La vieille dame aux jonquilles

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Publié 04/07/2006 par Pierre Léon

C’est une très vieille dame, ridée comme une pomme de reinette après bien des hivers. Elle tremble un peu et sourit joliment sous son grand chapeau vert et jaune. Elle a encore un souci de jeunesse comme en témoigne sa jaquette d’un or éclatant.

Elle s’est arrêtée, soudain. En extase, devant l’un de ces bacs de fleurs printanières dont Toronto orne ses trottoirs de béton.

Il y a là un petit massif de jonquilles, serrées autour d’un tronc d’arbre maigrelet. On y voit aussi des narcisses dont les pétales blancs contrastent avec la couleur vive des jonquilles.

Ce sont elles que la vieille dame préfère. Elle allait en chercher dans les bois quand elle était jeune. Ces jonquilles citadines lui rappellent bien des souvenirs heureux. Elle secoue la tête comme pour les raviver. Elle en rit même, sans voir les gens qui la regardent au passage.

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Les jonquilles ont bien six pétales et un coeur comme un cornet. Les narcisses aussi mais la vieille dame n’aime vraiment pas les narcisses à cause de leur pâleur et de leur fragrance violente. Ce mini parterre si bien fleuri est un signe réjouissant d’un printemps longtemps attendu.

Mains jointes dans son admiration, elle remercie le ciel de cette grande bonté.

Elle est si contente qu’elle caresse doucement les jonquilles comme le ferait une brise légère. Elle choisit les plus belles, les jaunes d’or. Il faut un nombre impair. Trois, cinq ou sept fleurs. Elle en cueille modestement cinq, avec grande délicatesse. Puis elle s’en va, ravie de ce petit bouquet, sous l’oeil de passants plus amusés qu’offensés par ce délit amoureux.

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