La Cantatrice chauve: le Théâtre français de Toronto revisite un grand classique

Entretien avec la metteure en scène Chanda Gibson

La distribution de La Cantatrice chauve au TFT: Sophie Goulet, Pierre Simpson, Sébastien Bertrand, Manuel Verreydt, Geneviève Langlois, et au centre Christina Tannous.
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Publié 15/10/2019 par Mélissa Salé

Si vous aimez le théâtre français, et surtout le théâtre de l’absurde, vous serez ravis! La Cantatrice chauve, première pièce du célèbre dramaturge français Eugène Ionesco, écrite en 1950, va vous être présentée au Théâtre français de Toronto du 23 octobre au 3 novembre, dans une mise en scène de Chanda Gibson.

Une mise en scène originale

La Cantatrice chauve, un grand classique qui détient le record du monde de longévité dans un théâtre parisien, a été mise en scène de nombreuses fois.

Mais Chanda Gibson ne s’inspire pas de ce qui a déjà été fait. «Je ne peux pas monter un spectacle de cette façon-là parce que je ne serai pas authentique à ma vision ou à qui je suis comme artiste», explique-t-elle à L’Express.

La metteure en scène Chanda Gibson a reçu le prix Dora Mavor Moore en 2019, pour sa mise en scène des Zinspirés.

Elle a préféré laisser libre cours à son imagination en ne regardant aucune mise en scène de la pièce. «Je suis allée me ressourcer d’images qui m’inspiraient dans des bouquins, dans des revues. […] On travaillait avec des formes et on s’inspirait de ça. Donc des choses plus abstraites au lieu d’aller pêcher dans du concret qui a déjà été fait. Il y avait des tissus, des couleurs qui m’inspiraient».

Chanda Gibson réserve d’ailleurs une surprise au public, puisqu’elle a décidé d’approfondir la métaphore de la cantatrice chauve par rapport au texte original d’Eugène Ionesco. Sans entrer dans les détails, disons seulement qu’elle a apporté «une dimension unique à notre spectacle, qui, je pense, n’est pas dans une autre production».

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La Cantatrice chauve détient le record du monde du nombre de représentations sans interruptions d’une pièce de théâtre dans une même salle, étant jouée depuis 1957 au théâtre de la Huchette à Paris. Elle a aussi été jouée maintes fois ailleurs.

Une pièce intemporelle

L’histoire, qui se déroule dans une maison bourgeoise de Londres avec des personnages aux propos loufoques, est ancrée dans le registre de l’absurde du XXe siècle. On pourrait donc croire, parce que La Cantatrice chauve date de 1950, que celle-ci n’est plus au goût du jour.

Or, cette pièce ou «anti-pièce», qui avait pour but de dénoncer le conformisme bourgeois de l’époque et plus largement les structures «acceptables» en société, ne serait pas si éloignée de notre époque.

«Le commentaire politique de Ionesco est toujours présent aujourd’hui, quand on pense aux politiques américaines. Ionesco fait aussi le commentaire sur le langage et la déconstruction du langage. Aujourd’hui on a la même chose quand on pense au langage sur internet, les textos… tout est déconstruit.»

La Cantatrice chauve a aussi été éditée dans plusieurs formats.

Un espace fictif

Pour faire en sorte que la pièce ne soit pas trop éloignée de nous, la metteure en scène a opté pour une mise en scène hors du temps, en créant «un espace fictif».

Entre deux portes, quatre fauteuils, aucun mur, une horloge qui ne fonctionne pas et une cheminée, Chanda Gibson a créé «un univers unique qui flotte dans le temps… On ne sait pas si on est dans le présent, dans le passé ou dans le futur proche. Ça rapproche la pièce des spectateurs d’aujourd’hui.»

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Sébastien Bertrand et Christina Tannous (le pompier et la bonne) au TfT.

Un honneur et un défi

Chanda Gibson a joué dans de nombreuses pièces de théâtre et films, et a aussi mis en scène durant trois ans les créations des Zinspirés. au TfT. Mettre en scène une pièce d’Eugène Ionesco a cependant été un vrai défi, mais aussi une grande joie pour elle.

Quand on lui a proposé de mettre en scène La Cantatrice chauve, «je me suis sentie très privilégiée, très choyée, très touchée par l’offre de Joël Beddows (le directeur artistique du TfT). C’est une pièce que j’ai étudiée à l’université et qui a un peu changé ma vision du théâtre. Mais j’avais aussi la trouille, parce que c’est une pièce qui est très jouée, qui est hyper connue.»

Geneviève Langlois et Manuel Verreydt (Mme et M. Smith)

Chanda Gibson a plus d’une corde à son arc grâce à ses expériences passées. «Le fait que Joël m’a donné le projet des Zinspirés m’a beaucoup aidé dans ma démarche artistique et à trouver qui je suis comme metteur en scène, ma voie, mon esthétique. Si je n’avais pas fait tout ce que j’ai fait dans mon métier, je serai très mal équipée pour monter cette pièce-là.»

La Cantatrice chauve revêt une dimension spéciale pour la metteure en scène, car il s’agit de son dernier projet avant de démarrer «un beau projet de vie»: celui d’être maman. «Pour moi c’est spécial, parce que j’ai l’impression d’accoucher d’un bébé qui est la cantatrice, et six semaines plus tard, si tout va bien, je vais accoucher de mon premier bébé.»

Sophie Goulet et Pierre Simpson (Mme et M. Martin)

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