Énergies renouvelables: « l’Ontario doit prendre exemple sur l’Allemagne et le Japon »

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Publié 19/10/2010 par Vincent Muller

«En matière d’énergies renouvelables, l’Ontario et le Canada ne sont pas du tout devant, l’Allemagne et le Japon le sont», expliquait Danny Harvey, professeur à L’Université de Toronto au département de géographie et planification, spécialiste des questions relatives à l’énergie et à l’environnement ainsi qu’au changement climatique. Ces propos contrastent avec ceux du gouvernement provincial qui se targuait, lors de l’ouverture de la ferme solaire de Sarnia en début de mois, de posséder la plus grande installation de ce type au Monde.

La ferme solaire de Sarnia permet d’alimenter en électricité 12 000 foyers, soit 40 % de la ville pour un investissement de 400 millions de dollars. Parallèlement, la province développe aussi l’énergie éolienne avec la ferme éolienne de Gosfield qui alimente 16 000 foyers et celle de Comber qui devrait, à son ouverture l’automne prochain, alimenter 55 000 maisons. Ces deux derniers projets représentent 650 millions $ d’investissement du secteur privé, peut-on lire sur le site du gouvernement.

Énergies «propres»

Affichant sa volonté de développer les énergies sans émission de gaz carboniques, le gouvernement multiplie ses annonces de fermeture de centrales électriques à charbon et souligne que 80% de la production d’électricité en Ontario provient de sources sans émissions… ce qui inclut bien évidemment le nucléaire, qui est la plus importante source d’énergie électrique en Ontario, suivit de près par l’hydraulique. L’éolienne et le solaire n’en sont qu’à leurs balbutiements.

On peut donc se questionner sur la possibilité de multiplier les initiatives telles que celles évoquées plus haut afin ne plus avoir recours au nucléaire.

Rappelant l’urgence de limiter les émissions de gaz à effet de serre, Danny Harvey souligne que les énergies solaires et éoliennes sont idéales: «Il n’y a pas de pollution, pas de production de gaz à effet de serre».

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Prix encore élevé

Mais il reste de nombreux problèmes à résoudre: «Elles sont intermittentes, il n’y a pas toujours de vent, pas toujours de soleil et c’est plus cher que les centrales a charbon. L’énergie éolienne à un coût moins élevé comparé au solaire et c’est deux fois le prix de l’énergie produite à partir du charbon.»

Le prix semble être le principal facteur dissuasif, mais le professeur est optimiste: «Ça devrait baisser avec le temps, ça devrait devenir plus compétitif».

«L’électricité produite par le solaire, coûte environ 30 ou 40 cents le kilowatt-heure en Ontario, mais ça dépend des endroits, par exemple en Californie, avec l’ensoleillement ça coûte moins cher, le prix est de 20 ou 25 cents le kilowatt-heure.»
Selon Danny Harvey, le prix pourrait être divisé par deux dans les 10-20 prochaines années, «mais ce sera toujours plus cher que le coût de l’électricité produite par les centrales à charbon», poursuit-il en ajoutant qu’il faut bien faire des sacrifices pour sauver la planète.

Potentiel sous-exploité

Le potentiel de l’énergie solaire est loin d’être entièrement exploité. Lorsque ce sera le cas, les conséquences en matière de coût seront appréciables.

«L’avantage des panneaux solaires c’est qu’ils peuvent être intégrés partout en ville, dans les bâtiments, et faire économiser de l’argent dans la transmission de l’énergie en utilisant directement l’énergie produite. Ça peut aussi être directement disponible aux heures d’utilisation de pointe comme les après-midi d’été quand il fait très chaud et que les climatisations tournent à plein régime. Ça ramènerait le prix à 15 ou 20 cents le kilowatt-heure, évitant aussi d’utiliser les centrales d’appoint, prévues pour les heures de pic de consommation, qui font augmenter le prix de l’électricité.»

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Différentes technologies

Danny Harvey souligne également que différentes technologies sont disponibles, permettant une adaptation selon l’endroit.

Pour ceux qui s’inquiètent de la place que prennent les panneaux solaires en voyant des installations du type de celle de Sarnia, il faut savoir qu’il existe plusieurs systèmes, dont certains, permettant de limiter le nombre de panneaux.

Il y a, par exemple, des installations comportant des miroirs orientés de façon à concentrer l’énergie solaire sur des panneaux d’une surface réduite.

Il va de soit que plus il y aura de maisons dotées de panneaux solaires, moins les grandes fermes solaires seront nécessaires.

«Les panels sont encore chers, mais on anticipe une baisse des prix»,selon le professeur, «mais il y a encore du chemin à faire, il faut former des installateurs, des inspecteurs, des électriciens.»

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«La province a également un programme de payement pour les personnes qui installent des panneaux solaires chez eux», rappelle-t-il. Ontario Power Authority reverse en effet 80.2 cents le kilowatt-heure produit par des particuliers ayant installé des panneaux solaires.

D’après lui, le Canada devrait prendre exemple sur l’Allemagne où l’on voit des panneaux solaires sur de nombreuses maisons, «le mieux c’est de les intégrer lors de la construction et ça se fait fréquemment, mais on voit aussi beaucoup de panneaux ajoutés après. Pour l’instant, les panneaux ont une durée de vie de 20 ans, il y en a pour chauffer l’eau et d’autres pour produire de l’électricité. Ceux pour chauffer l’eau sont plus simples et moins chers».

Utiliser différentes sources

Quoi qu’il en soit, le solaire, même s’il pourrait constituer une source considérable d’énergie, ne sera jamais suffisant à lui seul: «L’idéal c’est d’avoir différentes sources de production. On peut utiliser le solaire avec l’éolien. Là aussi, il y a du potentiel.»

Chaque type d’énergie a ses avantages et inconvénients, mais peuvent être complémentaires. Contrairement au solaire qui, s’il est utilisé sur les bâtiments peut faire économiser sur les coûts de transmission, ceci est impossible pour les éoliennes qui doivent être loin des villes, d’une part pour éviter les nuisances sonores et d’autre part, car beaucoup de zones venteuses se trouvent loin des centres urbains.

«Nous avons des cartes avec les zones du globe les plus venteuses. Si on utilise ces zones, ça peut être une source d’énergie fiable. En utilisant ça de manière intelligente, avec l’énergie hydraulique et l’énergie solaire on pourrait limiter l’émission de gaz carboniques.»

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Constructions économes

Si l’énergie éolienne, l’énergie solaire et l’énergie hydraulique sont les énergies renouvelables présentant le plus gros potentiel, l’utilisation d’électricité provenant de telles sources doit aussi être accompagnée d’initiatives en ce qui concerne les méthodes de constructions.

«Il y a une nécessité de changer les codes de construction pour dépenser moins d’énergie. Ici, on ne regarde que le prix de la construction. Si les constructions étaient faites de façon à limiter la consommation d’énergie, avec une meilleure isolation, une ferme solaire comme celle de Sarnia pourrait alimenter plus de maisons.»

D’après Danny Harvey, de telles initiatives généralisées (installation systématique de panneaux solaire, développement de l’éolien, constructions plus économes) pourraient permettre l’élimination du nucléaire qui, en 2007, produisait 51.5 % de l’électricité de la province suivi de l’énergie hydraulique avec environ 26 %.

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