Le gouvernement veut fermer Droits et Démocratie

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Publié 04/04/2012 par Stéphanie Marin (La Presse Canadienne)

à 19h27 HAE, le 3 avril 2012.

OTTAWA – Le gouvernement Harper signe l’arrêt de mort de l’organisme Droits et Démocratie, dont les déboires, notamment la mort de son président Rémy Beauregard, ont défrayé les manchettes.

Le ministre des Affaires étrangères, John Baird, a annoncé mardi par communiqué que le gouvernement a l’intention de fermer l’organisme de promotion des droits de la personne, dans ses efforts pour diminuer les dépenses de l’État.

Une économie qui serait tout au plus de l’ordre de 11 millions $, si l’on se fie au financement octroyé l’an dernier par le fédéral à cet organisme qui demeure indépendant du gouvernement.

Quelque 60 employés pourraient être touchés par la décision — ici et à l’étranger.

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Dans son communiqué, John Baird n’a pas manqué de souligner les conflits vécus par Droits et Démocratie.

«Depuis un certain temps, les nombreux problèmes auxquels est confronté le Centre international des droits de la personne et du développement démocratique, aussi connu sous le nom de Droits et Démocratie, ont été exposés sur la place publique», a-t-il indiqué.

«Il est maintenant temps de tourner la page et d’aller de l’avant», a ajouté M. Baird.

L’organisme établi à Montréal a été sur la sellette en raison de nombreux conflits au sein de son conseil d’administration. Démissions d’une part, têtes réclamées d’autre part, la tension régnait.

Certains des administrateurs ont notamment reproché au gouvernement de faire de l’ingérence politique en imposant des dirigeants qui partageaient son idéologie.

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Trois membres du conseil nommés par le gouvernement Harper s’étaient notamment opposés au financement de groupes qui condamnent des violations des droits de la personne commises par Israël.

Rémy Beauregard

L’ex-président du conseil de Droits et Démocratie, Rémy Beauregard, est mort pendant la crise qui secouait l’organisme en janvier 2010, à la suite d’un malaise cardiaque peu de temps après une réunion particulièrement houleuse. Sa famille avait réclamé une enquête sur son décès.

Le décès de celui qui avait été le premier directeur général de l’Office des affaires francophones de l’Ontario a été très remarqué dans la communauté franco-ontarienne. Le juge Paul Rouleau l’avait qualifié de «Superman francophone» lors d’un hommage public organisé à Toronto.

Un projet de loi sera bientôt déposé pour concrétiser la fin des activités de Droits et démocratie.

La porte-parole du Nouveau Parti démocratique (NPD) en matière d’affaires étrangères, Hélène Laverdière, est estomaquée de la décision du gouvernement Harper.

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«Ils ont miné cette organisation-là pendant des années, a-t-elle dit. On a empoisonné l’organisation et maintenant on dit: l’organisation a des problèmes, on la ferme. C’est absolument aberrant.

«Ça me rappelait un vieil adage: quand on veut tuer son chien, on dit qu’il a la rage», a ajouté Mme Laverdière, qui a souligné que l’organisme était mal géré par les gens mis en place par le gouvernement Harper.

Selon elle, l’organisme a été liquidé car le gouvernement n’aimait pas le travail qu’il faisait parce qu’il ne partageait pas son idéologie.

Le Parti libéral est du même avis.

«Le visage du Parti conservateur en termes de politique étrangère, c’est avec une mitraillette, c’est dans un avion de chasse», a illustré le libéral Dominic Leblanc.

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Il s’agit selon lui d’un autre exemple qui démontre que le gouvernement tourne le dos au rôle positif et constructif que le Canada pourrait jouer sur la scène internationale.

Droits et démocratie a reçu l’an dernier la quasi-totalité de son budget du gouvernement fédéral.

La petitesse de la somme – 11 millions $ versés par Ottawa – a fait dire à l’opposition que là n’est pas la vraie raison pour mettre la clé sous la porte de l’organisme.

«Le gouvernement fera des économies de 11 millions $ avec cette coupe, il ne s’agit donc pas d’économies, mais d’idéologie», a indiqué le député Jean-François Fortin, du Bloc québécois.

Une expertise qui n’existe pas au ministère?

Quant au ministère concerné et au bureau du ministre Baird, ils ont été avares de commentaires après l’envoi du communiqué.

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L’attaché de presse de M. Baird affirme ne pouvoir préciser le montant qui sera économisé — pourtant invoqué comme la raison de la fermeture du centre — puisqu’il n’a pas encore été annoncé comment Droits et Démocratie sera restructuré au sein du ministère.

Car les tâches actuellement effectuées par l’organisme seront transférées au ministère des Affaires étrangères et du commerce international.

«Je fais énormément confiance aux fonctionnaires travaillants du ministère, qui seront capables de s’attaquer à ces projets», a indiqué le ministre Baird en Chambre.

Mais l’opposition n’y croit pas. Le NPD souligne que Droits et Démocratie possédait une expertise qui n’existe pas au sein du ministère. Et les budgets des Affaires étrangères font aussi l’objet de compressions, diminuant sa capacité d’action.

Mardi, Droits et Démocratie ne voulait pas commenter la décision d’Ottawa, mais affirme qu’elle sera respectée.

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«Si le conseil d’administration nous en donne la directive, nous procéderons à mettre fin à nos opérations de façon rapide et organisée. Notre personnel sera traité équitablement et avec respect», peut-on lire dans un communiqué diffusé par l’organisation.

Droits et Démocratie a été créé en 1988 par le Parlement canadien sous le premier ministre Brian Mulroney pour encourager et appuyer les valeurs universelles des droits de la personne et promouvoir la démocratie partout dans le monde.

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