Europe: l’entente entre les gouvernements souvent malmenée par les électeurs

L'Union européenne pour les nuls...

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Publié 22/07/2008 par Vincent Muller

L’Irlande a récemment refusé le traité de Lisbonne qui avait pour but de modifier le traité sur l’Union européenne et le traité instituant la Communauté européenne.

En Europe, les institutions européennes et les enjeux de l’Union européenne (UE) ne sont pas toujours compris. Les points de vue sur ce qu’est et sur ce que devrait être l’UE sont régulièrement sujets à polémiques. Si les choses ne sont pas toujours claires pour les Européens, elles le sont probablement encore moins vu d’ici.

La non-ratification du traité de Lisbonne par l’Irlande est donc l’occasion d’apporter un éclaircissement sur l’évolution de l’Union Européenne.

Référendum risqué

Les procédures de ratifications varient selon les pays. Bien qu’appartenant à l’UE, ils conservent une législation et une constitution qui leur sont propres. En Irlande, la décision appartenait aux électeurs. Ils se sont prononcés sur la question par référendum le 12 juin dernier. Résultat: «non» au traité à 53,4% des voix. Coup dur pour la construction européenne.

Les tentatives d’explication du «non» sont diverses. Les agriculteurs irlandais, qui bénéficient assez largement de la Politique Agricole Commune (PAC), auraient craint de perdre leurs avantages dans une UE où les décisions ne seraient plus prises à l’unanimité mais à la majorité.

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Le nouveau traité semble en effet assouplir la règle de l’unanimité qui donne un droit de veto à chaque pays membre. Une peur de perte de puissance de l’Irlande aurait suscité la méfiance. La diminution du nombre de commissaires européens, au nombre d’un par pays actuellement, risquait selon certains de désavantager les pays à faible démographie comme l’Irlande. On a aussi évoqué la crainte de l’imposition par l’UE de politiques fiscales susceptibles de décourager l’activité économique du pays.

D’autres évoquent également la pression médiatique en faveur du «oui» qui aurait produit l’effet inverse, ou encore le manque d’information sur le traité.

Il y a déjà eu plusieurs tentatives pour modifier les grands traités européens. L’UE, qui compte à présent 27 pays membres, doit adapter ses institutions et ses traités à cet élargissement qui s’est fait petit à petit.

Plus l’UE s’élargit, plus il est nécessaire, mais aussi difficile, de mettre au point des traités pour adapter les institutions supranationales à ces changements. Les grands défis sont de rendre son fonctionnement plus compréhensible pour les Européens, d’harmoniser les lois des pays membres dans plusieurs domaines (éducation, environnement, immigration, travail), et de faire en sorte que l’UE devienne un réel interlocuteur sur la scène internationale.

Représentant unique

Le traité veut, entre autres, renforcer à la fois le rôle des parlements nationaux et celui du Parlement européen, nommer un haut représentant de l’Union pour les affaires étrangères et la politique de sécurité, et créer une personnalité juridique unique. Il permettrait aussi pour la première fois à un membre de quitter l’UE.

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Le document a été mis au point par le Conseil européen, sommet des chefs d’États ou de gouvernement des 27 pays de l’UE définissant les grandes lignes de la politique de cette entité qu’il ne faut pas confondre avec l’Europe géographique.

Ces chefs d’État ont signé le traité le 13 décembre 2007. Pour entrer en vigueur, il doit être ratifié par tous les pays membres de l’Union Européenne. Or, malgré qu’il n’ait pas été ratifié par l’Irlande, le processus continue!

Le Royaume-Uni, souvent qualifié d’«eurosceptique», l’a validé le 18 juin. Le 8 juillet, les Pays-Bas ont été le 21e pays à l’adopter. Dans ces deux cas, ce sont les gouvernements qui ont fait voter son acceptation au sein de leurs parlements respectifs; la population n’a pas été directement consultée par référendum.

Les Français et les Néerlandais avaient voté en 2005 contre la ratification du traité établissant une Constitution européenne. Les adversaires du processus actuel considèrent le Traité de Lisbonne comme une nouvelle tentative de faire passer cette même Constitution européenne refusée.

La présidence du Conseil européen est donnée à chaque pays membre de l’UE, à tour de rôle, tous les six mois. La France assure la présidence du Conseil européen depuis le 1er juillet. Le président Nicolas Sarkozy espère pouvoir trouver une solution au «non» irlandais avant janvier 2009 pour ne pas retarder la mise en application du traité.

