La rafle du Vel d’hiv porté à l’écran

Double vision de l’histoire

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Publié 09/08/2011 par Guillaume Garcia

La rafle du Vel d’hiv (pour Vélodrome d’hiver) reste dans les mémoires françaises pareil à une honte jamais vraiment pardonnée. La France, occupée par l’Allemagne nazie participe activement à la déportation des juifs vers les camps de concentrations et d’extermination situés plus à l’Est.

Lors de la rafle, environ 7000 juifs sont emmenés au Vel d’Hiv, dans le XVe arrondissement de Paris. Ils y restent quelques jours, sans eau ni nourriture, avant d’être transférés dans des camps.

Bien des années après la rafle, les séquelles sont encore présentes dans les cœurs de certains Français, mais aussi dans les histoires de familles. Elle s’appelait Sarah (Sarah’s Key), de Gilles Paquet-Brenner, film tiré du roman Elle s’appelait Sarah, retrace l’histoire juxtaposée d’une petite fille juive prise dans la rafle en 1942 et d’une journaliste américaine vivant à Paris, dans les années 2000.

La France a toujours eu du mal à accepter le fait que l’État ait collaboré avec les nazis, lors de la Seconde Guerre mondiale.

Pour preuve, le premier historien ayant osé affirmer que la France de Vichy a collaboré est américain et se nomme Robert Paxton.

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C’est peu dire s’il ne fallait pas s’attendre à ce que les Français mettent en scène un épisode aussi tragique que la rafle du Vel d’Hiv.

D’abord un livre

Pourtant, lorsque Gilles Paquet-Brenner tombe sur le roman de Tatiana de Rosnay, en 2007, il en achète les droits et se met au travail de réécriture du livre, pour le cinéma.

«J’ai rencontré Tatiana de Rosnay et cela c’est super bien passé», explique le réalisateur. «Au début, je n’ai même pas eu à faire de recherche sur la rafle, le livre de Tatiana étant très solide historiquement.»

Traité un sujet aussi sérieux comporte des risques certains, comme celle de tomber dans le mélodrame, faire pleurer dans les chaumières. Pour éviter ce piège, Gille Paquet-Brenner va rencontrer des survivantes de la rafle et ces vrais témoignages vont lui donner toute la dimension humaine qu’il souhaitait mettre dans le film.

«Tout ce ressenti, c’est ce qu’on recherche pour les films. Mais sur ce genre de sujet, il ne faut pas se rater, il ne faut pas faire de mauvais films, sinon on va dire que tu tires sur le filon larmoyant, facile…»

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Deux histoires parallèles

Elle s’appelait Sarah se caractérise par l’histoire parallèle que vivent Sarah et Julia, dans deux périodes différentes, l’une au moment de la rafle, l’autre au tournant des années 2000.
Paris, 1942, des policiers français viennent chercher la famille de Sarah, sa mère, son père et son frère. Elle s’empresse de cacher son petit frère dans un placard avant de se faire emmener.

Julia (Kristin Scott-Thomas) emménage dans un nouvel appartement, à Paris, appartenant à la famille de son mari depuis des années.

D’étranges coïncidences poussent Julia à remuer ciel et terre pour connaître la vérité, une vérité que tout le monde ne connaît pas et surtout ne veut pas connaître.

Entre 1942 et 2000, on suit la vie de ces deux femmes, à travers deux époques.

Volontairement, Gilles Paquet-Brenner a choisi de tourner les scènes de la période de guerre caméra au poing, comme dans l’urgence, éblouissantes de lumière et très bruyantes.

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Celles du début du XXIe siècle se révèlent beaucoup plus calmes, dans un pays riche, et en paix.

«On a beaucoup travaillé au scénario. Si cela ne marche pas en le lisant, ça ne marchera pas à la réalisation. Il fallait travailler fort les transitions, le rythme, et bien gérer que les thèmes des deux périodes se répondent bien.»

«Après il y a toujours une part d’inconscience pour toucher le spectateur. Mais le roman était facile à adapter, l’intrigue était déjà là, les personnages aussi, on a dû couper des scènes, faire des choix, mais dans l’ensemble ce n’a pas été très dur», développe le réalisateur.

Un passé douloureux

Acclamé l’an dernier lors de son passage au TIFF, Elle s’appelait Sarah s’appuie sur des faits historiques célèbres, un scénario solide, mais également des comédiens sérieux, comme Kristin Scott-Thomas, Niels Arestrup ou encore Michel Duchaussoy.

Sorti coup sur coup avec un autre film traitant du même sujet, La Rafle, de Rose Bosch, Elle s’appelait Sarah a le mérite de parler d’un sujet présent dans les livres d’histoire, mais peu dans le souvenir français.

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Ce n’est qu’en 1995 que Jacques Chirac, le président de la République française de l’époque reconnaîtra enfin la responsabilité de l’État français dans la rafle du Vel d’Hiv, dans un discours prononcé devant un monument commémoratif aux victimes de la rafle.

Un extrait du discours est présent dans le film Elle s’appelait Sarah:«Ces heures noires souillent à jamais notre histoire, et sont une injure à notre passé et à nos traditions. Oui, la folie criminelle de l’occupant a été secondée par des Français, par l’État français. Il y a cinquante-trois ans, le 16 juillet 1942, 4500 policiers et gendarmes français, sous l’autorité de leurs chefs, répondaient aux exigences des nazis. Ce jour-là, dans la capitale et en région parisienne, près de dix mille hommes, femmes et enfants juifs furent arrêtés à leur domicile, au petit matin, et rassemblés dans les commissariats de police. (…) La France, patrie des Lumières et des Droits de l’Homme, terre d’accueil et d’asile, la France, ce jour-là, accomplissait l’irréparable. Manquant à sa parole, elle livrait ses protégés à leurs bourreaux.»

* * *

AZ Films et L’Express vous invitent à la première torontoise du film Elle s’appelait Sarah: jeudi 18 août, à 19h, au cinéma Varsity à Toronto (quartier Bay & Bloor).
10 paires de billets à gagner! Il suffit d’appeler au 416-465-2107 pour vous inscrire sur la liste.

Auteur

  • Guillaume Garcia

    Petit, il voulait devenir Tintin: le toupet dans le vent, les pantalons retroussés, son appareil photo en bandoulière; il ne manquait que Milou! Il est devenu journaliste, passionné de politique, de culture et de sports.

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