Des images saintes et du mouton

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Publié 13/05/2008 par Pierre Léon

Au catéchisme de l’Église catholique – on n’en avait pas d’autre – on nous donnait des images saintes bien belles, toutes en couleur. On les mettait pieusement dans notre livre de messe. L’imagerie religieuse du temps était pleine d’anges coquins avec ailes papillotantes et auréoles dorées.

Ils tournaient en chemises de nuit roses, contre le bleu du ciel, autour de la Vierge Marie, en robe blanche et manteau d’azur, comme il se doit à quelqu’un qui a conçu sans pécher.

Il y avait aussi le Saint-Esprit, sous forme de colombe, descendant sur les apôtres qui, pour la circonstance, avaient sur la tête, des langues de feu venu du ciel. Apparemment, c’était un feu qui ne brûlait pas leurs cheveux et on apprenait que ces langues – ça tombait bien pour le français – étaient les langues étrangères que les apôtres n’avaient pas apprises à l’école.

Elles allaient leur permettre d’enseigner la parole divine dans n’importe quel pays du monde sans jamais avoir appris la grammaire avec ses participes passés et le reste ! C’était la science infuse, mieux encore qu’avec l’Assimil et les méthodes directes, audio verbales, par immersion, et tout et tout. On se sent bien bêtes maintenant et le Saint-Esprit doit en rigoler, ou roucouler, là-Haut sur son perchoir colombesque.

Les images saintes nous rappelaient aussi quelques grands moments de la Bible. Le plus spectaculaire était celui où Abraham, le couteau levé, est prêt à immoler son malheureux fils, pour faire plaisir à ce salopard de Jéhovah. Heureusement, ce dernier pris de remords, arrêtait le bras d’Abraham, juste à temps.

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Le petit, qui avait aidé son père à apporter le bois du bûcher sacrificiel, l’avait échappé belle ! Poignardé et rôti ! Or, Dieu, qui pense à tout, avait fait prendre dans les épines d’un buisson, un bélier ! Le père et le fils, comprenant que c’était un cadeau d’en Haut, vous attrapent ce gros mouton et en font un méchoui sacré et un sacré méchoui!

La religion avait profité de l’anecdote pour manigancer le symbolisme de l’agneau, qui était déjà dans la coutume hébraïque des rites religieux aussi bien que populaires. C’était une offrande ou un cadeau. Ce mythe est arrivé jusqu’à nous puisque traditionnellement dans les familles françaises on mange le gigot rôti à Pâques.

En Palestine, pour avoir les faveurs d’une prostituée, les Hébreux lui amenaient un agneau, ce qui ne passait pas inaperçu. L’église catholique, de son côté, nous faisait chanter  le célèbre cantique :
«Le voici l’agneau si doux,
Le vrai pain des anges,
Du ciel il descend pour nous,
Adorons le tous!»

Je ne sais quel poète bizarre a composé ce cantique farfelu. Un agneau qui descend du ciel et qui est le pain des anges, c’est encore plus beau qu’une colombe transportant les langues de feu. Faut être sacrément mystique pour gober tout ça. Mais on était à l’âge de la confirmation et de la première communion. On avale sans broncher Dieu dans l’hostie, et on s’émerveille de ses miracles, en chantant avec ardeur – bien loin de penser à rigoler d’un texte sacré.

J’imagine qu’il doit en être de même avec toutes les religions et que les prophètes innombrables font bien rire aujourd’hui tous les croyants devenus adultes. C’est-à-dire ayant acquis la raison et le sens de l’humour.

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Mais j’en ai encore long à vous raconter sur mes rapports avec les moutons, que je tiens pour de fichus bestiaux, têtus, vachards, bêtes à manger du foin, et pas n’importe lequel. Mais ce serait trop abuser de l’hospitalité de L’Express.

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