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Consensus compliqué

Pour comprendre la difficulté du processus de construction européenne il faut prendre en compte les réalités sociales, culturelles et historiques de l’Europe. Le poids de l’Histoire, la diversité de langues et de cultures sur un petit espace sont très importants et rendent plus compliquée la création de consensus dans le cadre de la construction européenne.

L’Europe est une puissance économique compétitive, mais l’absence d’une personne représentant exclusivement l’UE fait cruellement défaut sur la scène internationale. Les différents pays membres n’ont pas toujours les mêmes positions et cela complique les relations diplomatiques et la résolution de certains problèmes. L’un des objectifs des dirigeants européens, à travers le traité de Lisbonne, est de remédier à cela.

Les priorités des Européens ne semblent pas être les mêmes non plus. Ils concentrent leur regard sur l’intérieur de l’UE plus que sur son influence à l’échelle mondiale. Pour beaucoup, le gouvernement européen semble lointain et plus préoccupé par des questions économiques ou diplomatiques que par leurs problèmes quotidiens.

De plus, ces problèmes varient selon chaque pays, ce qui leur donne autant de raisons différentes pour s’opposer aux traités proposés. On peut se demander quels auraient été les résultats si, dans les 21 pays qui ont ratifié le traité, la population avait été interrogée par référendum.

Réconciliation après la guerre

Il faut cependant relativiser en prenant en considération le chemin parcouru depuis les premiers accords économiques de la Communauté Européenne du Charbon et de l’Acier, signés en 1951 sous l’impulsion du ministre français des Affaires étrangères, Robert Schuman. Ces accords sont considérés comme étant à la base de la construction d’une entité politique européenne.

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L’un des principaux buts de ces accords était de développer l’économie des cinq pays signataires (Belgique, France, Italie, Répu-blique Fédérale d’Allemagne et Luxembourg) en créant des liens d’interdépendance afin de réconcilier, au moins économiquement, 
une Europe meurtrie par la guerre.

Par la suite, de nombreux autres traités ont été signés. Il y a eu la création de la Communauté économique européenne, de la Communauté européenne et de l’Union européenne depuis 1992. À présent, l’UE écrit et contrôle un grand nombre des lois en vigueur dans les pays membres et a permis à certaines de ses régions, notamment dans le sud, de se développer économiquement grâce à des fonds européens.

Il y a eu la création de la monnaie unique, l’Euro, le traité de Schengen instaurant la libre circulation des personnes, et de nombreux accords économiques.

L’Euro

Les choses peuvent sembler compliquées vu que tous les pays n’adoptent pas toujours les changements au même moment. Par exemple, les pays fraîchement entrés dans l’UE, n’ont pas encore adopté l’Euro car les critères économiques nécessaires ne sont pas encore atteints. Ceci n’est qu’une question de temps.

N’y voyant pas leur intérêt, certains pays ont refusé d’adopter l’Euro (Suède, Royaume-Uni et Danemark), ou ne font pas partie de l’espace Schengen (Royaume-Uni et Irlande) mais appliquent certaines des dispositions du traité.

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La construction de l’UE a toujours été pleine d’embûches qui ont parfois conduit les plus pessimistes à parler à tort d’éclatement futur de l’Union. Il est donc fort possible que le refus du traité de Lisbonne par les Irlandais, même s’il complique les choses, n’empêche pas le mouvement amorcé pour réformer les traités existants.

Les principales institutions de l’UE

La Commission européenne, composée de 27 commissaires. Son rôle est de proposer et mettre en œuvre les principales politiques communautaires. Son président est désigné pour 5 ans par le Conseil européen. Le Portugais José Manuel Barroso en est le président actuel.

Le Parlement européen, élu au suffrage direct tous les 5 ans, contrôle le budget européen et a un rôle co-législatif avec le Conseil de l’Union européenne.

Le Conseil de l’Union européenne est la réunion des ministres nationaux chargés des dossiers européens. Ses pouvoirs législatifs sont plus importants que ceux du Parlement européen.

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Le Conseil européen, avec sa présidence tournante tous les six mois, est le sommet des chefs d’État et de gouvernement des 27 pays membres de l’UE.

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