Les cadeaux, ces dons pour une occasion spéciale, ont bien dû exister de tout temps. Mais en Occident, ce sont les Grecs et les Latins, dit-on, qui ont institué en coutume les présents faits à l’empereur pour l’anniversaire de sa venue au pouvoir ou pour le premier jour de l’an. Dans ce dernier cas, on appelait cela «donner des étrennes».
La tradition a perduré jusqu’à nous. Les manants offraient des cadeaux à leur seigneur, en signe d’allégeance, les patrons à leurs serviteurs en reconnaissance de bons services, les maris à leur épouse pour la même raison, et parfois par affection mutuelle. Les amoureux s’en comblent toujours. Or il semble, aujourd’hui, que l’on distribue des étrennes à tout le monde et, tout particulièrement aux facteurs, aux éboueurs et aux pompiers, pour se les concilier. Mais alors, pourquoi ne pas en donner au dentiste, au médecin et bien sûr aux agents de police?
Autrefois, les cadeaux aux enfants, étaient souvent assorti d’un chantage: «t’auras des bonbons si t’es sage, un vélo, quand tu rapporteras le prix d’excellence!» Aujourd’hui, il faut donner tout ce que la télévision recommande, sous peine de traumatiser. Ça peut coûter très cher. De même, les cadeaux de mariage. C’est à qui offrira le plus beau. On a eu, comme ça, un superbe dessus de cheminée, fait d’un renard en plâtre doré. On a mis bien du temps à le laisser tomber, craignant l’indignation de la tante qui l’avait offert.
Quand j’étais enfant, on n’avait pas de grands cadeaux à Noël, qui était une fête essentiellement religieuse. Il fallait aller à la messe de minuit. L’église était loin, dans la campagne, on y gelait. Le seul vrai plaisir était l’âne de la crèche, qui faisait merci quand on mettait cinq sous dans la fente qu’il avait sur la tête. En revenant, on plaçait nos sabots devant la cheminée. On devait dormir vite pour que le Père Noël passe. Mais il n’était guère généreux. On avait une orange, fruit rare, et un père Noël en chocolat. Ou un petit Jésus en sucre rose, sur un lit de paille dorée.
Nos vrais cadeaux, on nous les donnait pour les étrennes. Ils étaient, eux aussi, modestes. Poupées, jeux de cubes, de construction, billes, sifflets, souvent fabriqués par nos parents. Il en a longtemps été de même en Nouvelle-France. Un jour de l’an, grande surprise, un oncle m’apportait une trottinette! Hélas, la planche horizontale était cassée. Mon père me l’a réparée tous les huit jours. On a fini par la brûler, comme un objet démoniaque.