La traduction des documents lorsque les parties utilisent différentes langues officielles

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Publié 13/09/2011 par Gérard Lévesque

Je suis surpris de constater qu’en 2011, il y a encore des membres unilingues du Barreau qui exigent de recevoir de leurs collègues une version anglaise de documents déposés en français. À quoi bon serait le droit d’employer le français si une partie devait aussi produire une version dans l’autre langue officielle?


Le paragraphe 126 (6) de la Loi sur les tribunaux judiciaires (LTJ) de l’Ontario prévoit qu’à la demande d’une partie, le tribunal fournit la traduction en français ou en anglais des documents ou des actes de procédure rédigés dans l’autre langue lorsque déposés avant l’audience dans une instance devant la Cour de la famille de la Cour supérieure de justice, la Cour de justice de l’Ontario ou la Cour des petites créances.


Mais, dans les autres instances, qui est responsable de fournir la traduction des documents et des actes de procédure lorsque les parties civiles utilisent des langues officielles différentes?


Dans l’affaire Bolduc c. Pozzebon, la Cour supérieure de justice de l’Ontario et la Cour divisionnaire se sont penchées sur cette question. La demanderesse, qui est francophone, a intenté une poursuite judiciaire en Cour supérieure de l’Ontario à Toronto pour faire reconnaître son droit de propriété.


Elle a déposé ses actes de procédure en français. Les défendeurs, ainsi que leur avocat, ne parlaient pas le français. Ils ont demandé à la Cour d’ordonner à la demanderesse de traduire tous les documents et actes de procédure qu’elle avait déposés relativement à cette affaire.


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Le 6 juin 2005, la juge Wilson, de la Cour supérieure de justice de l’Ontario, a rejeté la demande des défendeurs.


Elle a indiqué que la Loi sur les tribunaux judiciaires (LTJ) n’exige pas que les documents déposés en français soient traduits en anglais. Plutôt, l’article 125 de la LTJ prévoit que le français et l’anglais sont les langues officielles des tribunaux de l’Ontario.


L’article 126 prescrit, entre autres, qu’une partie au litige peut déposer des actes de procédure et d’autres documents rédigés en français lorsque l’audience se déroule dans un des secteurs figurant à l’annexe II de la LTJ (la ville de Toronto est l’un de ces secteurs).


Les défendeurs ont alors présenté en Cour divisionnaire une requête en autorisation d’appel de cette décision. Ils soutenaient que la juge Wilson avait erré dans son interprétation des articles 125 et 126 de la LTJ. Ils alléguaient également que les articles 125 et 126 de la LTJ sont inconstitutionnels en ce qu’ils contreviennent aux articles 14, 15 et 16 de la Charte canadienne des droits et libertés.


Le 21 septembre 2005, le juge Carnwath, de la Cour divisionnaire, a rejeté la requête des défendeurs. Il a d’abord indiqué que les articles 125 et 126 de la LTJ n’obligent ni la Cour ni la demanderesse à fournir une traduction anglaise des documents et des actes de procédure déposés en français.


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Il a également déclaré que l’article 14 de la Charte, qui garantit le droit à l’aide d’un interprète pour les parties ou les témoins qui ne peuvent pas suivre les procédures, n’imposait pas en l’espèce l’obligation de fournir la traduction demandée par les défendeurs. En ce qui a trait à l’article 15 de la Charte, qui confère les droits à l’égalité, le juge s’est appuyé sur la décision de la Cour divisionnaire de l’Ontario dans l’affaire Montfort qui avait déclaré que «l’article 15 en soi ne peut donc pas être invoqué pour ajouter des droits linguistiques que la Charte n’a pas déjà accordés expressément» (cité avec approbation par la Cour d’appel de l’Ontario dans Lalonde c. Ontario (2001), 56 O.R. (3e) 577, au para. 96).


Finalement, le juge a écarté la prétention des défendeurs selon laquelle les articles 125 et 126 de la LTJ étaient contraires à l’article 16 de la Charte. Ce faisant, il a refusé aux défendeurs la permission d’appeler de la décision de la juge Wilson.


Cette décision favorable aux droits linguistiques des francophones a été obtenue grâce à la détermination d’une résidente de la Place Saint-Laurent: d’une famille de 9 filles et 5 garçons, Éveline Bolduc est née le 24 mai 1929 à Guigues, dans la région Abitibi-Témiscamingue, au Québec.


Elle a étudié au Manitoba avant de s’établir à Toronto. La photo ci-contre a été prise alors que, jeune étudiante, Éveline Bolduc fréquentait l’Institut collégial Saint-Joseph de Saint-Boniface.


Pour plus de renseignements:


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a) Requête des défendeurs Pozzebon:


http://documentationcapitale.ca/index.cfm?Repertoire_No=-751102913&voir=centre_detail&Id=4614

b) Avis de question constitutionnelle des défendeurs:


http://documentationcapitale.ca/index.cfm?Repertoire_No=-751102913&voir=centre_detail&Id=4615

c) Décision du juge Carnwath:


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http://documentationcapitale.ca/index.cfm?Repertoire_No=-751102913&voir=centre_detail&Id=4616

Auteur

  • Gérard Lévesque

    Avocat et notaire depuis 1988, ex-directeur général de l'Association des juristes d'expression française de l'Ontario. Souvent impliqué dans des causes portant sur les droits linguistiques. Correspondant de l-express.ca, votre destination pour profiter au maximum de Toronto.

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