La science d’Avatar

Six ans pour atteindre Alpha du Centaure, les montagnes qui flottent, c’est plausible

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Publié 19/01/2010 par Pascal Lapointe (Agence Science-Presse)

Des montagnes qui flottent? Des plantes qui brillent? Des oiseaux assez gros pour servir de montures? Les producteurs du film Avatar  n’ont pas seulement laissé libre cours à leur imagination. Ils ont fait des efforts, d’une ampleur inhabituelle au cinéma, pour asseoir leur imagination dans le camp de la science.

Pandora, le monde où se déroule l’histoire, est une lune grouillante de vie, tournant autour d’une planète gazeuse géante (comme Jupiter). Cette planète, Polyphemus, occupe une large partie du ciel de Pandora, dans des proportions qui semblent réalistes.

D’emblée, l’idée de placer l’action sur une lune reflète l’évolution de l’astronomie ces 30 dernières années: les lunes de Jupiter et de Saturne se sont révélées si différentes de notre propre Lune que de nombreux experts évoquent désormais que la vie pourrait naître sur certaines lunes placées dans des conditions particulières, plutôt qu’uniquement sur des planètes.

Pas trop loin d’ici…

Le tout se passe autour d’Alpha du Centaure, la plus proche étoile, à 4 années-lumière et demie de nous. Il est précisé que le vaisseau a mis près de six ans pour y parvenir, ce qui signifie que les Terriens ne voyagent pas plus vite que la lumière. Donc, une technologie plus près de nous que celle des  Star Trek et Star Wars…

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De plus, les progrès récents rendent plausible de détecter Pandora… lit-on dans un communiqué du Centre d’astrophysique de l’Université Harvard!

C’est que depuis 12 ans, des télescopes ont permis de détecter la présence (mais pas de prendre en photo) de plus de 300 planètes autour d’étoiles autres que notre Soleil. D’ici 2020, on pourrait — en théorie — détecter autour de certaines de ces planètes la «signature» laissée par l’oxygène et la vapeur d’eau, s’il y en a.

Les bestioles qui brillent dans le noir!

Ça existe chez nous aussi, des créatures qui brillent — le terme savant est bioluminescence. Mais ce sont des cas exceptionnels, et la plupart vivent sous l’eau (pensez aux méduses). Alors que sur Pandora, ça semble être la norme.

S’agit-il d’un artifice du réalisateur qui a jugé que ça faisait joli? Peut-être, mais dans un «livre compagnon» du film, on découvre une explication scientifique: le fait que Pandora soit une lune.

Il faut savoir que les jours et les nuits d’une lune durent très longtemps: le temps d’une orbite (c’est ainsi qu’une nuit sur notre Lune dure 14 jours). Or, pourquoi la majorité des bestioles bioluminescentes chez nous se trouvent-elles sous l’eau?

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Parce qu’en l’absence de lumière solaire, l’évolution les a dotées de leur propre lumière. Donc, sur la lune Pandora, où les nuits sont longues, la nature se serait dotée «d’éclairages naturels»!

Petite gravité, grand Na’vi

La gravité sur Pandora est de 80% celle de la Terre. Cela explique que tout, à notre échelle, semble y être plus grand, des puissantes créatures au museau-marteau jusqu’aux immenses oiseaux — et bien sûr les Na’vi, humanoïdes de près de 3 mètres de haut.

La biologiste Sheril Kirshembaum s’enthousiasme du fait que l’un des principaux personnages, le Dr Grace Augustine, est non seulement un scientifique crédible, mais en plus une femme.

«Au lieu de la caricature typique que nous voyons à Hollywood, elle n’est pas socialement inepte ou en train de tout détruire. Grace transmet plutôt cette forme de curiosité à l’égard du monde, que j’observe souvent chez les collègues. Fait également notable, elle est financée par un programme ayant des intérêts corporatifs, mais utilise cette opportunité pour poursuivre ses propres recherches.»

Les montagnes qui flottent

Voilà à première vue l’élément le plus invraisemblable. Et pourtant, les producteurs ont fait un réel effort pour l’ancrer dans la réalité, en allant chercher un phénomène naturel méconnu, les supraconducteurs.

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Explication: on appelle supraconductivité un phénomène découvert en 1911, présent dans certains matériaux et seulement à de très, très basses températures (moins 272 degrés Celsius).

Un matériau devenu supraconducteur a perdu toute résistance électrique et repousse tout champ magnétique: en termes pratiques, cela lui permet de faire faire de la… lévitation. En effet, placez un aimant au-dessus d’un supraconducteur, et il restera suspendu: c’est le principe du train japonais à lévitation magnétique, le Maglev.

Ainsi, nous «expliquent» les auteurs du livre Avatar: A Confidential Report on the Biological and Social History of Pandora, c’est ce qui arrive aux montagnes Alleluia: elles sont en quelque sorte de gigantesques aimants suspendus au-dessus d’une région géologique de supraconducteurs.

Dit comme ça, c’est presque scientifique, mais il lui manque un autre élément, et c’est le fait, ici encore, que Pandora soit une lune autour d’une planète géante.

La présence de cette planète massive et des deux lunes voisines, poursuivent les auteurs Maria Wilhelm et Dirk Matheson, «produit un effet de marée» (la Lune en produit un avec la Terre, mais comme Polyphemus est géante, le sien est beaucoup plus puissant) qui accentue la dérive des continents.

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Et par «accentuer», on veut dire beaucoup plus de volcans et de masses continentales fracturées. Sauf qu’au lieu d’avoir une masse continentale qui dérive… elle s’élève dans les airs!

Intérêt économique

Le matériau supraconducteur en question est ce qui a attiré les Terriens là-bas: l’unobtanium, matériau capable de supraconductivité à la température de la pièce, ce qui le rend plus facile à exploiter.

Cela dit, les raisons pour lesquelles l’unobtanium serait devenu à ce point important pour l’économie du 22e siècle sont fort peu explicites. La seule construction de ces gigantesques vaisseaux spatiaux Terre-Pandora coûterait une fortune, et on voit mal comment un supraconducteur pourrait rentabiliser pareil voyage.

Par ailleurs, rappelle le blogueur Ray Villard, les «minerais exotiques» sont fréquents en science-fiction, mais pas en chimie: tous les éléments chimiques observés sur Terre se retrouvent ailleurs dans le cosmos, parce qu’ils sont forgés dans les étoiles. Il n’y aurait aucune raison de trouver un matériau en abondance sur une lune… et pas sur les lunes voisines!

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Mêler leur ADN au nôtre?

On croit comprendre que pour se mêler à la société des Na’vi, les humains ont conçu une technologie qui leur permet de «télécharger» leur conscience dans un des corps Na’vi construits sur mesure: ces corps contiennent un mélange de gènes des volontaires humains, et de gènes Na’vi.

Le gros problème ici, c’est que rien ne garantit que des extra-terrestres soient composés d’ADN. Et même si c’était le cas, des humains auraient plus en commun avec l’ADN du maïs ou de la mouche, qu’avec l’ADN du Na’vi.

Rien ne garantit non plus que les tours et détours de l’évolution, au fil des milliards d’années, auraient abouti, sur Pandora aussi, à un être intelligent composé de deux jambes, deux bras, deux yeux, deux oreilles. Mais ça, même les biologistes les plus réticents le reconnaîtront, ça rend le film plus intéressant que si le Na’vi avait été une pieuvre jaune orange…

www.sciencepresse.qc.ca

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