Daniel Lavoie de retour à Toronto

Partagez
Tweetez
Envoyez

Publié 19/10/2010 par Dominique Denis

De son propre souvenir, cela faisait une douzaine d’années que l’auteur de J’ai quitté mon n’avait pas touché nos rives, n’était pas venu nous livrer ses refrains de sa voix alliant
velours et rocaille. Le passage du plus célèbre des Franco-Manitobains au Studio Glenn Gould samedi soir sera l’occasion de rectifier cette situation. Le temps est donc venu de faire le point avec cet amoureux de poésie, de bonne bouffe, de tranquillité – bref, de la vie.

On voit souvent en vous un de ces artistes qui «vieillissent bien», selon l’expression consacrée.
À quoi l’attribuez-vous?

Je ne sais pas si je suis d’accord! Mais si je vieillis bien, c’est sans doute parce que j’aime ma job: je la fais
toujours avec plaisir. Je suis en paix avec moi-même, je n’ai pas de but précis, sinon d’arriver à faire quelque chose de bon. Aujourd’hui, mes ambitions sont moins grandes, malgré tous ces trophées qui sont accrochés à mes murs et qui ne me donnent pas grand-chose.
Et puis il y a peut-être une certaine chance génétique
qui me protège de la maladie…

Pendant plusieurs années, vous avez mené deux carrières en parallèle, en français et en anglais. Mais cela fait longtemps que vous privilégiez le français. Pourquoi donc?

Quand je travaillais sur les deux tableaux, je travaillais avec une maison de disques et un gérant qui m’avait convaincu que c’était intéressant, et j’avais accepté.
Depuis, je me suis aperçu que j’avais été un peu poussé à le faire, et que je n’avais plus envie de faire ça. Je n’ai aucun regret. Le métier en anglais, c’est la même chose, mais en pire: il y a plus de monde, plus de compétition, on joue plus dur. Disons que je n’y trouvais pas la
sérénité que je trouve à travailler en français.

Publicité

En 40 ans de carrière, vous avez signé votre part de classiques. C’est quoi, une bonne chanson, et à quoi ça sert?

Pour moi, une bonne chanson doit faire vivre trois ou quatre minutes d’émotion, d’intensité; ça doit donner un petit «plus» dans notre vie. C’est comme la cuisine, que j’aime aussi beaucoup: c’est un petit plaisir. Comme dans la cuisine, où l’on peut rester trois heures à préparer quelque chose qu’on va manger en 10 minutes, on passe beaucoup de temps à faire une chanson qui sera passée en trois minutes… La chanson, c’est une forme d’expression qui chatouille l’âme. Ça change selon l’âge qu’on a. Quand j’avais 16-17 ans, je vivais un émerveillement constant au contact des chansons que je découvrais, et que je n’ai jamais connues après, quand j’ai commencé à comprendre comment une chanson était faite et quels en étaient les mécanismes. J’aime autant les chansons, mais (cette connaissance) me rend beaucoup plus exigeant.

Êtes-vous de l’avis de Brassens qui disait que «la chanson, c’est de la poésie à la portée de toutes les bourses», ou voyez-vous une différence entre les deux formes d’expression?

Pour moi, la poésie, c’est vaste: c’est une vision de la vie, une façon d’aborder l’existence qui se cristallise dans les poèmes tout comme dans les chansons. Prenez le poète Gaston Miron [Lavoie a participé à l’enregistrement des deux albums Douze hommes rapaillés chantent Gaston Miron]. Vous lisez d’abord le texte, puis vous écoutez la chanson: c’est autre chose, parce que la musique apporte quelque chose en plus.

Mais toutes les chansons ne sont pas de la poésie. Il y a énormément de chansons qui sont faites pour être rythmiques et mélodieuses, mais c’est du fast food, c’est fait pour être consommé, c’est une autre façon d’aborder la chose. Je n’ai rien contre le fast food, ça peut être très intéressant de temps en temps. J’ai essayé quelques fois dans ma vie de faire du hamburger musical. Mais faire une bonne «chanson hamburger», ça n’est pas évident!

Brel affirmait préférer la tendresse à l’amour, tandis que Richard Desjardins se moque de ceux qui «ont vendu l’amour bandé pour de la tendresse». Où vous situez-vous dans le spectre?

La tendresse est plus facile à vivre que l’amour. Mais ça, ça dépend aussi de ce qu’on veut dire par “amour”: c’est large comme le monde. Mais je dirais que je prône davantage la tendresse que l’amour. C’est une approche à laquelle je m’identifie, comme le docteur Tendresse de mon dernier disque. J’espère qu’on est tous le docteur Tendresse de quelqu’un!

Pour votre passage à Toronto, vous serez seul en scène, avec votre piano. À quoi peut s’attendre le public?

Publicité

Mon spectacle, je le vois un peu comme un conte. C’est 40 années de chansons présentées de façon cohérente, avec la poésie qui occupe une partie importante. Ça semble marcher, puisque les gens embarquent avec moi. Ça me ramène à mes origines: j’ai commencé en solo, puis j’ai joué avec des musiciens, et maintenant je reviens à l’intimisme, en me donnant comme défi de ramener une chanson à sa plus simple expression.

Pendant un bout de temps, j’ai vu pas mal de shows dans des grandes salles, et j’ai remarqué que la partie du spectacle que j’aimais le plus, c’est quand les musiciens partaient fumer une cigarette en coulisse, et que le chanteur se retrouvait seul sur scène avec son piano ou sa guitare. C’est un sacré défi de réduire sa musique à un piano et une voix. C’est quelque chose d’intense et exigeant, qui demande énormément de concentration, mais en même temps, c’est tellement gratifiant…

Daniel Lavoie au Studio Glenn Gould (200, rue Front Ouest), le samedi 23 octobre, dans le cadre de Francophonie en Fête. Samedi 23 octobre à 20 h Studio Glenn Gould, 250 Front Ouest 25 $ à l’avance (30 $ à la porte). Guichet: 416 872-4255,
www.glenngouldstudio.com
www.roythomson.com

Auteur

Partagez
Tweetez
Envoyez
Publicité

Pour la meilleur expérience sur ce site, veuillez activer Javascript dans votre navigateur