Fixer le temps… aux années 80

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Publié 16/01/2007 par Dominique Denis

Je dois reconnaître qu’au début, j’ai eu du mal à comprendre l’engouement suscité par Dumas, qui s’est imposé au rang des incontournables de la pop québécoise.

Et Fixer le temps (Tacca/Sélect) n’a pas dissipé le doute: s’il semble d’abord terni par une sonorité pâteuse, qui détone de la plupart des productions actuelles, cet opus 3 est de ces albums dont il convient d’apprivoiser les climats au fil des écoutes.

Une fois l’oreille accoutumée au flou sonore dans lequel baignent voix et paroles, on découvre une généreuse proportion de chansons au charme insidieux, qui n’attendent que les grandes salles – et le grand public – pour se déployer tout à fait.

Et avec son parti pris fin 70’s/début 80’s (façon Bowie, qui reçoit un hommage sur De station en station, ou façon Étienne Daho, si vous préférez les références françaises), Fixer le temps n’a de foncièrement québécois que sa provenance, ce qui devrait faciliter les aspirations internationales – ou, tout le moins, hexagonales – de Dumas.

L’accroche oreille

Si Dumas est le nouveau maître dans l’art de titiller notre nostalgie des années 80, alors D’Arcy (Sylvain, de son prénom) s’impose comme le plus fort au chapitre des chansons qui, par un savant alliage d’accords et de mélodies (auquel les anglophones ont donné le nom de «hook»), nous accrochent dès la première écoute comme si elles avaient toujours fait partie de notre quotidien.

Certes, Ma veste (Trilogie Musique/Sélect) ne défriche pas de terrain vierge (la chanson titre, par exemple, plagie carrément Daniel Bélanger) et les textes de D’Arcy oscillent entre la psychologie de lignes ouvertes et le journal intime d’ado hypersensible («On aurait dû s’écouter/On aurait pu apprendre à s’encourager dans les moments durs»), mais en matière de pop, une mélodie tonique et bien ficelée fait pardonner beaucoup de lieux communs, et l’on peut espérer que notre homme a encore des tas de succès en puissance dans son sac de chansons.

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À voir et à connaître

À l’opposé des deux albums précités, Ni vue ni connue (Caroline Productions/Interdisc Distribution) est du genre qui privilégie clairement l’écriture, au point où l’on peut dire que la musique y joue un rôle de soutien ou, si vous préférez, de décor.

Marie Cherrier a la plume éloquente et volubile (imaginez Lynda Lemay en plus subtile et moins nunuche), et quand ses chansons empruntent un tempo de valse pour brosser une tranche de vie ou poser un regard inhabituel sur des sujets galvaudés (comme cette fille qui se transforme en oiseau pour voir, entre les branches de l’arbre où elle est perchée, son amoureux la trahir, et qui trouve le moyen de se réjouir de leur bonheur), alors on croit être en présence de l’équivalent féminin du Renaud des premières années, l’humour – et le verlan – en moins.

De là à la comparer à Brassens, comme certains l’ont fait, il y a une marge, mais il n’empêche que Ni vue ni connue augure drôlement bien, quand on sait que l’album a été enregistré alors que Marie n’avait que 19 ans.

Un bémol, cependant, et pas des moindres: tant que Marie n’aura pas élargi son vocabulaire musical (toutes ses chansons semblent bâties autour de trois accords et quatre notes), elle se condamnera à réécrire 30 fois la même chanson, ce qui ne rendrait pas justice à une plume déjà capable de fort jolies choses.

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