De plus en plus, les pays africains tiennent des élections, à l’image des démocraties modernes. RDC, Mauritanie, Togo, Tchad, Cameroun, Burkina Faso… La liste est longue et les résultats ne sont pas partout probants. Condition indispensable à l’aide internationale, la démocratie est-elle vraiment exportable en Afrique?
Tout Africain naît démocrate, croit dur comme fer Mamady Nabé, un Guinéen du Québec. Il en veut pour preuve le bol partagé lors des repas ou encore le fameux arbre à palabres, la variante africaine traditionnelle du parlement: «Que veut-on dire par démocratie?», demande l’homme d’affaires de 39 ans. Ce qu’on a amené en Afrique et qui a engendré des guerres civiles, c’est une autre forme de colonisation. Pas la vraie démocratie.»
Il n’est pas le seul à s’interroger. Aziz Fall, politologue d’origine sénégalo-égyptienne dans deux universités montréalaises, s’insurge contre la croyance «qui veut faire de la démocratie un monopole occidental en niant son existence ailleurs». Il reproche aux élites africaines d’oublier les modes de régulation traditionnels. «L’idée de transition démocratique est une aberration, affirme M. Fall. La démocratie est un processus inhérent aux populations et ne s’exporte pas!»
Pas si sûr, estime de son côté Mamadou Gazibo, professeur de sciences politiques à l’Université de Montréal. Selon lui, la démocratie peut s’adapter à n’importe quel contexte, à condition qu’elle soit en prise réelle avec la société.
Mais pour ce Nigérien d’origine, pas de «prêt-à-porter» dans le domaine: «Il est impossible d’implanter un modèle démocratique sans tenir compte de la diversité. Ce qui est concluant au Mozambique ne le sera pas nécessairement au Togo. Et vice-versa.»