Fin du système hétérogène dans les écoles francophones en Colombie-Britannique en 2021: ça grince des dents

L’École élémentaire du Pacifique à Sechelt. Photo: gracieuseté de Ione Smith
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Publié 22/08/2020 par André Magny

Le jugement de la Cour suprême disait clairement en juin dernier que les élèves francophones de la Colombie-Britannique avaient le droit de recevoir une éducation équivalente à celle que reçoivent leurs camarades anglophones. En principe, tout le monde devrait être content. Et pourtant…

À la suite d’une réunion virtuelle extraordinaire du conseil d’administration du Conseil scolaire francophone de la Colombie-Britannique (CSF) tenue le 30 juin dernier, il a été décidé par 4 voix contre 3 que le système hétérogène (des écoles françaises offrant certains cours en français et d’autres en anglais) devait céder sa place à un système homogène (tous les cours en français) d’ici septembre 2021.

La prochaine rentrée scolaire marquera donc en Colombie-Britannique la dernière année du système hétérogène. En Ontario, un tel système d’entités francophones dans des écoles anglaises ou d’écoles partagées a disparu il y a plus de 20 ans avec la création des conseils scolaires de langue française.

Le CSF était ravi de voir que dorénavant, «les parents de Sechelt, de Nanaimo, de Prince George, de Powell River, de Campbell River, de Nelson, de Penticton et de Revelstoke» auront droit «à bien plus que deux ou quatre cours en français».

De plus, on apprend que «le conseil d’administration du CSF a mandaté ses cadres d’améliorer l’expérience éducative qui y est offerte».

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Manque de consultation?

«Le système homogène est la meilleure éducation qu’on puisse offrir à nos enfants», estime la directrice générale de la Fédération des parents francophones de la Colombie-Britannique (FPFCB), Marie-Andrée Asselin. «Le petit bémol, c’est qu’on aurait aimé être consulté.»

Le CSF semble avoir pris seul la décision du calendrier menant à la dissolution du système hétérogène.

Marie-Pierre Lavoie, présidente du Conseil scolaire francophone de la Colombie-Britannique, et Suzana Straus, présidente de la Fédération des parents francophones de la Colombie-Britannique, ce 12 juin 2020. Photo: CSFCB

Ione Smith est mère de famille et engagée au sein de sa communauté francophone. Elle est présidente de l’Association des parents de l’École du Pacifique et du programme francophone du Chatelech. Elle habite à Sechelt. Elle aussi est déçue de la façon dont le CSF s’est comporté avec les parents.

«Qu’on me comprenne bien, on a le même but. Donner le meilleur à nos enfants», affirme-t-elle. «C’est la façon dont le CSF a pris sa décision qui nous dérange. On n’a pas été consulté.»

À Sechelt, selon Mme Smith, il y a 32 familles francophones comptant environ 55 enfants. Mme Smith se demande ce que feront les élèves francophones si les écoles ne sont pas construites d’ici septembre 2021.

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Milieu anglais mieux nanti

Dans une lettre adressée à la présidente du conseil d’administration du CSF, Marie-Pierre Lavoie, Ione Smith fait part des craintes qui habitent les parents. «Nous craignons en fin de compte, dit-elle, que si les parents (ou les jeunes) ont à choisir entre un programme tout en français dans un milieu éducatif limité, et un programme anglophone dans un milieu plus riche socialement et académiquement…»

«Ils risquent fort d’opter pour cette deuxième option.»

Cela affaiblirait évidemment le nombre de diplômés en français. Une solution? «Au lieu de viser un programme homogène séparé du reste des élèves de leur groupe d’âge», explique-t-elle, «nous trouverions beaucoup plus judicieux que le CSF cherche à améliorer le programme hétérogène qui existe actuellement, en cherchant en particulier à étendre le nombre de cours qui y sont offerts en français.»

Aux parents qui disent qu’ils auraient aimé être consultés avant la mise en place de cette nouvelle structure, que répond le CSF? Rien. Malgré des demandes répétées d’entrevues et en dépit du retour de vacances de certains membres du CA, la réponse fut toujours la même: «Il ne sera pas possible de faire des entrevues.»

S’investir dans le système hétérogène

Élise Therrien a obtenu son diplôme d’études secondaires au début de l’été. Elle fréquentait à l’École secondaire de Nanaimo – la Nanaimo District Secondary School. Elle y a connu le système hétérogène. Ils étaient 50 francophones au sein d’une école de 1 500 élèves. La cohorte de finissants comptait 7 élèves.

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Ça ne l’a pas traumatisée. «Moi, j’ai vraiment aimé ça», raconte-t-elle, «mais personnellement, j’étais impliquée dans le conseil étudiant de l’école au complet et dans le conseil étudiant francophone… En plus, les francophones, on avait chacun notre ordi, un Mac Book fourni par le CSF, mais pas les anglophones.»

Celle qui poursuivra ses études à l’Université de Victoria en biologie était aussi active dans quelques équipes sportives de son école.

Élse Therrien. Photo: Edge Imaging

Embauche de nouveaux enseignants

Quand on aborde la question de la fin du système hétérogène, deux questions viennent à l’esprit d’Élise: « Y aura-t-il assez d’élèves francophones dans le système homogène et y aura-t-il suffisamment de profs pour enseigner en français toutes les matières?»

Pour le président du Syndicat des enseignantes et enseignants du programme francophone de la Colombie-Britannique (SEPF), Stéphane Bélanger, il n’y a pas d’inquiétudes pour ceux et celles qui viendront après elle. «Il y aura plus d’enseignants à embaucher, et ce, dans tous les domaines», répond-il.

Et avec des plus petites classes? «Sans doute. Ça risque d’être des belles tâches.»

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Cependant, le gouvernement de la Colombie-Britannique aura-t-il assez d’argent pour construire de nouvelles écoles pour des petites classes? «Le jugement de la Cour suprême a statué que la question d’argent ne pouvait être évoquée pour ne pas construire d’écoles francophones!», rétorque le syndicaliste, somme toute optimiste face à l’avenir.

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