Inquiétudes sur le partage d’ambassades entre Ottawa et Londres

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Publié 25/09/2012 par Fannie Olivier (La Presse Canadienne)

à 18h18 HAE, le 24 septembre 2012.

OTTAWA – Le partage de certaines ambassades entre le Canada et le Royaume-Uni n’est qu’une «petite entente administrative» selon le gouvernement de Stephen Harper, ce qui n’empêche pas l’opposition de craindre qu’Ottawa abdique ainsi une partie de sa souveraineté.

Le ministre des Affaires étrangères du Canada, John Baird, et son homologue britannique, William Hague, ont annoncé lundi un plan visant à diminuer les coûts de leurs délégations à l’étranger en partageant certains locaux.

Le Canada étendra de cette façon sa portée diplomatique en s’impliquant dans des pays où il est absent et vice-versa.

«Dans certains endroits, cela permettra simplement à nos diplomates de faire leur bon travail plus rapidement et à un coût moindre à l’égard des contribuables canadiens», a fait valoir le ministre Baird.

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Il a cité en exemple le cas de l’ambassade canadienne en Haïti, qui accueillera des diplomates du Royaume-Uni, parce que ce pays n’y détient pas de bureaux. En échange, les Britanniques feront preuve de la même hospitalité en Birmanie à l’égard des Canadiens.

Mais plusieurs questions restent en suspens. Dans combien de pays se fera une telle colocation? Combien de drapeaux flotteront devant les édifices? C’est précisément ce flou qui agace les partis d’opposition.

«En vertu de cette entente, la Grande-Bretagne serait de facto le visage du Canada dans le monde», a lancé le chef néo-démocrate Thomas Mulcair à la période de questions.

«La politique étrangère du Canada sera difficilement distinguée de celle des Britanniques. Dans ces conditions, comment les conservateurs peuvent-ils prétendre que le Canada pourrait conserver une voix forte et indépendante dans le monde? C’est bien beau la nostalgie du grand « British Empire », mais il y a tout de même des limites!», a-t-il ironisé.

Ce scénario a rapidement été qualifié de «ridicule» par le ministre Baird, qui a assuré qu’Ottawa demeurera maître de se politique étrangère.

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Le chef libéral intérimaire Bob Rae a pour sa part conclu que cet arrangement spécial avec allait faire en sorte que le Canada sera encore moins présent qu’il ne l’est actuellement sur la scène internationale.

«Le rôle du Canada dans le monde, il me semble, avec le gouvernement de M. Harper (…) devient de plus en plus petit», a-t-il déploré.

Le Canada partage déjà des services diplomatiques et consulaires avec d’autres pays. L’Australie, par exemple, offre son soutien aux ressortissants canadiens dans certains États du Sud-Est asiatique. Plus récemment, le ministre italien des Affaires étrangères, Giulio Terzi, a indiqué que l’Italie prendrait le relais des intérêts canadiens en Iran après la décision d’Ottawa de fermer son ambassade à Téhéran.

Selon Michel Duval, ancien ambassadeur du Canada et président de l’Observatoire sur les missions de paix et opérations humanitaires de la Chaire Raoul-Dandurand de l’UQAM, ce qui distingue l’entente avec le Royaume-Uni des accords précédents conclus avec d’autres pays est l’exercice de relations publiques qui l’entoure.

«Ce qui est nouveau, c’est qu’on annonce cet arrangement comme une façon de diminuer les coûts», a-t-il noté.

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En français?

Le gouvernement conservateur a indiqué qu’il n’allait pas fermer d’ambassade ou de consulat canadien en vertu de la nouvelle entente. L’opposition s’inquiète malgré tout de l’accessibilité à des services en français pour les ressortissants canadiens francophones qui devront se rendre dans ces locaux partagés.

«Est-ce que par exemple les dossiers de passeport risquent d’être traités dans des ambassades britanniques où il n’y a pas forcément quelqu’un qui parle la langue de Molière?», a demandé l’ancienne diplomate et députée néo-démocrate Hélène Laverdière.

M. Baird a assuré que l’entente ne changerait rien à la donne actuelle en matière de langues officielles. Mais selon la députée bloquiste Maria Mourani, il faudra le voir pour le croire.

«Pour l’instant, au niveau de la langue, le gouvernement ne nous a pas démontré grand chose. On l’a vu avec les nominations qu’il a faites», a-t-elle illustré, en référence notamment au choix de l’unilingue anglophone Michael Ferguson au poste de vérificateur général.

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