Dan Brown: superstar de l’édition

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Publié 18/04/2006 par Paul-François Sylvestre

Si je mentionne les titres Digital Fortress et Deception Point, il est fort probable que vous ne pourrez pas me nommer l’auteur de ces romans. Il s’agit de la même personne qui a écrit Ange & démons. Le titre de son quatrième ouvrage vous est certainement connu: Da Vinci Code. Dan Brown, c’est bien lui, doit publier un cinquième roman en 2006. C’est tout un défi après avoir écrit un livre qui s’est vendu à 25 millions d’exemplaires!

Deux femmes, Delphine Sloan et Claire Gaston, sont parties Sur les traces de Dan Brown et ont rédigé une biographie qui se veut plus une analyse du phénomène Dan Brown qu’un portrait de l’auteur de Da Vinci Code et de Anges & démons.

On y apprend certaines anecdotes intéressantes, à savoir que le père de Dan Brown organisait des chasses aux trésors très élaborées et que les enfants devaient décrypter des codes pour trouver leurs cadeaux. Ou encore que, jeune enseignant, Dan Brown faisait partie de Mensa International, une association formée de gens dont les résultats aux tests d’intelligence sont supérieurs à 98% de la population mondiale.

Les deux biographes précisent que les auteurs préférés de Dan Brown sont «Ludlum, pour ses conspirations compliquées, Steinbeck, pour les descriptions et Shakespeare, pour le jeu sur les mots». Elles notent que Brown «fait partie de ces auteurs besogneux et rigoureux qui ne plaisantent pas avec leur travail. (…) Il est du genre pasteur de l’édition, tout dévoué à son sacerdoce.» Mais là s’arrêtent les fouilles biographiques. Le livre se voue essentiellement à décortiquer l’immense succès de Dan Brown dans le monde de l’édition.

Avant de publier son quatrième livre, Da Vinci Code, Dan Brown reste un quasi inconnu de la critique littéraire. Certains journalistes voient en lui un piètre écrivain.

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Au sujet du Da Vinci Code, le critique littéraire du Times de Londres écrit qu’il s’agit du «roman de gare le plus idiot, le plus mal documenté, le plus stéréotypé». Comment expliquer, alors, qu’il soit impossible de refermer le livre? «L’ouvrage s’inscrit dans la tradition du roman historique, qui a ses illustres devanciers», dont Alexandre Dumas.

Le lecteur se détend tout en apprenant des éléments sur l’histoire, le patrimoine, le passé. Anges & démons et le Da Vinci Code font d’une pierre deux coups: instruire et distraire à la fois.

L’objectif de Dan Brown est de rendre les personnages et l’intrigue si captivants que le lecteur n’a pas conscience d’en apprendre autant, chemin faisant. «Un des éléments que je m’efforce vraiment d’intégrer à mes livres, c’est le savoir. Lorsque vous avez fini le roman – que vous l’ayez aimé ou pas – vous en avez appris des tonnes. Je fais une quantité énorme de recherches.»

L’auteur croit, d’ailleurs, que ses lecteurs sont conscients que l’Église catholique «ne serait pas où elle est aujourd’hui sans avoir quelques squelettes dans ses placards!»

On ne doute pas de l’énorme recherche qui sous-tend les romans de Brown. On se demande, cependant, pourquoi il y a tant d’erreurs factuelles. L’église Santa Maria della Vittoria ne se retrouve pas du tout sur la Piazza Barberini, mais à environ un kilomètre de là. Il ne peut pas y avoir de meurtre au Panthéon à 20 heures parce qu’il ferme ses portes à 19h30. Le conclave n’a pas été fondé en 1179 par Alexandre III, mais au XIIIe siècle, Michel-Ange n’a jamais dessiné les uniformes des Gardes suisses, etc.

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Les accusations des critiques n’ont pas tardé à pleuvoir sur Brown: malhonnête, arnaqueur, mystificateur, imposteur, faussaire… «On l’accuse de ne pas s’être plié aux règles de la fiction, en mettant “roman” sur la couverture de son livre et “vérité” dans son avant-propos.»

Mais, au fond, le lecteur se fout des supercheries qui parasitent le thriller. Il demeure parfaitement conscient que Da Vinci Code et Anges & démons sont de la littérature d’abord conçue pour passer un bon moment.

Parlant de moment, Dan Brown a eu la «chance» d’être au bon endroit au bon moment. Jean-Paul II meurt le 2 avril 2005. Anges & démons est sorti en Europe le 3 mars 2005 et on y raconte une histoire de conclave. Quelle heureuse coïncidence! Le livre avait paru aux États-Unis en 2000, sans grand succès, mais la mort du pape lui donne une étonnante actualité et un sérieux coup de pouce. Sans compter qu’il exploite très habilement un thème en vogue: le goût des codes, énigmes, anagrammes et mystères, de la spiritualité et de l’ésotérisme.

Le succès du Da Vinci Code – 25 millions d’exemplaires vendus sur la planète et un film qui sortira en 2006 – a relancé les ventes d’Anges & démons. Ce dernier ouvrage ne connaîtra sans doute pas les quarante traductions du Da Vinci Code (chinois, arabe, espagnol, bulgare, croate, danois, grec, allemand, japonais, portugais, polonais, roumain, russe, coréen, etc.), mais son auteur peut se targuer d’être devenu une superstar de l’édition, au même titre que J. K. Rowling.

Le prochain roman de Dan Brown s’intitulera La Clé de Salomon, aura Washington comme terrain de jeu et portera sur l’histoire des États-Unis et son lien avec la franc-maçonnerie. Que serait un roman de Dan Brown sans codes ou résolutions d’énigmes? L’auteur laisse tomber un indice: le livre fera allusion à une autre secte ultra secrète faisant usage de la numérologie…

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Delphine Sloan et Claire Gaston, Sur les traces de Dan Brown, la biographie de l’auteur de Da Vinci Code et de Anges & démons, City Éditions, Paris, 2005, 200 pages, 24,95 $.

Auteur

  • Paul-François Sylvestre

    Chroniqueur livres, histoire, arts, culture, voyages, actualité. Auteur d'une trentaine de romans et d’essais souvent en lien avec l’histoire de l’Ontario français. Son site jaipourmonlire.ca offre régulièrement des comptes rendus de livres de langue française.

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