Depuis quand les chiens ont-ils le droit de vote?

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Publié 08/06/2010 par Jean-Luc Bonspiel

Parmi les premières espèces réduites à l’esclavage pour collaborer à l’essor des humains, on retrouve ces descendants des loups que nous appelons aujourd’hui chiens. L’inexorable jeu de la thèse et de l’antithèse aidant, ces animaux autrefois essentiels à l’économie domestique sont devenus des compagnons, voire des substituts de progéniture – autant d’enfants qui ne grandiront jamais pour décevoir leurs parents.

Ce ne sont pas toutes les cultures de notre planète qui ont fait place au peuple chien dans leurs cœurs. La culture hindoue leur réserve notamment un rôle de paria analogue à celui des porcidés dans l’univers sémite.

Le chien au centre du monde

En Méso-Amérique, où l’on pratique depuis des siècles la culture rituelle de trois plantes (maïs, courges, fèves) dont la combinaison offrait des protéines complètes, de petits chiens ressemblant à nos chihuahuas constituaient presque la seule source de viande avant l’arrivée des Européens.

Aujourd’hui, le menu des cosmonautes chinois comprend de la viande de chien de Guangdong, dont les vertus seraient supérieures à celles du ginseng, selon les témoignages enthousiastes des connaisseurs.

Dans notre paysage urbain, les abreuvoirs disparaissent à la même vitesse que les cabines téléphoniques, comme pour souligner le passage d’une société axée sur les besoins humains vers un corporatisme à outrance, qui n’existe que pour multiplier les sources de revenus à même une masse de consommateurs progressivement aliénés.

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Nos espaces publics s’amenuisent comme peau de chagrin, les développeurs immobiliers construisent jusqu’à la limite de leurs propriétés, et nos parcs sont progressivement amputés pour y aménager des toilettes communes pour chiens.

Quoi faire des déchets?

Il me semble que ça ne prend pas Louis Pasteur pour comprendre que de fortes concentrations de déchets organiques ont historiquement mené à des épidémies de choléra, de typhus, et de fièvre jaune, pour ne nommer qu’une minorité des agents d’infection potentiels.

Les chiens sont les seuls animaux domestiques dont les habitudes d’évacuation sont traitées avec autant de désinvolture dans notre société. Alors que les amateurs de félidés doivent scrupuleusement s’occuper du contenu des litières et que de nombreux chevaux en milieu urbain doivent porter des couches, Médor et Fido peuvent laisser leurs messages olfactifs sur tout le mobilier municipal extérieur sans attirer le moindre commentaire. Leurs déjections liquides sont si corrosives qu’elles laissent des cercles d’herbe morte sur toute pelouse.

Pourtant, ce vandalisme nous coûte collectivement une fortune en mesure de réhabilitations environnementales. Sans parler des taches inévitables que laissent les tas fumants même une fois essuyés (lorsqu’ils le sont).

Chez nous les humains

Pendant ce temps, les humains sont contraints de souffrir en silence ou de trouver des moyens de contourner l’inexistence d’un service social pourtant essentiel.

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Le prétexte de l’homophobie, qui a servi à éliminer nos vespasiennes, ne tient plus aujourd’hui. Nous avons certainement plus droit à des solutions collectives de soulagement que n’importe quel animal.

On nous vante présentement les vertus des nouvelles toilettes entièrement automatiques et auto-nettoyantes, mais le coût prohibitif, la déshumanisation et la susceptibilité à ce type d’équipement aux bris en tous genres laisse sceptique.

En Europe, on offre une mission sociale et la dignité du labeur honnête à des légions de mesdames-pipi qui rendent au processus l’humanité qui s’impose.

Servir les besoins des propriétaires de chiens témoigne évidemment du désir des tributaires de la manne que constitue les sommes consacrées à l’entretien et à l’amusement des pitous.

Renverser la tendance à la commodification de tout demandera un afflux d’humanité sous ses aspects les plus grégaires et solidaires. Il faut immédiatement reprendre le contrôle et affirmer haut et fort que cette société est prioritairement celle des humains, et que l’implantation des toilettes canines doit attendre que tous les primates soient pareillement servis.

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