Le mouvement WWOOF: se nourrir d’expériences

Wwoofeurs lors de la plantation des herbes dans du paillis biodégradable le 30 mai dernier à la Chickadee Farm Herbs Ltd. Photo: Monica Marenholtz
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Publié 03/10/2020 par Mélodie Charest

Travailler quelques heures par jour en échange d’un toit, de la nourriture et de nouvelles connaissances agricoles. C’est ce que propose le mouvement WWOOF (WorldWide Opportunities on Organic Farms) depuis 1971. Les travailleurs n’ont pas de salaire. La relation entre employé et employeur n’est pas soudée uniquement par une motivation financière, mais par le désir de découverte.

L’aventure, c’est ce qui a poussé Marjorie à venir au Canada, en 2016. Elle vit des expériences Wwoof et HelpX, un site web similaire au Wwoof, pendant 11 mois.

Champlain

C’est en discutant de leurs aventures avec Delphine Pugniet, rencontrée lors de son voyage au Québec, que Marjorie et son compagnon de l’époque rencontrent les propriétaires de l’Auberge Café chez Sam, à Baie-Sainte-Catherine au Québec.

«Les propriétaires étaient autochtones, on a appris énormément sur Samuel de Champlain qui avait débarqué à Baie Saint-Catherine. Ils jouaient de l’harmonica autour du feu. Ils nous ont appris le Pow-Wow et l’histoire du Québec, des choses que je n’avais jamais apprises en France. Des choses que je n’aurai jamais apprises en restant à Montréal dans une entreprise».

Elle se rappelle avec bonheur ces expériences, qui ont alimenté son désir de vivre ici.

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Marjorie Baron au Québec.

Reconnecter avec ses valeurs

Pour Kim D’Alessio, ancienne directrice marketing, participer à une expérience Wwoofing, c’est un moyen de faire une «belle grosse pause», ce qui lui permet de se reconnecter avec ses valeurs environnementales et se questionner sur son avenir professionnel. Pour elle, le Wwoofing «c’est un début, c’est travailler dans la nature».

Ce qui rallie Kim et tous les Wwoofeurs, c’est leur sensibilité face aux enjeux environnementaux. La Federation of WWOOF Organisations tente de conscientiser la population à la préservation environnementale en créant une communauté d’agriculteurs soucieux des pratiques «biologiques et durables, tout en respectant la nature en préservant les ressources naturelles», lit-on sur wwoof.ca.

En juin dernier l’Edmontonienne d’adoption quitte les bureaux pour rejoindre, sur une île britanno-colombienne, le jardin «d’un vieux couple d’Iraniens». S’occuper des légumes environ 4,5 heures par jour, six jours par semaine, c’est son emploi du temps pour huit semaines.

Wwoofeurs lors de la plantation des herbes dans du paillis biodégradable le 30 mai dernier à la Chickadee Farm Herbs Ltd. Photo: Monica Marenholtz

Mode de vue minimaliste

«Ce n’est pas fait pour le tout le monde!», prévient-elle dans un éclat de rire. Il y a la douleur physique, mais aussi un mode de vie minimaliste à intégrer. «Beaucoup de gens sont habitués à avoir leur chez-soi, leur appartement, avec tout qui est accessible. Là, j’ai une chambre toute simple, j’ai un lit et j’ai mon sac à dos. Je n’ai pas énormément d’affaires. Il faut enlever le superflu.»

«Le Wwoofing, c’est une expérience. Il ne faut pas le voir comme un travail gratuit, c’est vraiment un échange entre l’hôte et le Wwoofeurs». Un échange de travail, mais aussi un échange culturel.

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Wwoofeurs lors de la plantation des herbes dans du paillis biodégradable le 30 mai dernier à la Chickadee Farm Herbs Ltd. Photo: Monica Marenholtz

Heureux de travailler 

«Il n’y a pas vraiment d’expériences de travail où nous ne pouvons pas apprendre à propos de l’autre», confie Monica Marenholtz, propriétaire de Chickadee Farm Herbs Ltd.

Depuis 2015, cette ferme d’Edmonton accueille des Wwoofeurs qui travaillent, 6 heures par jour, six jours par semaine, avec leurs salariés. Bien que certains participants tiennent à avoir un horaire fixe et jouir de leur liberté, «la plupart sont là pour l’expérience et ils sont heureux de travailler quand nous travaillons. Leur temps est proche de six heures par jour, mais certains travaillent avec nous, peu importe le temps et la tâche. Nous travaillons en réalité de très longues heures» explique la dame.»

Tout n’est pas rose : l’abus existe dans ce genre d’expériences. «Il y a vraiment de l’abus, c’est le point négatif. Le point positif, tu peux apprendre énormément de choses, rencontrer des gens extraordinaires et qui vont t’amener loin», précise Marjorie.

Cueillette de camomilles à la ferme Chickadee Farm Herbs Ltd le 25 juin dernier dernier. Photo: Monica Marenholtz)

Léguer des connaissances

Si ce sont des raisons économiques qui poussent la famille Marenholtz à prendre cette décision, c’est le plaisir de léguer des connaissances qui motive Monica à poursuivre accueillir les Wwoofeurs : «C’est ce que nous avons fait avec nos enfants, il suffit de leur apprendre. Il est bon que les gens découvrent la nature et beaucoup de gens réfléchissent à une telle expérience».

La ferme héberge parfois des familles allemandes ou bien japonaises. Cette année, une famille edmontonienne de quatre enfants est venue prêter mainforte pendant une semaine. Tout le monde travaille : «C’est tellement diversifié (les tâches) qu’il y a toujours quelque chose d’utile à faire et oui, c’est de l’organisation».

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L’Auberge du Café chez Sam. Photo: Courtoisie Marjorie Baron

Vivre son rêve

Après avoir travaillé en science agricole depuis deux décennies, Andreas et sa femme décident de vivre un rêve: avoir une ferme.

Mais, «pour travailler avec la banque et avoir le capital pour faire ça, c’est impossible. Parce que les banques travaillent juste avec les grands fermiers. Nous sommes dans une autre catégorie qui n’existe pas, c’est très difficile pour créer une ferme. On a commencé avec rien, c’était très difficile».

Les Grueneberg ont entendu parler des Wwoofeurs il y a 20 ans. «Le programme Wwoofing, nous a donné l’opportunité d’avoir des personnes qui sont intéressées à l’agriculture et qui donnent leur temps et leur travail en échange de vivre ici et avoir quelque chose à manger», apprend-on lors d’un entretien téléphonique avec Andreas Grueneberg, propriétaire de la ferme Green Eggs & Ham Family Farms.

«La plupart sont fantastiques!» Il donne l’exemple de cette dame, une préretraitée qui est venue faire une expérience Wwoofing dans sa ferme, au printemps. «Tu ne sais pas qui vient», dit l’agriculteur qui accueille une centaine de Wwoofeurs par année. Chacun vient avec «une différente culture, mais aussi différentes manières de penser».

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