Des cadeaux

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Publié 19/12/2006 par Pierre Léon

Les cadeaux, ces dons pour une occasion spéciale, ont bien dû exister de tout temps. Mais en Occident, ce sont les Grecs et les Latins, dit-on, qui ont institué en coutume les présents faits à l’empereur pour l’anniversaire de sa venue au pouvoir ou pour le premier jour de l’an. Dans ce dernier cas, on appelait cela «donner des étrennes».

La tradition a perduré jusqu’à nous. Les manants offraient des cadeaux à leur seigneur, en signe d’allégeance, les patrons à leurs serviteurs en reconnaissance de bons services, les maris à leur épouse pour la même raison, et parfois par affection mutuelle. Les amoureux s’en comblent toujours. Or il semble, aujourd’hui, que l’on distribue des étrennes à tout le monde et, tout particulièrement aux facteurs, aux éboueurs et aux pompiers, pour se les concilier. Mais alors, pourquoi ne pas en donner au dentiste, au médecin et bien sûr aux agents de police?

Autrefois, les cadeaux aux enfants, étaient souvent assorti d’un chantage: «t’auras des bonbons si t’es sage, un vélo, quand tu rapporteras le prix d’excellence!» Aujourd’hui, il faut donner tout ce que la télévision recommande, sous peine de traumatiser. Ça peut coûter très cher. De même, les cadeaux de mariage. C’est à qui offrira le plus beau. On a eu, comme ça, un superbe dessus de cheminée, fait d’un renard en plâtre doré. On a mis bien du temps à le laisser tomber, craignant l’indignation de la tante qui l’avait offert.

Quand j’étais enfant, on n’avait pas de grands cadeaux à Noël, qui était une fête essentiellement religieuse. Il fallait aller à la messe de minuit. L’église était loin, dans la campagne, on y gelait. Le seul vrai plaisir était l’âne de la crèche, qui faisait merci quand on mettait cinq sous dans la fente qu’il avait sur la tête. En revenant, on plaçait nos sabots devant la cheminée. On devait dormir vite pour que le Père Noël passe. Mais il n’était guère généreux. On avait une orange, fruit rare, et un père Noël en chocolat. Ou un petit Jésus en sucre rose, sur un lit de paille dorée.

Nos vrais cadeaux, on nous les donnait pour les étrennes. Ils étaient, eux aussi, modestes. Poupées, jeux de cubes, de construction, billes, sifflets, souvent fabriqués par nos parents. Il en a longtemps été de même en Nouvelle-France. Un jour de l’an, grande surprise, un oncle m’apportait une trottinette! Hélas, la planche horizontale était cassée. Mon père me l’a réparée tous les huit jours. On a fini par la brûler, comme un objet démoniaque.

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Maintenant, les cadeaux de fin d’année se donnent à Noël, que le commerce a bien désacralisé! Super cadeaux et super mangeailles pour le monde des nantis. Les autres, ceux qui vivent avec deux dollars par mois, ne feront pas grandes festivités.

Dans ce monde en guerres perpétuelles, beaucoup n’entendront que la parole du Christ rapportée par Saint Mathieu: «Je ne suis pas venu pour vous apporter la paix, mais l’épée»*.

Chose étonnante, les cadeaux de Noël apportés à l’enfant Jésus! L’encens, je veux bien, c’était sans doute pour désinfecter un peu l’étable. Et puis, ça sent bon. La myrrhe, résine odorante d’Arabie, à quoi ça pouvait servir à une famille qui vient d’avoir un nouveau né? L’or de Melchior, a été évalué par un financier américain ayant soigneusement consulté le rapport des Évangiles, à l’équivalent de quelques centaines de millions de dollars.

Saint Joseph, en plus d’être cocu, ne devait pas être très malin. S’il avait placé tout cet argent-là à la banque, même à 3%, toute la famille, lui, Marie et les trois ou quatre mômes qu’elle avait eus avant sa virginité, tous auraient pu vivre dans des palaces jusqu’à la fin de leur vie. Au lieu de se lancer dans la bohème et le martyr.

Il faut ajouter que nos trois Rois Mages, avec un peu d’imagination, auraient offert une layette, des couches de rechange et une sucette pour le petit, des chocolats et des roses à Marie, et des cigares à ce pauvre Joseph.

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* Voir la référence dans Le Pied de Dieu. Toronto, GREF, p.162.

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