La dérive de Droits et Démocratie nécessite une mise sous tutelle

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Publié 16/02/2010 par Gaëtan Beauregard (Frère de Rémy Beauregard)

Défendre les droits humains et le droit à la démocratie des plus démunis de la planète est un objectif en soi que Droits et Démocratie, à cause de ses moyens limités, ne peut pas attaquer de front sur tous les continents.

Pourtant, on voit bien par le rayonnement des projets menés par l’organisme depuis sa création, qu’il a tenté d’atteindre ce noble objectif. Le décès de Rémy a révélé au grand public que cet objectif était contesté de l’intérieur par certains membres du Conseil d’administration.

Et voici que les valeurs intrinsèques de Droits et Démocratie semblent bafouées par les personnes mêmes qui devraient être les premières à les défendre, c’est-à-dire les membres de son Conseil d’administration.

Plusieurs questions sont en jeu: l’indépendance d’un organisme comme Droits et Démocratie, l’inconsistance de la Politique du gouvernement du Canada vis-à-vis des groupes dits humanitaires et le devoir de respect à la mémoire de son ex-président, mon frère.

La gestion indépendante de Droits et Démocratie constitue à mon avis un enjeu majeur. Il est bien évident que lorsque le ministre des Affaires étrangères affirme que le Conseil d’administration agit de façon indépendante alors que le gouvernement nomme dix des treize membres de cedit Conseil, laisse pour le moins dubitatif.

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Sous la rubrique «Qui sommes-nous?» du site web de Droits et Démocratie, les grandes orientations et objectifs de l’organisme et les groupes cibles sont clairement définis.

Mais voilà que des membres du Conseil d’administration d’un organisme qui combat la discrimination, pratiquent eux-mêmes une espèce de profilage politique, à titre d’exemple, entre droits des femmes en Palestine et droits des femmes ailleurs.

Quand un conseil d’administration a établi les grandes orientations d’un organisme, il doit par la suite laisser l’appareil administratif gérer ces orientations par l’intermédiaire des programmes de l’organisme. C’est cela la véritable imputabilité d’un organisme indépendant. Pas que du vernis!

On voit bien dans le cas présent que des membres du Conseil ont sans gêne fait main basse sur la Régie interne et la gestion des programmes. La nomination de Jacques Gauthier comme président intérimaire est une preuve flagrante du désir d’inféoder cette agence.

Son détournement par le Conseil, en nommant un des siens à la direction interne de l’organisme, révèle sa ferme intention de dicter au personnel une application biaisée des programmes à partir de sa vision, ou serait-ce plutôt de la vision politicienne du gouvernement.

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C’est à se demander si le gouvernement a une authentique politique de soutien et de financement des groupes humanitaires: on joue d’un côté les droits des Palestiniens démunis de la bande de Gaza et de l’autre la souveraineté de l’État d’Israël.

Certains membres du Conseil d’administration s’interdisent cette réalité et y voient une incompatibilité, refusant de financer Al Haq et Bt’selem, deux groupes membres de la Fédération internationale des ligues des Droits de l’homme, qui en garantit l’authenticité et le professionnalisme.

Il y a une contradiction flagrante dans la politique du gouvernement puisque ces deux organismes ont reçu par le passé du financement de l’ACDI. Ou bien le gouvernement, à visière levée, par l’intermédiaire de son ministre des Affaires étrangères, déclare franchement ces organisations inadmissibles à tout financement de la part du gouvernement canadien et de ses agences en regard de la politique étrangère canadienne, ou non.

Ses critères devraient être clairement et publiquement énoncés et appliqués de manière cohérente. Cette clarification est urgente et nécessaire.

Le respect dû à la vérité et la mémoire d’un homme qui n’est plus là pour se défendre exigent un minimum de décence. En lisant certains commentaires parus dans la presse, on entrevoit la dernière fournée d’un conseil d’administration émasculé, prêt à laisser sous-entendre que mon frère avait pratiqué une gestion nébuleuse et secrète.

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On dit même et que deux évaluations professionnelles contradictoires circulaient à son sujet, l’une très positive et l’autre mettant en doute ses compétences en tant que gestionnaire, et alléguant qu’il aurait agi sans avoir toutes les approbations requises!

Si tel est le cas, je ne connais pas cet homme. Car c’est tout le contraire, Rémy était depuis longtemps reconnu pour être un gestionnaire hors pair, un homme droit, qui informait, écoutait, respectait les règles et sa hiérarchie, et agissait. Parlez-en à son personnel désormais bâillonné.

Le Conseil d’administration avait deux choix suite à la mort de mon frère et aux révélations des problèmes d’identité et d’orientation que vivait Droits et Démocratie.

La première voie était celle de l’apaisement. Au nom de son devoir de réserve, il aurait pu demander au ministre des Affaires étrangères de nommer un fonctionnaire/diplomate de carrière pour assurer l’intérim, comme ce fut le cas entre le départ de Jean-Louis Roy et l’arrivée de Rémy Beauregard.

Cette voie aurait permis aux intéressés, et d’abord au gouvernement lui-même, de calmer le jeu, et aux parties vraiment soucieuses d’un organisme phare de s’exprimer, et au besoin de clarifier le mandat de Droits et Démocratie et de désigner un président en mesure de faire consensus. Le simple bon sens aurait largement abondé dans cette direction.

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Hélas, des administrateurs à courte vue ont préféré lancer l’organisme droit dans le mur de la confrontation, de la dénonciation et de la peur.

Cela a donné l’abolition intempestive et irréfléchie de programmes, un président faible et affaibli issu du Conseil d’administration. Bref, Droits et Démocratie discréditée et indigne de respect.

Dans ces circonstances, le ministre des Affaires étrangères, Lawrence Cannon, n’a guère le choix s’il croit vraiment à l’utilité, à la nécessité de cet organisme qui nous fait honneur partout sur la planète que de le mettre sans délai sous tutelle et de mettre en place un comité d’enquête indépendant chargé de le remettre sur les rails.

Il est donc dans l’intérêt de tous d’exiger que le gouvernement agisse rapidement, publiquement et impartialement.

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