Diderot est-il encore actuel?

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Publié 01/10/2013 par Gabriel Racle

En cette année 2013, on célèbre le 300e anniversaire de naissance de Diderot, l’auteur d’une révolution intellectuelle qui a marqué son siècle, le Siècle des Lumières.

Denis Diderot est né le 5 octobre 1713, à Langres, une ville de l’est de la France, dans une famille bourgeoise. Mais il s’en détache après des études dans un collège jésuite pour gagner Paris en 1728 et y poursuivre ses études, on ne sait trop comment. En 1735, l’université de Paris lui décerne une attestation pour avoir suivi avec succès des cours de philosophie durant deux ans et de théologie pendant trois ans.

Après une période difficile, au cours de laquelle se manifeste l’intérêt littéraire de Diderot par quelques petites productions, l’apprentissage de l’anglais, des activités de traducteur, il se fait enfin connaître par ce dernier domaine, surtout avec en 1745 l’Essai sur le mérite et la vertu, qui est une traduction de An inquiry concerning virtue or merit de Shaftesbury, auquel Diderot a ajouté d’abondantes notes personnelles, qui montrent son inclination pour le déisme.

Le grand œuvre

Ses publications, notamment sa Lettre sur les aveugles à l’usage de ceux qui voient, jugées matérialistes, lui valent trois mois d’internement en 1749.

Dès sa libération, il reprend sa collaboration à un travail qui va le rendre célèbre, la confection de l’Encyclopédie, conçue d’abord par son promoteur, le libraire Le Breton, comme traduction la Cyclopaedia de Chambers, un dictionnaire universel des arts et des sciences, en deux volumes.

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Le projet va s’élargir, dépasser les prévisions initiales pour se terminer en tant qu’Encyclopédie ou Dictionnaire raisonné des sciences, des arts et des métiers, comptant 17 volumes de texte, 11 volumes d’illustrations et beaucoup d’articles.

Imprimée en 4255 exemplaires, dont sa rédaction, qui comportant jusqu’à 55 corédacteurs et 200 collaborateurs, s’est étalée sur 15 ans et sa publication sur 21 ans. Avec un Supplément de 4 volumes de textes et un volume d’illustrations, l’ensemble totalise 74 000 articles, 18 000 pages de texte et 21 700 000 mots.

Dernières années

Diderot devient critique littéraire et artistique en ayant à partir de 1759 une responsabilité déléguée dans la rédaction du périodique Correspondance littéraire, philosophique et critique. Il négocie aussi l’achat de tableaux européens pour l’impératrice Catherine II de Russie, à laquelle il finit par rendre visite.

Il quitte Paris par la route le 11 juin 1773 où il est de retour en octobre 1774, après avoir séjourné à Saint-Pétersbourg du 8 octobre 1773 au 5 mars 1774 et fait deux arrêts à La Haye aux Pays-Bas. Il décède le 31 juillet 1784.

Comprendre Diderot

Il serait certes intéressant de mieux connaître l’œuvre littéraire de Diderot, mais il faudrait consacre au moins tout un article à l’Encyclopédie et au rôle qu’il y a tenu. Mieux vaut peut-être dégager quelques-unes de ses idées qui on fait évoluer sa société dans un sens moderne, qui transparaitrait encore de nos jours, par une sorte d’anticipation.

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Pour ce faire, rien ne vaut le petit livre que Dominique Lecourt consacre à Diderot en cette année anniversaire. Il ne s’agit pas d’une biographie de plus, mais d’une analyse de textes de Diderot et de ses réflexions sur l’Encyclopédie pour découvrir l’originalité de l’auteur.

«Le secret de Diderot et de son œuvre est d’avoir pratiqué la philosophie non comme une discipline universitaire, mais comme un art de vivre et de penser.»

Lecourt passe en revue Les Bijoux indiscrets, un conte licencieux alors très en vogue, publié en 1748 et remanié en fonction de l’évolution de la conception que se fait Diderot de la femme, que Lecourt étend jusqu’à la pornographie moderne.

Le Neveu de Rameau soulève la question du rationalisme et donc du rôle de la Raison. «Ce texte étincelant s’impose à notre attention, en ce qu’il ouvrait, presque seul, par avance, à chaud une autre voie au rationalisme.»

Jacques le fataliste aborde le thème de la philosophie, et après son exposé, Lecourt conclut que la leçon que nous donne à ce sujet Diderot «mérite d’être méditée en un temps où l’on s’enivre d’un babillage éthique à la recherche d’un Mal radical.

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Regard sur l’Encyclopédie

«L’Encyclopédie doit donner une image de l’univers; “tout s’y enchaîne et s’y succède par les liaisons insensibles”.»

L’Encyclopédie doit donc être une et la seule façon de le faire «c’est en multipliant les renvois, “les uns aux choses, les autres aux mots”».

«Par le moyen de l’ordre encyclopédique, de l’universalité des connaissances et de la fréquence des renvois, les rapports augmentent, les liaisons se produisent en tout sens, la force de la démonstration s’accroît…» (Diderot)

Que voilà donc un plaisant livre utile et de lecture agréable que celui de Lecourt qui rend vivant un Diderot qui ne peut que susciter une réflexion toujours actuelle. Wikipédia, l’encyclopédie d’Internet, réaliserait-elle le rêve de Diderot?

Auteur

  • Gabriel Racle

    Trente années de collaboration avec L'Express. Spécialisé en communication, psychocommunication, suggestologie, suggestopédie, rythmes biologiques, littérature française et domaine artistique. Auteur de très nombreux articles et d'une vingtaine de livres dont le dernier, «Des héros et leurs épopées», date de décembre 2015.

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