La stimulation du cerveau: un traitement prometteur pour la dépression

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Publié 08/03/2016 par Atef Badji

L’une des fiertés des Canadiens est leur système de santé universel. Tous les citoyens et résidents permanents bénéficient d’une assurance-santé publique qui couvre la plupart de leurs soins. Cependant, lorsque l’on parle de soins de santé psychiatriques, le principe d’un système de santé universel semble être un objectif que les Canadiens peinent à atteindre.

Ce constat découle d’un simple calcul mathématique que Dr Jonathan Downar, psychiatre chercheur à l’hôpital de Toronto Western Hospital, a mis en avant en 2013 lors d’une conférence donné par l’Ontario Brain Institute. Sur une population de 35 344 000 Canadiens, 7 422 200 souffrent de troubles psychiatriques, pour seulement 4100 psychiatres spécialistes. Chaque psychiatre devrait donc voir plus de 1800 patients par an afin de pouvoir venir en aide à tout le monde. Avec le type de soins que fournissent les psychiatres de nos jours, c’est humainement impossible.

Le Dr Downar rêve tout haut d’une nouvelle ère en psychiatrie, où l’accès aux soins serait permis pour tous. Pour cela, il a monté au Toronto Western une clinique où il a établit un test de stimulation magnétique transcrânienne répétitive (rTMS) qui, à ce jour, est utilisé essentiellement pour le traitement des dépressions sévères résistantes aux traitements par médicaments.

Le cerveau comme une ville

Pour mieux comprendre la dépression, il est utile de penser aux activités cérébrales comme les voies de circulation d’une grande ville.

Le cerveau est composé de millions de neurones qui sont organisés en différent quartiers qui communiquent les uns avec les autres par le biais de différentes routes permettant de les unifier. Chaque quartier possède une fonction qui lui est propre. L’activité du cerveau est similaire au flux de circulation qui existe entre les différents quartiers.

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Dans le cas de la dépression, certains quartiers impliqués dans la régulation des émotions, des pensées et du comportement sont très occupés, entraînant de gros problèmes de circulation et empêchant le bon fonctionnement des voies et quartiers adjacents.

De façon schématique, la dépression ressemble aux embouteillages aux heures de pointe, aux niveaux de plusieurs voies d’accès aux différents quartiers, et ce en permanence. L’individu victime de dépression devient constamment envahi de pensées et sentiments négatifs.

Il n’existe pas beaucoup de pathologies dans le monde où l’individu préfère mettre fin à sa vie plutôt que de vivre avec sa maladie, où le poids de la vie efface tout espoir d’un lendemain meilleur.

Neurostimulation non invasive

Plusieurs thérapies et médicaments permettent de venir en aide aux personnes atteintes de dépression, mais un tiers de ces personnes ne voit pas leur état s’améliorer avec les traitements psychiatriques conventionnels, si bien que rTMS devient leur seule chance de rémission.

rTMS est une technique de neurostimulation non invasive du cortex cérébral qui consiste à générer un courant électrique très bref à travers une bobine posée sur le crâne sur une région spécifique d’une profondeur de deux à trois centimètres. Le passage du courant électrique très rapide le long de la bobine est capable de créer un champ électromagnétique qui traverse le crâne sans résistance.

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Il est possible d’utiliser des techniques d’imagerie IRM afin de guider l’opérateur à cibler la région qu’il veut atteindre.

Les résultats des différentes études démontrent que 50% des patients atteints de dépression ressentent une amélioration de leurs symptômes et 30% éprouvent une complète rémission.

rTMS a pour elle sa facilité de mise en œuvre et son caractère non invasif. Il y aurait une chance sur 10 000 d’avoir une convulsion, soit un nombre quasi similaire au risque couru par les antidépresseurs De plus, la plupart des patients tolèrent rTMS. Certains éprouveront toutefois quelques maux de têtes pendant une heure ou deux durant la première semaine de traitement.

20 à 30 jours consécutifs

L’ennui avec ce traitement serait probablement sa durée. En effet en thérapeutique, ce n’est pas l’effet survenant au moment de la stimulation qui est recherché mais un effet permanent, poursuivant après la stimulation. Pour cela il est nécessaire de stimuler de façon répétitive une certaine région du cerveau, et ce pendant 3 à 38 minutes selon le protocole pendant 20 à 30 jours consécutifs.

Il est important de ne pas confondre rTMS avec l’electroconvulsivo-thérapie (ECT), mieux connue par le grand public sous le terme d’éléctro-choc.

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La stimulation avec rTMS est localisée et n’entraîne aucune suspension de conscience, ni de mouvements cloniques (secousses) ou troubles cognitifs.

Le Dr Downar et son équipe cherchent à présent des moyens pour raccourcir la durée de ce traitement. Ainsi, plus de personnes pourront recevoir ce traitement. Son travail vise également à trouver des solutions pour améliorer le taux de réponse de rTMS notamment en ciblant différentes régions du cerveau.

Pas de miracle

Bien que ce traitement semble être très prometteur, il ne s’agit pas d’un traitement miracle.

En stimulant une région précise du cerveau, le Dr Downar et son équipe offrent la possibilité de restaurer un état mental de bien-être pour aider leurs patients à travailler sur eux-mêmes.

Il est peu probable qu’un individu atteigne une rémission complète s’il continue après son traitement à vivre dans les même conditions mortifères (par exemple: une relation de couple destructrice). Certains changements au quotidien doivent être entrepris.

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rTMS permet dans la plupart des cas d’avoir l’énergie nécessaire pour effectuer ces changements.

Grâce à de plus en plus d’études en neuro-imagerie, il a été possible de localiser une région du cerveau impliquée dans de nombreuses pathologies psychiatriques: le réseau de saillance («salience network»), impliquée dans le contrôle du comportement, des émotions et des aptitudes sociales.

En ciblant cette région du cerveau, de nombreuses études ont permis également de démontrer les bénéfices de rTMS sur d’autres pathologies telles que l’anorexie, la boulimie, l’addiction, les troubles obsessionnels compulsifs ainsi que les stress post traumatiques.

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