabilitation des pierres tombales voisines.

Mais ce n’est pas suffisant, poursuit l’avocat, qui plaide pour que le musée soit déplacé. Impossible, répond le centre, évoquant les millions déjà dépensés. Le rabbin Marvin Hier, qui dirige l’organisation et a élaboré le projet, explique que les retards ont déjà coûté plus d’un million de dollars US.

L’Autorité israélienne des Antiquités remarque pour sa part qu’il est impossible de cesser une construction à chaque fois que des tombes sont découvertes, car cela se produit régulièrement. Ainsi, souvent, lorsque des tombes juives sont découvertes, ce sont les juifs orthodoxes qui manifestent et perturbent les travaux.

Certains accusent le Mouvement islamique d’utiliser cette affaire pour récupérer une partie de Jérusalem-Ouest. «Ils n’évoquent pas seulement le musée», explique le rabbin. «Ce qu’ils veulent, c’est la zone toute entière, la totalité du parc de l’Indépendance également».

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Reste que les détracteurs du projet ont des alliés inattendus: les juifs ultra-orthodoxes. «La profanation de tombes de quelque religion que ce soit ne peut pas se justifier», souligne Meir Porush, député orthodoxe. «Les morts ont le droit de reposer en paix».

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