Si d’aucuns pensent que la vie n’est qu’un rêve, et le monde, un vaste théâtre, Marie Brassard, elle, vient puiser dans ses songes la matière première de ses spectacles.
Pendant deux ans, l’actrice montréalaise a méticuleusement répertorié ses rêves un à un, prenant soin de les écrire dans un cahier posé près du lit, afin qu’ils ne s’envolent pas une fois le petit matin venu. Ce travail de géomètre, méticuleux et précis, a donné naissance à Jimmy, créature de rêve, une fable onirique troublante et débridée, présentée au Buddies in Bad Times Theatre jusqu’au 18 décembre prochain.
«Les histoires qui prennent vie sur scène ont comme point de départ des rêves très complexes qui avaient souvent un rapport avec la politique, avec l’histoire. Ce n’était pas toujours des rêves qui avaient trait aux émotions, aux choses vécues dans la journée», affirme l’actrice, parlant de sa création et rejointe quelques heures avant de monter sur scène. «Parfois, je me rendais compte que tout alimentait mes rêves, autant ce que j’avais lu dans le journal ou ce que j’ai pu voir aux nouvelles. Je trouvais ça extrêmement fascinant. J’ai donc décidé de faire quelque chose à partir de ça.»
Dans la pièce écrite, conçue et interprétée par Marie Brassard, ce quelque chose est Jimmy, un coiffeur homosexuel new-yorkais né à 33 ans dans le rêve d’un général américain la nuit précédant son départ pour la guerre de Corée. «Quand j’étais petite, je me demandais souvent si les gens à qui l’on rêve se mettent à exister quelque part simplement parce que l’on pense à eux».
En montant son spectacle Jimmy, créature de rêve, Marie Brassard a trouvé la réponse à sa question. Jimmy est à la fois adulte et enfant, en apparence mi-homme mi-femme, mais en réalité ni l’un ni l’autre, tout juste un rêve éveillé suspendu dans l’univers pendant 50 ans jusqu’à ce qu’une jeune actrice montréalaise ne vienne l’imaginer et, ce faisant, lui redonne vie à son tour. Étrange avez-vous dit?