Un titre, ça peut être aussi facétieux qu’un slogan publicitaire: un coup de ciseaux au bon endroit, et une expression idiomatique (mettre du cœur au ventre) prend un tout autre sens. Ou encore, un habile rapprochement de mots, et surgit alors un sens inattendu: c’est le principe même de l’usage poétique du langage, fait essentiellement de surprise sémantique.
Chez Daniel Soha, titre et sous-titre sont apprêtés de façon à produire une suggestion gustative forte – quelque chose comme un coup d’œil qu’on irait jeter dans la cuisine d’un resto grec, comme un couvercle qu’on y soulèverait. Et tout de suite ça sent bon: un capiteux fumet qui vous fait saliver d’abondance.
D’ailleurs, ça tombe bien: la nappe est mise sur la belle illustration de Jerome Couëlle, Waiting for the Host, qui orne la couverture du livre. Une nappe à petits carreaux bleus (défiant la perspective) avec un gros bouquet de fleurs des champs (excentré avec désinvolture). Et partout, dessus, dessous, de curieux petits animaux sympas comme tout.
Ouvrez le livre, vous y trouverez d’abord des affaires de cœur. Celui de Soha, à n’en pas douter, est un vrai cœur d’artichaut car notre auteur s’amourache d’une ribambelle de gens à célébrité variable.
C’est Gainsbourg, de qui il dit avoir reçu, dans les années 50, «le choc de la tristesse avec Le Poinçonneur des Lilas et avoir entendu L’Eau à la bouche en pensant au chocolat». C’est Touti. Vous ne le connaissez pas? «Touti, c’était un Espagnol… d’origine, quoi, comme beaucoup.»