Des noms de pays déroutants

Partagez
Tweetez
Envoyez

Publié 31/10/2007 par Martin Francoeur

J’ai feuilleté quelques ouvrages et grammaires pour trouver un sujet de chronique intéressant mais c’est finalement dans un dictionnaire de noms propres que j’ai trouvé mon inspiration. Avouons que c’est plutôt inhabituel, pour une chronique qui s’intéresse à la langue française, de trouver un sujet dans un dico de noms propres…

En fait, il y avait longtemps que j’avais envie de faire un truc sur les noms de pays. J’avais déjà abordé le sujet après les Jeux olympiques d’Athènes, alors que les délégations, lors des cérémonies d’ouverture et de clôture, avaient été présentées dans l’ordre alphabétique des noms de pays en grec. Cette fois, ce sont les récents événements survenus en Birmanie qui ont piqué ma curiosité.

Pendant quelques semaines, les médias francophones se retrouvaient au cœur d’une véritable valse-hésitation en ce qui a trait au nom du pays. Certains parlaient de la Birmanie, alors que d’autres utilisaient le nom Myanmar.

Certains utilisaient Birmanie un soir et le lendemain, ils parlaient du Myanmar. Les deux formes sont bonnes. En birman, le nom officiel du pays est Myanmar.

Les Nations Unies ont choisi, dans leur Bulletin de terminologie, de consacrer le nom Myanmar en français. Mais dans l’usage, le nom courant demeure la Birmanie.

Publicité

Ce n’est pas le seul exemple de nom de pays déroutant. On entend de plus en plus souvent parler du Belarus, mais le nom courant demeure la Biélorussie.

C’est un peu comme si on se mettait à parler du Deutschland au lieu de dire l’Allemagne. De parler du Suomi au lieu de dire Finlande.

Les noms courants de pays en français sont prescrits dans différents documents qui, parfois, ne s’accordent pas.

L’Organisation internationale de normalisation (ISO), le Groupe d’experts des Nations Unies pour la normalisation des noms de pays (GENUNG), le Bulletin de terminologie des Nations Unies (BTNU), la Délégation générale à la langue française ou, au Canada, le Bureau de la traduction de Travaux publics et Services gouvernementaux (TPSGC) sont autant de références en la matière.

Que nous apprennent ces organismes ou leurs documents de référence? Des choses très intéressantes. Surtout quant aux vrais noms ou aux noms officiels des pays.

Publicité

Des exemples? On pourrait parler de l’usage flottant entre «Vatican» et «Saint-Siège», ou encore de celui encore plus curieux de «Saint-Christophe-et-Niévès» pour parler de l’archipel de «St. Kitts and Nevis» dans les Antilles. Certaines sources prescrivent heureusement «Saint-Kitts et Nevis», avec ou sans traits d’union.

Moldavie ou Moldova? Ça nous ramène à l’hésitation du Belarus ou du Myanmar. Belau ou Palau? Ou encore la Républic des Palaos? Choisissez. Les trois sont bons. Pour peu que l’on connaisse l’État en question!

Certains pays se distinguent par un nom court, simple et efficace. Un nom dépourvu de tout élément faisant référence au type d’État dont il s’agit.

Le Canada fait partie de cette quinzaine de pays seulement qui ont un nom simple. On distingue ces pays de ceux qui se sont sentis obligés d’allonger leur nom: la Principauté de Monaco, l’État Islamique d’Afghanistan, le Royaume d’Arabie Saoudite, la République de Colombie, le Grand-Duché de Luxembourg, la République Française, la République islamique de Mauritanie… La liste est longue. En fait, la plupart des États ont un nom officiel formé d’un générique et d’un nom spécifique.

Mais parmi les noms tout simples, à part le Canada, on retrouve la Barbade, le Japon, la Géorgie, Tuvalu, Sainte-Lucie, Antigua-et-Barbuda, la Jamaïque, la Mongolie, la Nouvelle-Zélande, la Roumanie, Belize et les États-Unis d’Amérique. Inutile de dire qu’il y a longtemps qu’on ne parle plus du «Dominion du Canada».

Publicité

Il y a bien quelques curiosités, aussi. On connaît les États-Unis d’Amérique, mais il faut aussi savoir que le Mexique peut aussi prétendre à l’appellation «États-Unis», puisque son nom officiel est «États-Unis Mexicains». Puis il y a ces trucs très compliqués, comme l’ «Ex-République yougoslave de Macédoine». En attendant de trouver mieux… Ou plus simple.

Enfin, on se soulage un peu de pouvoir utiliser les formes courtes. S’il fallait utiliser le nom officiel de la Libye chaque fois qu’on parle de ce pays, on n’en sortirait pas. Le nom complet? Je vous le donne en mille: « La Grande Jamahiriya arabe libyenne populaire socialiste».

Personnellement, j’ai un faible pour les formes courtes et les appellations traditionnelles. Puisqu’il faut appeler un chat un chat, je milite pour Birmanie au lieu de Myanmar.

Pour Biélorussie au lieu de Bélarus. Pour Cambodge au lieu de Kampuchea. À moins qu’un pays change complètement de nom comme le Zaïre l’a fait en devenant la République démocratique du Congo.

Dans ce cas, il ne faut pas confondre avec la République du Congo. Les plus vieux se rappelleront du Congo-Brazzaville et du Congo-Léopoldville.

Publicité

D’autres exemples de changements de noms? Le Siam est devenu la Thaïlande. Le Honduras Britannique est devenu Belize. La Guyane hollandaise est devenu le Surinam. Le Dahomey est devenu le Bénin. La Haute-Volta est devenue le Burkina Faso.

Comme dans la langue française, les noms propres géographiques évoluent. Et comme dans la langue française, les hésitations sont nombreuses.

Auteur

  • Martin Francoeur

    Chroniqueur à l-express.ca sur la langue française. Éditorialiste au quotidien Le Nouvelliste de Trois-Rivières. Amateur de théâtre.

Partagez
Tweetez
Envoyez
Publicité

Pour la meilleur expérience sur ce site, veuillez activer Javascript dans votre navigateur