Les pages d’histoire de l’Ontario regorgent de moments charniers en ce qui a trait à la langue d’enseignement. Ainsi, le 24 avril 1857, le surintendant de l’Instruction dans le Haut-Canada, Egerton Ryerson, écrit que «le français étant la langue officielle du pays au même titre que l’anglais, les commissaires peuvent légalement autoriser l’enseignement des deux langues dans leur école si les parents veulent que leurs enfants apprennent les deux langues». Une première reconnaissance du statut légal du français en Ontario remonte donc bientôt à 150 ans.
Peu après cette reconnaissance, l’Ontario ouvre la porte à une autre langue. Le 15 février 1861, Egerton Ryerson écrit que «la loi autorise l’enseignement du français et de l’allemand aussi bien que l’anglais dans les écoles». Ryerson ajoute que la loi n’impose pas «d’employer un professeur d’anglais dans les localités où la majorité des habitants et des conseillers sont Français ou Allemands». Il y a 145 ans, il y pouvait y avoir trois langues d’enseignement dans la province ou Haut-Canada.
La politique, c’est bien connu, emprunte souvent des chemins parsemés de détours. C’est ce qui arrive le 22 mars 1911. Dans un discours à l’Assemblée législative, le ministre de l’Instruction, George Howard Ferguson, propose de faire de l’anglais la seule langue d’instruction dans toutes les écoles ontariennes.
Suite à des pressions exercées par les conservateurs fédéraux, qui étaient en voie d’organiser une alliance avec les nationalistes québécois, Ferguson modifiera sa résolution pour dire que l’anglais doit être «la langue d’enseignement et de communication avec les élèves dans les écoles publiques et séparées (…), excepté dans celles où, de l’avis du ministère, il est impossible de l’utiliser parce que les élèves ne la comprennent pas». Il y a 95 ans, la guillotine s’apprêtait à tomber sur le cou des Franco-Ontariens.